Crise sanitaire : des ménages moins riches... mais plus à l'aise !
Selon une étude de l'Insee sur l'impact de la crise sanitaire sur les revenus des ménages publiée ce 27 mai, un nombre important de ménages indiquent que leurs revenus ont baissé depuis un an mais, dans le même temps, la part de ceux déclarant des difficultés pour boucler leur budget est également en baisse, ce qui s'explique par la baisse de la consommation induite par les confinements.
Le 27 mai, l'Insee a publié un Focus consacré à l'impact de la crise sanitaire sur les revenus des ménages. L'étude porte sur la comparaison entre le premier trimestre 2021 et la même période de 2020. A ce stade, il ne peut encore s'agir d'une étude économique et statistique, mais des résultats d'une enquête sur les perceptions des ménages. Elle n'en fournit pas moins des enseignements inédits et intéressants sur la façon dont les Français ont vécu les impacts économiques de la crise sanitaire. Elle va également à l'encontre du discours dominant sur le plongeon généralisé dans la pauvreté provoqué par la crise sanitaire (même s'il existe évidemment des situations individuelles de ce type).
Une baisse moyenne de revenu d'une quarantaine d'euros par mois
Le principal enseignement de l'étude peut apparaître très ambivalent à première vue. Ainsi, d'un côté, 22% des ménages déclarent que leur revenu mensuel a diminué d'au moins 50 euros par rapport à celui de mars 2020. La baisse annoncée est significative puisqu'elle s'élève en moyenne à 290 euros par mois et par unité de consommation (UC). Elle a aussi des conséquences : 11% des ménages se disant concernés par une baisse de revenus ont dû souscrire un nouveau crédit ou renégocier leurs crédits en cours (y compris immobilier), tandis que 29% ont reçu une aide publique ou un soutien de la part de leurs proches (contre 17% parmi l'ensemble des ménages).
A l'inverse, 9% des ménages déclarent une hausse de revenu supérieure à 50 euros, avec une moyenne de 226 euros par UC. Au final, plus des deux tiers des ménages (69%) disent avoir connu une variation de leur revenu (en plus ou en moins) inférieure à 50 euros par mois. Si on totalise l'ensemble des déclarations, les ménages auraient enregistré, en 2020, une baisse moyenne mensuelle de leur revenu d'une quarantaine d'euros par UC. Face à l'ampleur des impacts économiques de la crise sanitaire, ce résultat montre que les amortisseurs sociaux et les mesures exceptionnelles prises par le gouvernement ont globalement bien fonctionné.
Inégalités sociales et écarts socioprofessionnels
Ces dispositifs n'ont cependant pas empêché certaines inégalités sociales. L'Insee relève ainsi que "les ménages modestes déclarent plus souvent une baisse de revenus que les ménages aisés (29% contre 17%) et moins souvent une hausse (6% contre 14%). La diminution de revenu est ainsi plus forte pour les ménages modestes : -8% par rapport au niveau d'avant-crise pour les ménages modestes, contre -1% pour les ménages aisés. L'écart peut s'expliquer notamment par la corrélation entre revenus modestes et emplois précaires.
De façon plus attendue, les inégalités face à l'impact économique de la crise sanitaire sont aussi socioprofessionnelles. Par exemple, les indépendants ont été la catégorie la plus mise en difficulté financière durant les deux premiers confinements. La part des ménages avec au moins un indépendant déclarant avoir dû s'endetter a nettement augmenté pendant les deux premiers confinements, passant de 13% à 32% à la suite du premier et de 20% à 30% à la suite du second confinement. A l'inverse, la part de l'endettement a baissé durant ces mêmes périodes parmi les ménages comportant au moins un fonctionnaire ou, dans une moindre mesure, un salarié du privé. Ces ménages ont même été plus nombreux que d'ordinaire à mettre de l'argent de côté.
Une situation financière des ménages qui s'est améliorée... à cause de la crise
L'ambivalence des impacts économique de la crise sanitaire tient au fait que, malgré une baisse moyenne (mais relativement modeste) des revenus, la situation financière des ménages s'est améliorée durant cette période. Ainsi, depuis mars 2020, la part des ménages déclarant s'endetter ou tirer sur leurs réserves a diminué. Elle est en effet de 20% en mars 2021, soit quatre points de moins qu'en mars 2020. La baisse a été continue entre mars et juin 2020, puis a rebondi progressivement jusqu'en novembre sans toutefois retrouver le niveau d'avant-crise. Elle diminue à nouveau depuis décembre.
La part des ménages déclarant, au contraire, mettre de l'argent de côté a connu une évolution parallèle : hausse durant le premier confinement, baisse modérée jusqu'en décembre puis faible augmentation depuis le début de l'année 2021. Ainsi, en mars 2021, 44% des ménages déclarent mettre de l'argent de côté, soit 4 points de plus qu'un an auparavant, tandis que la part des ménages "bouclant juste leur budget" est restée stable depuis un an (36%). Au-delà de ces moyennes, d'importantes disparités existent néanmoins selon le profil des ménages. Sans surprise, l'Insee explique que "cette baisse des difficultés financières durant les confinements découle en grande partie des restrictions de consommation ; elle ne reflète pas l'évolution des revenus".