Social / sécurité - Charte déontologique des CLSPD : les travailleurs sociaux ne sont ni pour, ni contre
L'Association nationale des assistants de service social (Anas) a mis en ligne cet été ses réactions et propositions sur la "Charte déontologique type pour l'échange d'informations dans le cadre des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance" (voir notre article ci-contre du 17 juin 2010). L'élaboration de cette charte avait été présentée par François Fillon comme un moyen de mieux faire accepter deux dispositions de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, plutôt mal vécues par les travailleurs sociaux. L'article 8 de la loi prévoit ainsi le partage des informations "à caractère secret", entre les professionnels de l'action sociale, et autorise ces derniers à révéler au maire et au président du conseil général les "informations confidentielles" strictement nécessaires à l'exercice de leurs compétences. Pour sa part, l'article 1er autorise l'échange des faits et des informations "à caractère confidentiel" entre les participants aux groupes de travail et d'échange d'informations à vocation territoriale ou thématique, mis en place au sein des conseil locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD). La charte présentée en juin dernier est supposée apporter des garanties supplémentaires à celles déjà mises en place par la circulaire du 9 mai 2007 relative à l'application des articles 8 à 10 de la loi du 5 mars 2007.
Si l'Anas n'a jamais caché ses très fortes réserves sur les dispositions sociales de la loi relative à la prévention de la délinquance (voir nos articles ci-contre de 2006 et 2007), sa position et ses recommandations sur la charte de déontologie - présentées dans une note de sept pages - sont beaucoup plus ambivalentes. Certes, en "souhaitant répondre à la commande politique, le texte crée un trouble et une confusion, jouant avec des informations 'confidentielles' imprécises amalgamées à la question du secret". L'association s'étonne également que la charte place le professionnel "comme auto-décideur de ce qui est une information à caractère secret ou pas, omettant la loi et la jurisprudence en la matière". Enfin, la note s'inquiète des risques de dérive qui pourraient découler de la possibilité d'une personnalisation locale de la charte.
Mais une seconde analyse du texte effectuée par l'Anas aboutit à un jugement différent, qui fait de la charte un "non événement". Dans une formule faussement sibylline, l'association estime finalement que "notre analyse montre comment ce texte renforce le fait que nous n'avons pas à dire parce que certains voudraient que nous disions"... En d'autres termes, "la charte devient un moyen supplémentaire de faire respecter le secret professionnel dans et hors des CLSPD". Selon l'Anas, la charte confirme le fait que les professionnels soumis au secret n'ont pas à partager d'information dans le cadre des CLSPD. Elle leur donne même les moyens, ainsi qu'à leurs hiérarchies, de "stopper toute demande ou pression visant à obtenir des informations obtenues [...] dans un cadre différent de celui de la prévention de la délinquance". Une position que l'Anas justifie, selon une ligne constante, par le souci de préserver la relation de confiance avec les familles ou les personnes suivies, indispensable à la mise en oeuvre du travail social.
Jean-Noël Escudié / PCA