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Commande publique - Conseil d'Etat : vous devez être loyal..."sauf irrégularité grave"

Dans un arrêt du 20 avril 2011, le Conseil d'Etat  précise sa jurisprudence Commune de Béziers de 2009. Il considère que le principe de loyauté contractuelle ne couvre pas les irrégularités "graves" survenues lors de la passation du marché.
Pour rappel, l'arrêt Commune de Béziers consacrait le principe de la "loyauté des relations contractuelles". Le Conseil d'Etat avait alors considéré que le juge ne pouvait pas annuler un contrat en cours d'exécution pour non transmission de la délibération autorisant le maire à le signer avant la signature effective. Certes, cette erreur avait affecté les conditions du consentement, mais elle n'était pas suffisamment grave pour que le juge écarte le contrat. Autrement dit,  lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, le juge doit d'abord appliquer le contrat  en vertu du principe de loyauté des relations contractuelles. Toutefois, lorsque  "le juge constate une irrégularité tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel".

Une clause de tacite reconduction peut permettre d'écarter le contrat

Dans son arrêt du 20 avril 2011, la haute juridiction administrative ajoute une exception au principe de Commune de Béziers : un manquement aux règles de passation du marché peut être invoqué si "eu égard d'une part à la gravité de l'illégalité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat".
Il s'agissait en l'espèce d'un marché de mobilier urbain renouvelé par une clause de tacite reconduction. La commune refuse de verser une provision à l'entreprise. Elle fait valoir devant le juge administratif que la passation de ce marché n'était pas régulière. Le juge des référés du tribunal administratif  n'entend pas ses arguments et lui ordonne de payer. La cour administrative d'appel de Bordeaux confirme l'ordonnance en considérant que l'irrégularité alléguée relative à la passation du marché - tenant au recours à la procédure négociée en méconnaissance des conditions prévues par les textes - se rattachait à la procédure de choix du cocontractant. Elle ne concernait ni le contenu ni les conditions dans lesquelles les parties avaient donné leur consentement.  Au contraire, le Conseil d'Etat considère dans son arrêt du 20 avril que le juge  aurait dû rechercher si la gravité de cette irrégularité et les circonstances dans lesquelles elle avait été commise n'imposaient pas d'écarter le contrat.
Le Conseil d'Etat annule donc l'arrêt de la cour administrative et décide de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée. Il estime ainsi que l'irrégularité tenant à la conclusion du contrat en application d'une clause de tacite reconduction, "eu égard à la gravité et sans même que le juge du référé provision […] ait à examiner les circonstances dans lesquelles elle a été commise, ne permet pas de regarder l'obligation qui découlerait de ce contrat comme non sérieusement contestable". La commune avait donc raison de ne pas payer l'entreprise.

L'Apasp

Références : Conseil d'Etat, arrêt Commune de Baie-Mahault n°342850, du 20 avril 2011 ; Conseil d'Etat, arrêt Commune de Béziers n°304802, du 28 décembre 2009.

 

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