À défaut du plan Eau, 15 propositions de la FNCCR
Dans la perspective du plan Eau, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) formule 15 recommandations pour une meilleure gestion de l’eau. Parmi elles, la création d’une police spéciale "eau potable", l’interdiction des pesticides de synthèse dans les aires d’alimentation de captages d’eau potable, l'instauration d’une tarification saisonnière et d’un tarif spécifique pour les résidences secondaires, le retour de la TVA à 5,5% pour l’assainissement ou encore l’attribution d’une partie des fonds Feder aux agences de l’eau.
Alors que la présentation du plan Eau (voir notre article du 29 septembre dernier) prévue lors du carrefour des gestions locales de l’eau de la semaine passée a finalement été ajournée "de quelques semaines" (voir notre article de ce 27 janvier), la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) rappelle les 15 propositions qu’elle a formulées dans une note diffusée fin décembre, passée quelques peu inaperçue avec les fêtes.
Améliorer la connaissance
Première d’entre elles, l’amélioration des connaissances – singulièrement celles des prélèvements, des usages et des restitutions –, "gage d’actions pertinentes, partagées et acceptées". La FNCCR demande notamment le recensement et la régularisation des puits et forages existants, "en réalité très peu connus" – sans préciser comment –, et l’instauration d'une sanction des propriétaires en l’absence de déclaration. Le seuil de déclaration Iota devrait également être selon elle abaissé à 1.000 m3.
La connaissance des réseaux devrait elle aussi être améliorée, afin d’optimiser leur renouvellement. Alors que la réduction des pertes sur les réseaux est qualifiée d’"impérieuse nécessité", la FNCCR souligne que "le choix des tronçons à renouveler ne peut être dicté uniquement par la nécessité de renouveler la voirie". Elle suggère également la "bancarisation" (comprendre, l’enregistrement dans une banque de données) systématique des réparations des casses sur canalisations et branchements (une telle plateforme a été expérimentée par France data réseaux l’an passé et devrait être ouverte à de nouvelles collectivités, et leurs exploitants, cette année).
Mieux prendre en compte l’eau dans les politiques publiques
La FNCCR recommande également de favoriser l’intégration des enjeux de l’eau et la transversalité des politiques publiques locales. Pour ce faire, elle propose notamment de rendre accessible, pour les volontaires, le statut de personne publique associée à l’élaboration et à la révision des schémas de cohérence territoriale (Scot), à l’ensemble des groupements de collectivités territoriales compétents en matière de Gemapi (Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) ainsi qu’aux communes et groupements de collectivités exerçant la mission de contribution de préservation à la ressource ou encore de permettre aux groupements de collectivités exerçant les compétences Gemapi, eau potable, assainissement, gestion des eaux pluviales urbaines et Défense extérieure contre l’incendie d’être associés à l’élaboration et à la révision des plans locaux d'urbanisme - PLU(i). Elle propose encore d’encourager l’organisation, au moins une fois par an, des conférences territoriales de l’eau sous l’égide de l’établissement public territorial de bassin (ou, à défaut, du comité de bassin).
Renforcer la qualité
En matière de qualité de l’eau, la FNCCR prône le zéro pesticide de synthèse dans les aires d’alimentation de captages d’eau potable, via la contractualisation d’un plan d’actions visant l’atteinte de l’objectif dans les 10 ans et de rendre obligatoire l’intégration d’un plan d’actions de reconquête de la qualité de l’eau pour les projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) dont le périmètre inclut soit des masses d’eau "en état moins que bon", soit des captages sensibles.
Lutter contre le gaspillage
Pour lutter contre le gaspillage, elle recommande de donner une police spéciale "eau potable" aux gestionnaires d’eau potable (qui pourrait être transférable par le maire au président de l’EPCI ou du syndicat exerçant la compétence Eau potable). Elle permettrait par exemple de réaliser des travaux d’office de lutte contre les fuites sur le domaine privé après mise en demeure infructueuse ou l’édiction de restrictions temporaires d’usages qui viendrait en compléments des arrêtés "sécheresse". Relevons qu’attribuer cette compétence aurait sans doute également pour conséquence de reposer la question de la légalité des arrêtés municipaux anti-pesticides (voir notre article du 5 janvier 2021), ce que n’évoque pas la note. La FNCCR propose également la possibilité d’interrompre ou de réduire le débit en cas de fuite non réparée, et ce même si la facture est réglée ou mise à la charge des propriétaires bailleurs, les surconsommations issues de fuites non réparées relevant de leur responsabilité.
Par ailleurs, elle propose d’intégrer dans la réglementation environnementale 2020 des objectifs d’efficacité hydrique (réutilisation d’eaux grises, récupération d’eau de pluie, toilettes sèches, y compris en zones d’assainissement collectifs, etc.). Elle recommande de manière plus générale la promotion des eaux non conventionnelles.
Des taxes, des tarifs spécifiques, des fonds européens
En matière financière, la FNCCR plaide pour une augmentation des capacités des agences de l’eau et une meilleure application du principe pollueur/préleveur-payeur. Concrètement, en taxant les atteintes aux milieux et à la biodiversité, comme l’imperméabilisation des sols, en élargissent la redevance pollutions diffuses aux micropolluants ou en supprimant le plafond mordant des agences de l’eau. Elle prône aussi le développement d’une tarification de l’eau "incitative et équitable" : tarification saisonnière, tarif spécifique pour les résidences secondaires, retour du taux réduit de TVA pour l’assainissement ou encore étude d’une tarification de l’eau et de l’assainissement pour les immeubles disposant d’une alimentation en eau privée.
La FNCCR recommande également de mobiliser davantage les financements européens. Déplorant que "dans certaines régions" il soit "particulièrement difficile" de mobiliser les fonds Feder pour l’eau, elle suggère de renforcer l’ingénierie financière et de projet dédiée à l’eau au sein des régions et de rendre obligatoire la prise de compétence Animation et concertation dans les domaines de l’eau par les régions dans le cadre de la gestion des fonds européens. Ou en attribuant la gestion d’une partie des fonds Feder aux agences de l’eau.
Elle plaide en fait pour une "véritable autonomie budgétaire" des services publics d’eau et d’assainissement. Dans le détail, elle demande notamment le respect du principe de remboursement, par le budget général de la collectivité / du groupement compétent, de la quotepart des charges exposées par ces services au titre de la gestion des eaux pluviales urbaines et de la défense extérieure contre l’incendie et de rendre obligatoire le reversement par les communes d’une part de la taxe d’aménagement aux groupements de collectivités chargés des équipements publics rendus nécessaires par les décisions d’urbanisme.