Cent millions de touristes étrangers en 2020 : Jean-Yves Le Drian livre le discours de la méthode
Edouard Philippe avait, le 26 juillet dernier, lors du premier comité interministériel du tourisme (CIT) du quinquennat, annoncé qu'il maintenait l'objectif de 100 millions de touristes internationaux en 2020 fixé par le précédent gouvernement. Avant le futur CIT, programmé le 19 janvier prochain, Jean-Yves Le Drian a dessiné la méthode pour y parvenir. Il a identifié trois axes : les services publics, la restructuration du secteur et une bonne promo à l'internationale.
Intervenant, le 21 novembre, devant le 65e congrès de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih), le ministre des Affaires étrangères, également en charge du tourisme, a détaillé sa stratégie pour atteindre à l'horizon 2020 l'objectif fixé par le Premier ministre de 100 millions de touristes internationaux et de 50 milliards d'euros de recettes (voir notre article ci-dessous du 27 juillet 2017). Une méthode qui entend se concentrer sur "trois axes prioritaires" : améliorer la contribution des services publics à la qualité de l'offre touristique française, améliorer l'offre touristique elle-même en la structurant davantage et, enfin, améliorer sa promotion auprès des clientèles nationales et internationales, selon un double effort de lisibilité et de visibilité.
Améliorer les procédures de délivrance des visas et renforcer la sécurité des touristes
Sur le premier axe, Jean-Yves Le Drian a annoncé que "l'Etat doit tenir un engagement simple : l'ensemble des services publics doivent être mobilisés pour assurer une qualité de prestation au meilleur niveau". Il en a aussi donné quelques exemples concrets, comme l'amélioration des procédures de délivrance des visas. Grâce aux améliorations apportées dans l'organisation et l'efficacité des services consulaires dans certains pays (Russie, Inde, Chine...), les résultats se font sentir, même s'il est difficile de faire la part entre l'effet des progrès accomplis et l'impact de la reprise de la fréquentation touristique de la France. Néanmoins, au 30 septembre, le nombre de visas délivrés était en hausse de 22% par rapport à 2016, ce qui représente environ 300.000 visas supplémentaires.
Autre exemple donné par le ministre : le déploiement, avant la fin de l'année, de 200 agents supplémentaires pour le contrôle aux frontières dans les aéroports, "afin de réduire les temps d'attente et les files parfois interminables qui ne sont ni agréables pour les voyageurs, ni bonnes pour notre image de marque". D'autres actions sont également en cours de déploiement, comme le renforcement de la sécurité des touristes - en particulier chinois - avec l'adoption d'un "Plan tourisme" par la préfecture de police de Paris, la réforme de l'apprentissage et de la formation professionnelle ou encore... la réforme du RSI (régime social des indépendants).
Fonds investissement tourisme : des résultats "encourageants"
Sur le second axe d'amélioration et de structuration de l'offre touristique française, Jean-Yves Le Drian a mis en avant la création, en 2015, du fonds Investissement tourisme (FIT) porté par Bpifrance. Il juge les premiers résultats "encourageants", mais considère que "nous devons accélérer le repositionnement de nos destinations". D'où le lancement d'une mission spécifique sur l'investissement dans le secteur du tourisme, qui remettra une "feuille de route" au Premier ministre le 19 janvier prochain lors du conseil interministériel du tourisme. L'objectif est de "lutter contre la dévitalisation des stations touristiques, souvent liée à l'insuffisance ou à la vétusté de certaines offres de services ou d'une partie de l'offre en matière de logements".
Un cadre réglementaire "complet" concernant les plateformes de type Airbnb
Un autre volet concerne les nouveaux acteurs de l'économie numérique, avec un objectif qui a dû résonner agréablement aux oreilles des congressistes : "faire en sorte que l'irruption des nouvelles technologies et de nouveaux usages ne se fasse pas au détriment des acteurs du tourisme". "Ce que je souhaite, c’est de faire en sorte que nous soyons assurés, dans l’intérêt de nos visiteurs et dans l’intérêt de l’industrie du tourisme, qu’il y ait un cadre réglementaire complet, efficace et opératoire avant même l’arrivée des grands événements que la France va connaître, que ce soit la Coupe du monde de rugby, que ce soit les Jeux olympiques, que ce soit, je l’espère, l’Exposition universelle en 2025", a-t-il déclaré.
En pratique, on se dirige vers une généralisation de l'enregistrement des résidences principales "pour faire en sorte qu'il soit parfaitement lisible et transparent". De même, le décret détaillant les modalités de sanction des manquements des plateformes d'intermédiation touristique sera prochainement publié, tandis qu'un autre décret mettra en oeuvre la transmission automatique des revenus des hôtes à l'administration fiscale.
Poursuite de la politique en faveur des pôles d'excellence
L'amélioration de l'offre touristique française passe aussi par le développement d'activités et de services "en adéquation avec les aspirations du touriste d'aujourd'hui". C'est précisément l'objectif des cinq pôles d'excellence créés par le ministère et dédiés respectivement à l'écotourisme, à l'oenotourisme, au "tourisme de savoir-faire", au tourisme nocturne et au tourisme de montagne en été.
Profitant du classement de Paris en tête des villes mondiales de congrès, le ministère entend également encourager le tourisme d'affaires comme un pôle d'excellence supplémentaire. L'Etat, les collectivités et les professionnels ont donc signé le contrat de filière "Rencontres d'affaires et événementiel" et ont présenté une feuille de route de 50 mesures pour développer ce secteur, qui représente 7,5 milliards d'euros de retombées annuelles moyennes et environ 15 millions de visiteurs par an.
Mieux vendre la destination France
Enfin, le troisième axe de la stratégie consiste à mieux promouvoir l'offre française à l'international. Ceci s'est notamment traduit par la création de seize "marques de destination mondiales" gérées par Atout France. Devant les demandes des élus et des professionnels sur la promotion de la ruralité, Jean-Yves Le Drian a toutefois accepté "de faire intervenir les régions dans la diffusion de l'offre touristique", ce qui "permettra la mise en valeur de la ruralité, car les régions sont très sensibles à ce fait".
Le ministre a également confirmé la "pérennisation" des financements d'Atout France et redit qu'une partie des recettes liées à l'augmentation des délivrances de visas servira au développement de l'attractivité touristique et permettra aussi à Atout France de renforcer son action. Il a également annoncé que ce dernier lancera bientôt un nouveau portail "france.fr" en seize langues, qui regroupera notamment l'ensemble des marques mondiales.
Enfin, il a confié à trois personnalités - dont le directeur d'Atout France - une mission d'identification de l'ensemble des leviers disponibles pour renforcer les moyens de promotion de la destination France. Le rapport sera remis en janvier, avant que des mesures soient proposées au comité interministériel suivant.