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Médicosocial - CNSA : les réserves, c'est fini !

La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a tenu, le 14 février, un conseil d'administration exceptionnel, en présence de Roselyne Bachelot-Narquin et de Marie-Anne Montchamp. Deux dossiers principaux au menu de cette réunion inaccoutumée : la position de la CNSA dans le débat national sur la dépendance et l'épuisement des excédents et des réserves de la caisse. Deux sujets qui intéressent très directement les départements.

La présence de la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale et de sa secrétaire d'Etat s'explique par le lancement du débat national sur la dépendance (voir notre dossier ci-contre). Quelles que soient les possibles évolutions de son statut ou de son champ d'intervention, la CNSA sera en effet un acteur incontournable du cinquième risque, ou plutôt de la "cinquième protection", pour reprendre l'expression désormais utilisée par le chef de l'Etat.

Pour un "droit universel d'aide à l'autonomie"

Après un rappel, par les deux ministres concernées, des enjeux et du calendrier du débat national, la discussion s'est engagée au sein du conseil d'administration. Celle-ci a été plus consensuelle que certains échanges passés au sein de cette instance. Le conseil s'est ainsi félicité "que ce sujet de société, attendu par les acteurs concernés, soit l'un des chantiers prioritaires du début d'année et ne se cantonne plus à un petit nombre d'initiés". Il a également exprimé son accord avec la volonté du gouvernement de considérer l'allongement de l'espérance de vie des Français comme un facteur de croissance à saisir et de ne pas limiter le débat aux seules questions financières, mais de l'élargir à une réflexion sur la place des personnes âgées dans la société.
Au-delà de ces considérations générales, les membres du conseil - qui siègent par ailleurs dans les quatre groupes de travail thématiques mis en place par Roselyne Bachelot-Narquin dans le cadre du débat national - ont pris un certain nombre de positions plus directement opérationnelles. La CNSA s'est ainsi prononcée, comme elle l'avait déjà fait en 2007, en faveur de la création d'un "droit universel d'aide à l'autonomie, terme qu'elle souhaite substituer à celui de dépendance". De même, en soulignant le caractère évolutif de la perte d'autonomie et en exprimant le souhait "que la future loi accorde une place importante" à sa prévention, le conseil s'est clairement prononcé en faveur du maintien de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) pour les personnes classées en GIR 4.
Parce qu'un conseil d'administration de la CNSA n'en serait pas vraiment un sans une intervention du GR 31 - groupe rassemblant les 31 organisations représentatives de personnes âgées, des personnes handicapées et des gestionnaires d'établissements et services représentés au sein de la caisse -, ce dernier a néanmoins regretté que le handicap ne soit pris en compte, dans le débat sur la dépendance, que sous l'angle des personnes handicapées vieillissantes. Le GR 31 prend ainsi position en faveur de la convergence - ou à tout le moins de l'harmonisation - des prestations et des prises en charge, rejoint en cela par certains représentants des organisations syndicales et des départements. Plusieurs conseils généraux sont en effet déjà en train d'avancer dans cette voie, à travers la création de "maisons départementales de l'autonomie" regroupant les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), la direction chargée des personnes âgées et les Clic (centres locaux d'information et de coordination).

Pas de clash sur l'assurance dépendance

D'autres questions ont été abordées au cours de cette séance, comme le statut des aidants qui, selon Roselyne Bachelot-Narquin, devrait être au cœur de la réforme. Les représentants des départements - l'ADF n'ayant pas toujours une position commune au sein du conseil d'administration - sont revenus sur leur demande de mise en place d'un financement national qui serait complété par les départements, et non l'inverse comme aujourd'hui. De son côté, le GR31 n'a pas écarté un recours à des produits d'assurance collective ou individuelle, dès lors qu'ils viennent en complément d'une prise en charge universelle et sont suffisamment encadrés. Enfin, le GR31 et des départements ont souhaité que la gouvernance de la "cinquième protection" soit confiée à la CNSA, chacune des deux parties souhaitant toutefois voir sa propre représentation renforcée au sein du conseil d'administration.
Ce dernier est également revenu sur deux thèmes qui n'entrent pas directement dans le champ du débat, mais lui sont néanmoins étroitement liés. Le premier concerne les difficultés de l'aide à domicile, face auxquelles les associations réclament toujours la création d'un fonds d'urgence. La ministre des Solidarités est restée très évasive sur ce point, évoquant la nécessité de précisions supplémentaires sur le suivi statistique. Le second sujet concerne le fonds exceptionnel de soutien en faveur des départements, doté de 75 millions d'euros. Le GR31 a regretté que cette mesure n'ait pas été inscrite dès le budget rectificatif 2011. La création de ce fonds sera toutefois examinée lors du prochain conseil d'administration de la CNSA, le 12 avril.

