Energie - Contribution au service public de l'électricité : EDF sera remboursée
L'Etat a ôté ce 14 janvier un énorme fardeau à EDF en promettant que l'électricien national se verrait rembourser une ardoise de près de 5 milliards d'euros notamment liée à l'essor des énergies renouvelables, via de futures augmentations de la contribution au service public de l'électricité (CSPE).
Cette CSPE, taxe payée par les consommateurs, sert comme son nom l'indique à couvrir les charges des missions de service public d'EDF, dont celles liées au rachat à un prix bonifié de l'électricité d'origine renouvelable (mais aussi les tarifs sociaux de l'électricité et la péréquation tarifaire - voir encadré ci-dessous). Or avec l'envolée de la production d'électricité solaire et éolienne, les charges que la CSPE est censée couvrir ont explosé ces dernières années. Et les gouvernements successifs ont traîné des pieds pour relever le niveau de la taxe, craignant de faire flamber encore plus des factures d'électricité de plus en plus lourdes. Résultat : la CSPE ne rapportait plus assez, laissant une importante ardoise à la charge d'EDF. A la fin de l'année dernière, celle-ci s'élevait à 4,3 milliards d'euros, sans oublier 600 millions d'euros de frais financiers, soit un montant de 4,9 milliards d'euros. "Depuis 2007, le montant de la CSPE ne suffit pas à compenser l'augmentation de ces charges. Le déficit du mécanisme est porté seulement par EDF, et pèse sur l'endettement du groupe", a résumé EDF. La commission de régulation de l'énergie (CRE) avait elle-même tiré la sonnette d'alarme à de multiples reprises face à ce déficit croissant.
L'électricien national, qui négociait depuis l'an dernier un remboursement de ce manque à gagner, a fini par obtenir gain de cause. Le gouvernement s'est en effet engagé "à ce que le déficit supporté par EDF (...) et constitué principalement depuis 2009 soit résorbé", via des "augmentations à venir" de la CSPE. Le montant définitif de la créance au titre de 2012 sera définitivement déterminé par la CRE dans le courant de cette année, a précisé EDF. La créance totale sera soldée d'ici le 31 décembre 2018, au moyen d'un "échéancier de remboursement progressif, et sera rémunérée aux conditions de marché". "Il faut préserver la capacité d'investir d'EDF, c'était absolument nécessaire que l'Etat procède à cet acte de responsabilité et de transparence", a déclaré à l'AFP la ministre en charge de l'énergie, Delphine Batho.
Reste à préciser les conséquences pour les consommateurs. Le gouvernement se contente d'indiquer que "les augmentations à venir" de la CSPE "permettront par la suite de résorber progressivement le manque à gagner" d'EDF. Delphine Batho a par ailleurs indiqué que la question d'un éventuel déplafonnement de cette taxe - dont les augmentations ont été jusqu'ici limitées à 3 euros le mégawattheure par an - comme celle d'un élargissement de son assiette de prélèvement à d'autres énergies que l'électricité, seraient abordées dans le cadre du débat national sur la transition énergétique. La CSPE a été déjà été relevée début janvier, ce qui va gonfler les factures d'électricité de 2,5% en moyenne, soit environ 15 euros par an et par ménage.
1,4 milliard pour les zones non interconnectées
La majeure partie des charges de la CSPE (59% pour 2013, soit 3 milliards d'euros) vient aujourd'hui des tarifs bonifiés mis en place pour développer les énergies renouvelables, le photovoltaïque (41%) étant loin devant l'éolien (11%) et les autres énergies vertes (7%). Ce mécanisme d'achat par EDF aux producteurs à un prix garanti plus élevé que le prix du marché vaut aussi pour la cogénération (production combinée de chauffage et d'électricité), qui représente 10% des charges de la CSPE.
L'autre poste important de la CSPE est celui de la "péréquation tarifaire", le surcoût de la fourniture d'électricité dans les zones non connectées au réseau national : dans un souci d'égalité, les frais de ces "zones non interconnectées", principalement la Corse et les DOM, sont supportés par la CSPE (28% du total, soit 1,4 milliard d'euros). Enfin, la CSPE finance les tarifs sociaux de l'électricité - allègement de facture pour les ménages les plus modestes - mais leur impact est réduit : 3% cette année.
Lancée à 4,5 euros du mégawattheure, cette taxe a triplé depuis, passant à 7,5 euros début 2011, puis 9 euros au 1er juillet 2011, 10,5 euros au 1er juillet 2012 et enfin 13,5 euros depuis le 1er janvier 2013. Ce bond signifie que la CSPE représente désormais environ 11% du prix de l'électricité taxes comprises pour un ménage.
Selon la CRE, la taxe aurait dû en principe être de 18,80 euros cette année pour couvrir les charges passées. Un rapport de la Cour des comptes évoquait une CSPE "sensiblement" au-delà des 20 euros d'ici 2020.