Archives

PLF 2016 / Logement / Attentats - Cession du foncier d'Etat pour construire des logements sociaux : le ministère de la Défense ferait-il exception à la décote "Duflot" ?

"Préserver le produit des ressources immobilières du ministère de la Défense" en bénéficiant d'une exception à la décote "Duflot". Tel était l'objet de deux amendements identiques adoptés le 24 novembre au Sénat, dans le cadre de la discussion en séance du projet de loi de finances pour 2016. Un amendement était rédigé par la commission des affaires étrangères, l'autre par la commission des finances.
En adoptant ces amendements, les sénateurs ont ainsi voté la possibilité, pour le ministère de la Défense, d'assouplir la loi "relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social" du 18 janvier 2013, dite loi "Duflot 1", qui permet d'appliquer une décote pouvant aller jusqu'à 100% de la valeur vénale du prix des terrains cédés par l'Etat quand ils sont affectés à la construction de logements locatifs sociaux (voir notre article du 25 janvier 2013).

La programmation militaire comptait sur 662 millions d'euros de recettes

Plus précisément, l'amendement adopté en PLF limite à 30% maximum la décote "Duflot" sur les immeubles de la Défense. Une disposition qui avait été adoptée lors de l'actualisation de la loi de programmation militaire en juillet 2015. "Dans le contexte où notre armée est sollicitée à l'intérieur comme à l'extérieur des frontières pour assurer notre sécurité", comme le rappelle Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères, le ministère de la Défense ne pourrait se passer de cette ressource qui se monte à 730 millions d'euros sur la période 2015-2019.
En séance, Albéric de Montgolfier, rapporteur de la commission des finances, a rappelé que "la programmation militaire prévoit qu'un certain nombre de recettes exceptionnelles, théoriquement assurées pour 662,5 millions d'euros, doivent provenir de la cession de biens immobiliers affectés au ministère de la Défense. Si la décote était appliquée sans plafonnement, des immeubles comme ceux de l'îlot Saint-Germain pourraient être cédés avec une décote de 100%, c'est-à-dire pour rien, ce qui fragiliserait les recettes attendues pour alimenter le budget de la défense".
Christian Eckert a de son côté rappelé que "le pourcentage de décote n'est pas automatique" et qu'un "travail très précis est fait par les services" pour l'établir. Le secrétaire d'Etat au Budget a aussi assuré que "le budget de la Défense se montera, l'année prochaine, à 32 milliards d'euros, quelle que soit la situation, que l'on réalise ou non le niveau attendu de ventes de biens immobiliers, avec ou sans décote". "Ce sont les consignes expresses que j'ai reçues du président de la République et du Premier ministre", a-t-il insisté.

"Les règles s'imposent à tous les ministères"

Autres consignes du président de la République : les règles en matière de cession du foncier de l'Etat "s'imposent à tous les ministères". Dans le cadre d'une "gestion coordonnée" du patrimoine de l'Etat, "quand le ministère de la Défense décide de vendre des biens immobiliers, il doit le faire non pas avec l'idée de se procurer des recettes, mais dans un esprit de bonne gestion de l'ensemble du patrimoine de l'Etat, ce qui implique la protection des intérêts patrimoniaux de l'Etat et le respect de la priorité donnée à un certain nombre de politiques". Bref : "Il faut arrêter d'avoir une vision ministère par ministère de la gestion du patrimoine immobilier".
Michel Bouvard n'en démord pas. Considérant que le ministère de la Défense a été "le principal contributeur en matière d'opérations de réalisation de logements sur terrains et bâtiments de l'Etat", le sénateur (LR) de Savoie en déduit que "le ministère de la Défense a subventionné le ministère du Logement, puisque les décotes 'Duflot' ne figurent aucunement dans les crédits de ce dernier". Et d'ailleurs, selon lui, "tout ce qui contribue à nettoyer la décote 'Duflot' va dans le bon sens !".