Cap Fréhel : révéler la beauté par la sobriété de l’aménagement (22)

Mené par le Conservatoire du littoral et ses partenaires, le Syndicat mixte du grand site Cap d'Erquy Cap Fréhel et la commune de Plévenon, entre 2015 et 2018, le travail sur le site du Cap Fréhel a consisté à en révéler la beauté, l’ampleur et la puissance, tout en le protégeant d’une trop grande fréquentation.

Environ 1 million de visiteurs se rendent au Cap Fréhel chaque année. Au fil du temps, de nombreux aménagements avaient été réalisés pour guider les touristes dans la lande et pour permettre aux automobiles de se garer au plus près du paysage. Mais devant la fréquentation sans cesse croissante du site, l’État, via le Conservatoire du littoral a fait l’acquisition d’une partie du site en 2012 pour réaliser de nouveaux aménagements, afin de limiter l’accès des automobiles au bord de la falaise. « Le Conservatoire du littoral est propriétaire de la pointe du Cap. Mais toute la lande, soit quelque 400 hectares, est propriété de la commune », précise Marie-Laure Cayatte, directrice du Syndicat mixte du grand site Cap d'Erquy Cap Fréhel et cheffe de projet du Grand site de France. Car le site a été labellisé après ces travaux d’aménagement.

Trois phases de travaux

Les maîtres d’ouvrage ont confié à un paysagiste, Alain Freytet, la mission d’opérer ces transformations, qui visent à limiter l’accès automobile à la falaise et protéger nature et paysage.

La première phase de travaux, en 2015, a consisté à démolir le restaurant La Fauconnière, en perte d’activité et qui ne répondait plus aux normes actuelles d’assainissement. Le bâtiment a été détruit, mais les deux terrasses du rez-de-chaussée ont été conservées pour réaliser un belvédère offrant une vue époustouflante sur le paysage. La deuxième phase de travaux, menée à partir de 2017, a permis de restructurer les cheminements, auparavant raides et directs, afin de mettre en scène le paysage pour que le visiteur pas à pas découvre sa grandeur. La troisième phase, et non la moindre, a consisté à faire reculer le stationnement, en agrandissant le parking de la Teignouse, à l’entrée du site, et en supprimant celui situé à l’extrémité du site, au pied du phare. 80 places ont donc été supprimées ; le site propose aujourd’hui 237 places de stationnements, mais aussi, et c’est nouveau, 8 places pour les bus et les camping-cars. Des horodateurs ont été installés, et les recettes de stationnement reviennent directement à la commune qui est propriétaire du terrain du parking. Elles s’élèvent à quelque 350 000 € par an, auxquels s’ajoutent les recettes des visites organisées du phare (150 000 € par an).

Évolution du comportement

La chaussée bitumée a été décroûtée, les anciennes et disgracieuses toilettes enterrées ont été supprimées au profit de toilettes sèches, positionnées sur le stationnement de la Teignouse. L’ancien mobilier urbain trop visible (poubelles, bancs, grillages, blocs rocheux anti-voitures) a également été supprimé. L’ensemble du site a été renaturé, en respectant le principe du renouvellement spontané (sans semis ni engrais ni arrosage), afin de laisser la lande se reconstituer naturellement.

Les cheminements piétonniers sont aujourd’hui à la fois plus confortables et plus étroits. Surtout, ils sont conçus de façon à « mettre en scène » le paysage. Selon la directrice, « le comportement des touristes a évolué. Alors qu’auparavant, ils venaient en voiture au plus près du panorama, ne sortant parfois qu’à peine du véhicule, ils doivent désormais se garer en contrebas et marcher pour y accéder. Ils y restent donc plus longtemps, prennent le temps de faire le tour, de s’asseoir sur les rochers et de contempler. Ils découvrent le site de façon plus progressive et sont plus dans la découverte. »

Gouvernance partagée

Cette transformation a été opérée dans le cadre d’une gouvernance partagée entre l’État (le Conservatoire du littoral), la commune de Plévenon ainsi que le Syndicat mixte du Grand Site Cap d'Erquy Cap Fréhel (dont les adhérents statutaires incluent Dinan agglomération, la communauté de communes Lamballe Terre et Mer, et le département des Côtes-d’Armor). Mais la municipalité a changé, et son actuel maire, Hervé Van Praag, élu depuis 2020 et qui n’a donc pas participé à ces réflexions ni aux travaux, déplore a posteriori « que les habitants de Plévenon âgés ou à mobilité réduite ne puissent plus désormais accéder jusqu’au bout de la pointe en voiture ». De son côté, le Conservatoire du littoral précise, par la voix de Stéphane Riallin, chargé de mission : « Le Conservatoire du littoral n’agit que sur les sites classés NL au Plu. Donc exclusivement sur les sites naturels ». Rappelons que le législateur a créé le Conservatoire du littoral en 1975 pour soustraire à l’urbanisation une partie du rivage de la mer et des grands lacs, en acquérant des parcelles naturelles et en leur conférant un régime de domanialité publique. Et ceci dans un but de protection de la nature… et du paysage commun…