La croissance des usages pèse sur l'empreinte environnementale du numérique

L'Arcom et l'Arcep ont compilé leurs études sur les infrastructures et usages numériques. Le très haut débit dope les usages numériques, notamment la vidéo et les messageries instantanées. Un accroissement des pratiques qui pèse sur la facture environnementale du numérique, les bonnes nouvelles du côté des réseaux fixes étant à contrebalancer par l'impact de la 5G et des centres de données.

Si une grande partie des chiffres est déjà connue, le référentiel du numérique publié mi-juin 2024 par le pôle commun Arcom/Arcep a le mérite de proposer une vision à 360° du numérique en compilant toutes les études disponibles sur les infrastructures, usages et pratiques audiovisuelles publiées au cours des 18 derniers mois.

Le smartphone principal terminal d'accès

Premier constat, l'usage d'internet est très élevé en France mais tend à plafonner. En 2023, 91% des personnes âgées de 12 ans et plus utilisent internet, un taux qui reste stable depuis trois ans. Parmi ces utilisateurs, 80% se connectent quotidiennement. Le smartphone demeure l'équipement préféré des Français pour se connecter à internet, avec 76% des individus l'utilisant quotidiennement, en hausse d'un point par rapport à l'année précédente. Cette tendance est renforcée par la croissance continue du nombre d'abonnements à très haut débit, principalement grâce à la fibre optique, qui représente 66% des abonnements internet fin 2023. La 5G progresse également, avec 14 millions de cartes activées (+7%), mais reste très loin de la 4G avec ses 72 millions de cartes SIM.

La vidéo dope le trafic internet

Parallèlement, le trafic de données continue de croître. En 2022, le trafic entrant à l'interconnexion vers les principaux fournisseurs d’accès à Internet a augmenté de 21% pour atteindre 43,2 Tbit/s. Les cinq grands acteurs du numérique (Netflix, Google, Meta, Amazon et Akamai utilisé par diverses plateformes vidéo) représentent 54% de ce trafic, en augmentation de 3 points par rapport à l'année précédente. Cette concentration souligne l'influence majeure du trafic vidéo et de quelques plateformes sur le réseau internet mondial​​.

La croissance du trafic est également tirée par les réseaux sociaux et les messageries instantanées. Ces dernières ont fait un bon de +10 points en trois ans chez les plus de 40 ans. La moitié des Français s’informent par ailleurs quotidiennement sur les réseaux sociaux. En revanche, l'e-commerce, qui avait été dopé par le Covid, enregistre un recul de 4 points chez les internautes (73%).

Timide percée de l'IA

En matière l'intelligence artificielle, 38% des personnes interrogées déclarent savoir ce qu'est l'IA mais seulement 20% en ont déjà fait usage en 2023, le plus souvent dans un cadre privé. L'adoption de l'IA est particulièrement marquée chez les jeunes adultes : 43% des 18-24 ans ont déjà utilisé des outils tels que ChatGPT, Google Bard, Midjourney ou Dall-E. Cette adoption est en grande partie motivée par les applications pratiques et les bénéfices perçus dans divers domaines, notamment la création de contenu, l'automatisation des tâches et l'amélioration de l'efficacité personnelle et professionnelle​​.

Empreinte environnementale qui croît

La montée en puissance des usages numériques a cependant un coût environnemental significatif. Les émissions de gaz à effet de serre des opérateurs télécoms en 2022 ont atteint 382.000 tonnes équivalent CO2, soit une augmentation de 2% par rapport à l'année précédente. De même, la consommation d'énergie des réseaux fixes et mobiles a atteint 4,1 TWh (1) en 2022, augmentant de 7% en un an. Cette hausse est principalement due à la croissance du trafic de données mobiles et aux déploiements des réseaux 5G​​, la fibre voyant au contraire sa courbe fléchir. Par ailleurs, la consommation d'électricité des centres de données a progressé de +15 % en un an et celle d'eau de +20 %. Ces derniers ne représentent cependant que 0,02% de l’ensemble des volumes prélevés pour les activités économiques en 2021. Côté utilisateur, l'étude note que les box et décodeurs TV sont très énergivores. Leur consommation annuelle d’électricité représente 0,7% de la consommation d’électricité en France en 2022, soit trois fois celle des réseaux fixes.

Rationalisation de l'équipement

Du côté des évolutions positives, on note une baisse générale des volumes d'équipements mis sur le marché, toutes catégories confondues, avec -3% de mobiles, -22% d'ordinateurs portables et -13% de tablettes. La rationalisation de l'équipement – acheter moins, plus durable et si possible recyclé – semble commencer à porter ses fruits. L'étude montre cependant qu'un équipement sur 5, sur les 10 présents dans chaque foyer, est inutilisé et pourrait être recyclé. Par ailleurs, la taille des écrans (très coûteux d'un point de vue environnemental) tend à augmenter et seulement 13% des internautes jugent utile l'achat de smartphone recyclé.

(1) Le térawatt-heure est une unité d'énergie communément utilisée dans les scénarios de transition énergétique, par exemple par l'association négaWatt, GrDF et Greenpeace. Ils utilisent les TWh consommés en une année, indiqués sous la forme de TWh/an.