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Habitat - Des logements sociaux mais pas des barres HLM...

La production de logements sociaux "en diffus" est, ces derniers temps, une figure imposée de tout discours sur le logement : élus, organismes HLM, associations, services de l'Etat, tous les acteurs du secteur affirment la nécessité d'accroître l'offre "en diffus". Une offre indispensable pour concilier droit au logement et mixité sociale en zone tendue, et droit au logement décent pour les démunis en zone détendue. Pourtant, dès qu'il s'agit de définir précisément ce que recouvre cette formule, et plus encore de dégager les financements nécessaires pour produire et gérer ce type de logements, les divergences apparaissent. C'est tout l'intérêt du rapport publié cet été par le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) d'aider à y voir plus clair sur ce sujet et de proposer des solutions pour développer concrètement ce parc.

Qu'est-ce qu'un logement social "en diffus"? 

Selon le rapport, entrent dans ce cadre "des petits programmes immobiliers insérés dans le tissus existant, qu'il s'agisse de résidences sociales, maisons-relais de petite taille (de 30 logements au maximum) ou de logements familiaux disséminés (programmes de taille inférieure à dix logements)". Autrement dit, les logements "en diffus" sont situés à la campagne (par exemple transformation en logement d'une ancienne école) comme en ville (achat par un organisme HLM d'un appartement ou d'une maison), possédés par des organismes publics (organismes HLM, associations, collectivités) mais aussi par des particuliers. Le rapport distingue les logements d'insertion inclus dans des opérations HLM classiques (PLAI), les "petits programmes spécialisés" (maisons-relais et autres structures destinées aux personnes ayant des handicaps physiques, sociaux ou psychiques), les logements familiaux insérés dans le parc privé (pavillons, logements individuels privés ou publics destinés sous plafonds de loyer).
Ainsi, la définition du "diffus" ne peut être uniforme sur l'ensemble du territoire. Mais tous ces logements ont une caractéristique commune : coûter plus cher tant en investissement qu'en gestion. Les rapporteurs identifient les surcoûts pour le montage d'opération (les frais fixes sont importants, et donc proportionnellement plus importants pour des opérations de 2 ou 3 logements), les surcoûts d'adaptation (pour insérer le programme dans un espace urbain préexistant), les surcoûts liés à des espaces collectifs incompressibles quel que soit le nombre de logements. Et une fois le logement mis en service, il coûte plus cher à gérer qu'un logement social classique : les organismes HLM raisonnent sur des ensembles de 100-150 logements, la gestion locative de micro-opérations étant par nature plus coûteuse. Sur toutes ces questions, le rapport souligne la grande variété des situations. Ainsi, sur le plan financier, aucun montage d'opérations ne ressemble à un autre : les prix de revient, les subventions d'Etat ou des collectivités, le niveau des prêts du 1% ou de la Caisse des Dépôts, tout est différent. Le rapport propose en annexe des exemples de tours de table.

Des groupes de 100 à 150 logements sur un territoire limité ? 

Face à cet objet protéiforme, la mission du CGEDD formule une vingtaine de propositions afin d'augmenter et de diversifier cette offre de logements sociaux et très sociaux. En premier lieu, elle envisage la conclusion de "contrats de programme" entre l'Etat, les collectivités et les bailleurs sociaux. L'idée est d'affecter une enveloppe de subventions d'Etat (une dotation globale) à la mise en service de 100 à 150 logements dispersés sur un territoire. Assortie d'un droit de préemption renforcé de la collectivité concernée, celle-ci serait dépensée progressivement sur plusieurs années. Une fois la maîtrise d'ouvrage assurée par un organisme HLM ou une association importante, les logements pourraient être ensuite gérés, comme c'est fréquemment le cas, par une "petite" association.
A ce sujet, la mission estime qu'une clarification des relations entre organismes HLM et associations gestionnaires serait la bienvenue : une charte pourrait par exemple définir des "fourchettes de rémunération". Le rapport plaide également pour un renforcement du secteur associatif afin de constituer un "véritable tiers-secteur" : les fédérations d'associations (Pact, Fapil, Unafo) pourraient être sous contrat avec l'Etat pour appuyer des petites associations souhaitant réaliser des opérations en diffus.
Enfin, le rapport recommande une meilleure articulation entre les politiques de résorption de l'habitat indigne (aides Anah) et la production de logements sociaux. Sur le volet logement privé strictement dit, est évoquée la possibilité "d'exonérer d'impôt sur le revenu les loyers très sociaux de logements locatifs privés en diffus, en zone tendue, n'ayant pas bénéficié de subventions pour travaux loués à des ménages déclarés prioritaires urgents par les commissions de médiation Dalo".

 

Hélène Lemesle