Habitat et Territoires - Cécile Duflot affiche son programme pour le logement, "l'égalité des territoires"... et les compétences des collectivités
S'exprimant le 20 juin 2012 devant les représentants des Dreal (directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement), Cécile Duflot a esquissé le programme de son ministère. Sans aborder encore les aspects concrets et le calendrier, la ministre de l'Egalité des territoires et du Logement a néanmoins indiqué ses orientations pour les deux grands axes de son portefeuille. Notamment en matière de logement.
Sur ce terrain, l'objectif affiché est d'"améliorer significativement sous cinq ans les conditions de logement de tous les Français". De façon plus précise, Cécile Duflot entend relever "quatre défis majeurs" pour atteindre cet objectif.
Le premier et "le plus important" est celui de l'offre. La ministre a confirmé l'objectif de production de 500.000 logements par an. Ceci passe par "un programme de mobilisation du foncier sans précédent", avec une "forte décote pour la réalisation de logements sociaux". Reprenant une mesure esquissée par le gouvernement de François Fillon, elle a indiqué que, pour le foncier privé, le ministère travaille "à l'instauration d'une fiscalité spécifique sur les terrains constructibles, qui permettra de lutter contre la rétention foncière". Elle a également confirmé le "renforcement" de la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain), mais sans évoquer les mesures envisagées (durcissement des sanctions financières, relèvement du seuil à 25 ou 30% ?). Vis à vis des bailleurs sociaux, la ministre a affirmé que le secteur HLM bénéficiera de "moyens renforcés" - allusion au relèvement du plafond du livret A - pour atteindre les 150.000 logements sociaux par an. Mais cette aide aura pour contrepartie des exigences elles aussi renforcées : accroissement du parc par la construction et non par l'acquisition de logements existants, arrêt de la construction massive de T3 et de T4 au profit des petits et des grands logements... Dans le secteur privé, la ministre a exclu la mise en place de "dispositifs dispendieux comme le Scellier", mais compte "faire revenir les investisseurs institutionnels sur le segment du logement intermédiaire".
De l'accès au logement au droit au logement
Le second défi est celui de l'"habitat écologique". Cécile Duflot a confirmé l'objectif - annoncé par le chef de l'Etat - de doter un million de logements par an, dont 600.000 logements anciens, d'une isolation thermique de qualité. Ceci passe, entre autres, par une accélération du programme "Habiter mieux". La ministre a également fait part de son souhait d'ouvrir "un chantier de grande ampleur" sur la question des matériaux, du recyclage et des filières d'écomatériaux.
Le troisième défi concerne l'accès effectif au logement et, par conséquent, la question des loyers. Sur ce point, Cécile Duflot a réitéré l'engagement du gouvernement à mettre rapidement en place un dispositif d'encadrement des loyers. Dans un premier temps, cela passera par l'exploitation de toutes les possibilités offertes par la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et par un "décret d'urgence". Dans un second temps, c'est la loi elle-même qui sera "revue en profondeur". En attendant, la ministre compte mettre en place, avec les collectivités concernées, des observatoires des loyers dans la plupart des agglomérations.
Enfin, le quatrième défi porte sur le droit au logement opposable. Les avancées en ce domaine passent par un renforcement de la prévention des expulsions et de la lutte contre l'habitat indigne. Elles supposent aussi de "mieux gérer l'articulation entre hébergement et logement autonome". Toujours sur le thème de l'accès au logement, Cécile Duflot s'est prononcée pour la constitution d'"un véritable service public du logement" et pour une "réforme en profondeur" des procédures d'attribution de logements sociaux.
"Le partage des compétences doit être adapté au territoire"
L'autre item de l'intitulé de son ministère, l'égalité des territoires - par lequel elle avait d'ailleurs choisi de démarrer son allocution –, aura donné lieu à moins de précisions. Mais aura en tout cas permis de constater la dimension plutôt extensive que Cécile Duflot donne à ses attributions. D'aucuns pourront par exemple s'étonner qu'elle ait insisté sur la façon dont elle entend revoir le "partage des compétences" entre niveaux de collectivités - une problématique que l'on aurait plutôt attendue du côté de la ministre en charge de la Décentralisation ou du ministre de l'Intérieur. Avec, de surcroît, un volontarisme affiché : "Je veux renforcer le pouvoir des régions en conférant une portée contraignante aux schémas régionaux rassemblés en un document unique", "je souhaite le renforcement du pouvoir des intercommunalités", "le partage des compétences doit être adapté au territoire", "je souhaite que certaines compétences des EPCI puissent être exercées par le département en territoire rural".
Cécile Duflot a d'ailleurs elle-même énuméré le vaste champ que recouvre selon elle le décret d'attribution de son ministère : "Avenir de la politique européenne de cohésion, organisation nationale de la programmation des fonds européens, politique en direction de la ville et en direction des zones rurales défavorisées, péréquation entre collectivités, aménagement, urbanisme, politique du logement et de rénovation thermique de l’habitat, implantation des effectifs des services publics, pôles de compétitivité et suivi des mutations économiques." Vaste programme, donc, pour une ministre qui semble en tout cas avoir assimilé le vocable territorialement correct : "diagnostics partagés", "contractualisation rénovée", "planification stratégique renouvelée et participative"… S'agissant de la politique de la ville, on saura que Cécile Duflot entend donner "un nouveau cadre à la géographie prioritaire" et "poursuivre la politique de renouvellement urbain" en s'appuyant sur des contrats uniques.