Le temps des recettes

Après le temps des dépenses, est venu celui des recettes... Francis Idrac, le président de la CNSA, a en effet présenté une longue communication sur les finances de la caisse. L'objectif affiché est de contrer "le caractère néfaste des polémiques qui avaient émergé sur les 'vrais-faux excédents' du budget". A l'origine de cette polémique, les excédents dégagés chaque année par la caisse, depuis son premier exercice en 2005 jusqu'à 2009. Ceux-ci ont atteint un total cumulé de 1,9 milliard d'euros, que la CNSA qualifie de "virtuel" en considérant que ces excédents ont été réaffectés. Un concept audacieux, dans la mesure où l'utilisation d'excédents d'exploitation - qu'ils concernent une entreprise ou une institution - n'efface pas leur existence et - dans le cas d'une institution à vocation non commerciale - ne dispense pas de s'interroger sur leur origine. La CNSA ne manque d'ailleurs pas de le faire, en expliquant - comme les différents audits qui se sont succédé - que ces excédents résultent de la construction de l'objectif global de dépenses (OGD) à partir des autorisations d'engagement. Or les retards de programmation et de lancement des chantiers des établissements - plus que les délais "normaux" invoqués par la caisse et qui avaient bien été intégrés dans le calcul des dotations - ont engendré une sous-consommation des crédits, renouvelée et accrue chaque année avec les nouvelles dotations. Dans son exposé, le président de la CNSA s'emploie à justifier en détail l'utilisation de ces excédents et rappelle que ceux-ci ont notamment permis de financer 1,45 milliard d'euros d'aide à l'investissement (y compris le provisionnement de 165 millions d'euros au titre des contrats de plan Etat-régions). Cette enveloppe a permis de réaliser près de 8,3 milliards d'euros d'investissements dans le secteur médicosocial, contribuant ainsi fortement à la rénovation et à l'accroissement de l'offre. L'essentiel du solde des excédents a été réaffecté à l'OGD de l'année suivante. Une démonstration qui est aussi une pierre dans le jardin du GR31, toujours prompt à dénoncer le "hold-up" de l'Etat et de l'assurance maladie sur les excédents de la CNSA. Au final en effet, seules des restitutions de crédits excédentaires de 150 millions d'euros en 2009 et 100 millions en 2010 sont réellement sortis du champ social au profit du champ sanitaire, sous la forme d'un retour de ces crédits non utilisés à l'assurance maladie, qui les avait financés dans le cadre de l'Ondam médicosocial (objectif national des dépenses d'assurance maladie).

La fin des excédents

Ce débat récurrent sur les excédents et les réserves de la CNSA appartient désormais au passé. D'une part, la caisse a mis sur pied, dès 2007, un système d'"enveloppes anticipées". Celui-ci autorise la délégation aux agences régionales de santé (ARS) d'une "enveloppe d'autorisations", permettant de lancer des projets pour lesquels les crédits de paiement ne seront dégagés qu'en N+1 ou N+2 (et même N+3 depuis 2010). D'autre part, la mission d'audit menée par l'Inspection générale des affaires sociales et l'Inspection générale des finances a conduit à pousser jusqu'au bout cette logique et à refondre le dispositif financier de programmation, en passant d'une logique d'autorisations d'engagement à une logique de crédits de paiement. Le nouveau dispositif se met en place sur la période 2010-2011, après un "débasage" de l'exercice 2009 qui s'est conclu par la sortie de 307 millions d'euros de l'enveloppe de référence. Dès 2011, l'OGD a ainsi été construit en crédits de paiement, sur la base des besoins de financement réels pour 2011 remontés par les ARS. Ce changement d'approche a permis, sans remise en cause des projets engagés, de ramener l'Ondam médicosocial - et donc l'apport d'une branche assurance maladie particulièrement mal en point - à 3,8%, contre 5,8% en 2009. Ce "retour au réel" a toutefois une conséquence qui soulève à son tour des questions. Ainsi, "les réserves subsistant sur la section I (OGD) après la clôture des comptes 2010 (159 millions d'euros) devraient être proches de zéro en début d'exercice 2011, compte tenu d'une mobilisation de ces réserves à hauteur de 141 millions d'euros pour abonder l'OGD de 2011". Dans ces conditions, il faudra compter uniquement sur les dotations budgétaires de l'exercice pour financer un effort supplémentaire d'investissement. Une situation qui pourrait se révéler périlleuse, alors que le débat national sur la dépendance ne va pas manquer de faire apparaître des besoins non couverts en matière d'hébergement et de services...


 

 

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