Baromètre du numérique : l'ère de l'addiction aux écrans

L'édition 2024 du Baromètre du numérique, porté par l'Arcep et l'Arcom avec l'appui du Crédoc, met des chiffres sur l'addiction au numérique. Une tendance inquiétante, notamment chez les jeunes, qui ne devrait pas s'arranger avec l'intelligence artificielle désormais utilisée par un tiers des Français. Si la fracture numérique s'est pratiquement résorbée en termes de réseaux, elle subsiste en termes d'usages, notamment par rapport aux démarches administratives en ligne.

Alors que le Baromètre du numérique fête cette année ses 25 ans, la présidente de l'Arcep, Laure de La Raudière, a souligné la concordance entre l'évolution des usages et celle des réseaux. De fait, la démocratisation des usages a d'abord coïncidé avec l'expansion du réseau mobile et l'accès internet fixe au début des années 2000, avant que l'ADSL ne permette l'essor du streaming et du commerce en ligne. L'arrivée de la 4G dans les années 2010 a catalysé l'adoption massive des smartphones et leurs applications, tandis que les réseaux très haut débit ont facilité l'hégémonie des plateformes. Et c'est aujourd'hui grâce à la fibre qu'explosent la consommation de données, le cloud et l'IA. Avec, in fine, un nouveau défi pour les régulateurs : celui de "l'addiction" qui pèse sur l'empreinte environnementale du numérique et soulève de nouveaux enjeux sociétaux.

Généralisation de l'accès

Du coté des bonnes nouvelles, le baromètre 2024 montre que la fracture des réseaux est en passe de se résorber. En effet, le taux d'abonnés internet en fibre optique dans les communes de moins de 20.000 habitants (88%) tend à rejoindre celui des plus grandes agglomérations (96%). Et si la moyenne n'est que de 75%, c'est le fait des villes moyennes… qui sont nombreuses à souffrir des retards pris par les opérateurs des zones privées. Par ailleurs, globalement, les pratiques s'homogénéisent avec 91% des Français équipés en smartphone et 89% d'un ordinateur. 94% des utilisateurs se connectent à internet, chiffre qui atteint 97% en région parisienne. 84% se connectent "tous les jours", ce taux atteignant 99% (!) pour les jeunes de 12 à 17 ans et 98% chez les actifs. 

Addiction au numérique

Ces taux stratosphériques se traduisent par un nouveau phénomène : l'addiction au numérique. Ainsi, 65% des Français ne peuvent se passer de leur smartphone plus d'une journée, et 37% seulement quelques heures. Un quart des Français passent plus de 5h par jour sur écran, taux qui monte à 39% chez les 18-24 ans. Globalement, 42% estiment passer "trop de temps" devant les écrans pour leur usage personnel, dont 19% "beaucoup trop". Les réseaux sociaux ont par ailleurs une forte responsabilité dans ce sentiment d'addiction : 59% des utilisateurs assidus aux réseaux sociaux considèrent leur temps d'écran "excessif".

L'IA inquiète

Le baromètre révèle ensuite la forte progression de l'usage de l'IA, passant de 20% en 2023 à 33% en 2024. Cette adoption est particulièrement marquée chez les jeunes, 77% des 18-24 ans déclarant avoir utilisé l'IA, suivis par 53% des 25-39 ans. Cependant, une majorité de Français (56%) se montre inquiète de cette technologie. On notera que les personnes l'ayant déjà utilisée sont nettement plus confiantes (74%) que celles qui ne l'ont jamais essayée (26%). Les préoccupations principales concernent l'impact de l'IA sur l'emploi, perçue comme une menace par 62% des répondants, contre seulement 35% qui la considèrent comme une opportunité. Le contraste est total avec la perception d'internet en 2008, alors vu comme une chance pour l'emploi par 84% des Français. 49% jugent par ailleurs que l'IA est une menace pour l'environnement, chiffre qui n'atteignait que 35% en 2008 avec "l'informatique".

Persistance d'une fracture sur les usages

Enfin, on notera que la fracture sur les usages persiste malgré tout.  Un Français sur cinq déclare être concerné par un manque de maîtrise des outils numériques, pourcentage encore plus élevé (51%) pour les non diplômés. Les démarches administratives en ligne restent aussi une difficulté pour près de la moitié des Français (44%), la peur de se tromper arrivant en tête des motifs avec le manque d'ergonomie des sites. Être à l'aise avec le numérique ne suffit pas : 69% des jeunes déclarant avoir au moins une difficulté dans la réalisation d'une démarche. Enfin, 42% des Français veulent être aidés. Les services publics (mairie, bibliothèque…) sont le lieu de formation idéal pour un tiers, 27% citant une association.

 

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