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Transports publics - Belfort rouvre le débat sur les limites du tout-tramway

"Halte au tout-tramway : économisons 50 milliards d'euros !" C'est sous cette bannière un brin provocatrice qu'un département, le Territoire de Belfort, a réuni le 15 mars à Paris une brochette d'élus et d'experts des transports.
Christian Proust, l'ancien président du conseil général de Belfort et actuellement président du syndicat mixte des transports en commun (SMTC 90-Optymo), a toutefois vite corrigé le tir : "Nous ne sommes pas hostiles au tramway. Il a permis d'opérer des rénovations urbaines indiscutablement positives. Mais il est temps de poser un nouveau regard sur ses impacts également négatifs, qui n'ont jusque là pas été assez réfléchis." Privilégier une approche service et des équipements légers comme le bus au lieu de rester accroché au modèle ambiant centré sur l'infrastructure et, bien souvent, sur le tram : à l'heure de la crise des finances publiques, le débat revient à plein pot.
Pour Patrick Pincet, directeur de cabinet de Roland Ries et intervenant à ce titre au nom du Groupement des autorités responsables de transport (Gart), "ce débat n'est pas nouveau et rien ne sert d'opposer entre eux les modes de transport. Chacun a sa pertinence, en fonction de la taille de l'agglomération et des besoins des habitants". Ainsi, dans certaines villes, il a permis de repenser l'aménagement urbain. "A Strasbourg par exemple, son arrivée a permis de consolider le développement du vélo grâce aux travaux entrepris sur la chaussée. De toute façon, comme deux trajets sur trois effectués en France se font sur moins de deux kilomètres, il faut avant tout développer la marche et le vélo avant de penser tramway, bus ou voiture partagée", a ajouté Patrick Pincet.

Le bus "modèle" de Belfort

A Belfort, l'idée a été de miser sur l'augmentation de la fréquence des bus (toutes les 10 minutes sur toutes les lignes), tout en reconfigurant en profondeur le réseau. Résultat, en quatre ans, la fréquentation a bondi de 80%. "Mais on partait de bas", reconnaît Christian Proust. La collectivité s'impose néanmoins comme un modèle. "Il inspire nombre d'agglomérations moyennes", confirme Bruno Gazeau, délégué général de l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP).
Pour le bâtir, Christian Proust dit s'être inspiré de la dynamique du secteur des télécommunications et d'une approche service pour optimiser le réseau bus sans forcer les investissements : 7 millions d'euros au départ et 40 prévus dès cette année jusqu'en 2016. Un montant auquel le syndicat mixte propose à l'Etat de s'associer pour 13 millions d'euros. En contrepartie, le syndicat s'engage à ne pas augmenter le versement transports et à rembourser l'Etat si l'objectif de 8 millions de voyages annuels supplémentaires n'est pas atteint.
"C'est assez osé mais Belfort sait innover et tenir ses paris", a soutenu Jean-Pierre Chevènement, sénateur du Territoire de Belfort. "Belfort, c'est une chose - personne n'aurait d'ailleurs idée d'y proposer un tramway - mais les autres collectivités sont confrontées à d'autres problèmes et l'approche service ne résout pas tout. L'enjeu est de mieux harmoniser les modes de déplacements entre eux. Et de progresser en matière d'intermodalité. Trop peu d'agglomérations intègrent par exemple dans leurs appels d'offres transports des points liés à la politique de stationnement ou au partage de la voirie. C'est un domaine où les entreprises ont pris un peu plus d'avance", a conclu Bruno Gazeau.