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Réforme des collectivités - Carte intercommunale : les acteurs du développement local restent sur leurs gardes

L'Union nationale des acteurs et des structures du développement local (Unadel) considère que le décret du 30 janvier sur les CDCI et, plus globalement, la marge de manoeuvre laissée aux préfets dans la recomposition de la carte intercommunale, sont préjudiciables aux territoires de projets.

Pas franchement rassurés. Certains représentants des élus locaux ou d'autres acteurs du développement local, à l'instar de l'Union nationale des acteurs et des structures du développement local (Unadel), continuent d'exprimer inquiétudes et réticences depuis la publication, le 30 janvier, du décret relatif à la composition et au fonctionnement des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI).
Rappelons que ce décret (voir ci-contre notre article du 31 janvier) marque en quelque sorte le "top départ" de l'un des principaux chantiers de la réforme des collectivités territoriales, celui de la simplification de la carte intercommunale française. Ceci, en agissant à plusieurs niveaux. Il faudra renforcer les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), en imposant un seuil minimum de 5.000 habitants pour les EPCI à fiscalité propre ; faire en sorte que les communes isolées rejoignent un EPCI à fiscalité propre ; dissoudre ou fusionner une partie des syndicats intercommunaux et syndicats mixtes, qui sont aujourd'hui entre autres un outil des "pays" (pays du Gier, pays de Bitche...), à peine épargnés dans la réforme.
Dans cette perspective, le gouvernement a fixé un calendrier serré, confirmé par le décret du 30 janvier. Les CDCI devront avoir achevé, au plus tard le 17 mars 2011, le renouvellement de leur composition, suivant le nouvel équilibre imposé par la loi – avec des EPCI à fiscalité propre qui montent en puissance, passant de 20 à 40% des membres de la commission ; et inversement des représentants des communes qui perdent du poids, de 60 à 40%. Les CDCI devront ensuite élaborer le schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI), sur la base d'analyses et de propositions fournies par la préfecture. Ce schéma devra être acté par le préfet avant le 31 décembre 2011. Puis, à partir du 1er janvier 2012, et jusqu'au 30 juin 2013, viendra le cas échéant l'heure d'imposer des fusions, de dissoudre des syndicats, de rattacher des communes à un EPCI, suivant les orientations du SDCI. La CDCI, pendant cette période, sera cantonnée à un rôle d'avis et d'amendement. C'est en tout cas ce que considère l'Unadel dans son analyse du décret (à télécharger ci-contre). En sachant que le SDCI ne sera renouvelé que tous les six ans.

A contre-courant des dynamiques territoriales ?

"Les élus locaux ont donc très peu de temps – trois semaines ! – pour organiser leur représentation au sein des CDCI, d'autant que les élections cantonales vont mobiliser beaucoup d'énergie et d'attention pendant ce court délai. Puis ils disposent d'assez peu de temps pour élaborer le SDCI, compte tenu de son impact et de ses enjeux. Autrement dit, les élus locaux sont sommés de trancher très vite dans des dynamiques territoriales qui ont mis des années à se construire, avant que le préfet n'impose ses solutions. C'est contraire à tous les principes qui ont guidé le développement local", déclare à Localtis Stéphane Loukianoff, délégué général de l'Unadel, réseau associatif "des acteurs et des structures du développement local, dans sa dimension participative et partenariale".
Souhaitant se faire le porte-parole des "inquiétudes de nombre d'acteurs du développement local", l'Unadel inquiète s'interroge tout autant sur les résultats attendus. "Nous craignons que les intercommunalités ne soient redécoupées sur la seule base de critères comptables, technocratiques, dont l'inefficacité, notamment économique, a depuis longtemps fait ses preuves dans de multiples domaines. Jamais on ne parle, dans la loi ni dans le décret, des territoires de projets, des dynamiques de concertation. Or c'est ce qui fait tout le succès d'une intercommunalité. Des gens qui se sont choisis et travaillent en bonne intelligence, autour d'objectifs communs, que ce soit à l'échelle d'un pays ou d'un EPCI. Pas des ratios d'habitants ou des seuils statistiques", conclut Stéphane Loukianoff. On rappellera toutefois que l'Assemblée des communautés de France (ADCF) notamment, porte un regard sensiblement différent sur ce volet de la réforme. Son président, Daniel Delaveau, estime ainsi que si "la consigne est bien de faire bouger les choses", il s'agit bien "d'aller vers un schéma qui prenne entre autres mieux en compte les Scot, les bassins de vie, qui ait un sens" et de mettre un terme aux "intercommunalités d'aubaine" (voir ci-contre notre article du 21 janvier).