Aménagement du territoire - Cécile Duflot veut faire de "l'ultraproximité"
Le futur commissariat à l’Egalité des territoires voulu par Cécile Duflot devra-t-il se trouver un autre nom ? En tout cas, la commission installée le 10 septembre pour réfléchir à sa mise en place invite à prendre des précautions avec le terme. "Un état d’égalité absolue (dont pourrait par exemple attester un même taux de chômage, une même espérance de vie et de mêmes aménités écologiques) recouvre en réalité une infinité de situations territoriales", insiste le rapport d’étape de cette commission, remis mardi à la ministre de l’Egalité des territoires et du Logement. Plutôt que de chercher l’égalité absolue, le rapport propose de définir une stratégie qui vise à réduire les difficultés propres à chacun. D’ailleurs, la commission constate que si les inégalités régionales ont eu tendance à se réduire ces dernières années, les inégalités infrarégionales, elles, se sont creusées. Le rapprochement des régions s’est fait par le haut et non par un nivellement. Plus de la moitié de ces "macroterritoires" en ont bénéficié. Entre 2001 et 2008, le revenu disponible par habitant a ainsi augmenté de 3,4% en métropole. "Cela peut être considéré comme un acquis de longue période des politiques d’aménagement du territoire, sans qu’il soit cependant possible d’en mesurer la contribution exacte", avance le rapport.
Certains territoires sont toutefois restés à quai, en particulier le Nord-Pas-de-Calais "dont la fragilité relative s’est accentuée au cours de ces dix dernières années". La cassure se fait donc essentiellement à l’intérieur d’un même territoire, notamment dans les ZUS, le rural profond ou le périrurbain. La commission relève "l’incapacité des acteurs à redresser la barre". Elle constate que s’il existe une politique de la ville et une politique des espaces ruraux, "il n’en existe sans doute pas encore vers ces nouveaux territoires de conflits et de meurtrissures que l’on retrouve en zone périurbaine".
Pour répondre à ce défi, la commission présidée par Thierry Wahl appelle à une "coconstruction" autour d’une nouvelle stratégie nationale associant les collectivités. "Chaque niveau de la puissance publique doit intervenir tantôt en pilote, tantôt en chef de file, tantôt en acteur unique, là où son intervention est la plus appropriée, selon le principe de subsidiarité." Mais l’Etat doit rester "le garant de l’égalité des territoires" en veillant à la cohérence des actions, et en assurant une ingénierie territoriale de qualité.
Territoires en situation de bascule
Auditionnée par l’Assemblée en commission élargie, jeudi, sur les crédits de la politique des territoires 2013, la ministre de l'Egalité des territoires a fait son miel de ce rapport d’étape, indiquant que l’accent devrait être porté sur "les villes moyennes et les territoires périurbains décrocheurs". "J’espère être la première d’une longue liste de ministres de l’Egalité des territoires", a-t-elle déclaré, disant vouloir se concentrer sur ces "territoires en situation de bascule moins bien dotés en ingénierie". Ce qui permettra au passage de concentrer les crédits (en baisse de 6,5% en 2013) et d'éviter les saupoudrages. D'ailleurs, Cécile Duflot rencontrera le commissaire européen à la Politique régionale, Johannes Hahn, ce vendredi 26 octobre pour discuter de la question des régions intermédiaires qui font "écho aux inégalités infrarégionales". La création d’un nouveau statut pour ces régions dont le PIB par habitant est compris entre 75% et 90% de la moyenne communautaire constitue l’un des enjeux de la future programmation européenne en cours de négociation. Dix régions françaises pourraient en bénéficier.
La ministre s’est par ailleurs dite favorable à un regroupement dans les années à venir des crédits de la politique de la ville et de ceux de la politique des territoires, soit près d’un milliard d’euros (respectivement 540 millions et 300 millions d’euros). Tançant vertement la politique d'appels à projets, Cécile Duflot travaillera enfin à une nouvelle génération de contrats de projets. Elle a insisté sur l’importance de contrats territoriaux à l’échelle infrarégionale. La ministre a indiqué travailler étroitement avec l’Assemblée des départements de France sur "la question des services publics de proximité, la petite enfance, le maintien des personnes âgées à domicile…" "La question de l’ultraproximité doit être repensée dans une logique de mutualisation", a-t-elle ajouté.
La ministre a rendu hommage à la Datar, qualifiée de "machin" par le député Pierre Morel A L’Huissier. "Il ne s’agit pas d’une création mais d’une recréation", a-t-elle dit, alors que la Datar, qui fêtera ses cinquante ans l'année prochaine, aura vocation à être intégrée dans le nouveau commissariat. La commission rendra son rapport définitif à la fin de l’année. Le commissariat pourrait voir le jour dans la foulée. Il n'aurait pas uniquement un rôle de prospective et serait une force d'appui pour les collectivités en manque d'ingénierie.