Archives

Avec sa feuille de route, Gérard Collomb se pose en ministre des collectivités

Le ministère de l'Intérieur vient de mettre en ligne la feuille de route que Gérard Collomb avait présentée le 5 septembre aux préfets. Intitulé "Protéger, garantir et servir", le document de 44 pages est "le fruit des contributions des différentes directions du ministère mais aussi d'un dialogue soutenu avec les acteurs de terrain", souligne le ministre. Il a été envoyé à l'ensemble des agents du ministère et sera adressé aux parlementaires et élus locaux. La déclinaison des priorités du ministère de l'Intérieur confirme la place prépondérante de ce dernier vis-à-vis des collectivités territoriales. Préparation d'un pacte avec les collectivités, baisse des dépenses de 13 milliards d'euros, réforme des structures territoriales… Plusieurs des chantiers annoncés par le Président de la République lors de la conférence nationale des territoires, le 17 juillet dernier, sont détaillés. Avec quelques annonces, comme l'engagement d'une concertation sur la mise en place de nouvelles incitations en faveur des communes nouvelles, ou le dépôt éventuel d'un projet de loi sur le temps de travail dans la fonction publique territoriale. D'autres thèmes centraux sont mis en avant, en particulier dans le domaine de l'organisation des élections et s'agissant du déploiement des services territoriaux de l'Etat. Synthèse de l'ensemble des projets du ministère qui concerneront les collectivités territoriales.

Dialogue Etat-collectivités. L'exécutif confirme qu'il n'engagera pas de grande réforme institutionnelle. La différenciation territoriale chère au président de la République sera mise en œuvre. Les projets de fusions de départements ou de fusions de communes "s'inscrivant dans des stratégies territoriales ambitieuses" seront encouragés. Alors que les avantages financiers en faveur des communes nouvelles doivent se terminer à la fin de cette année, le gouvernement souhaite discuter avec les associations de maires d'une nouvelle incitation qui serait mise en œuvre entre 2019 et 2022.
Est réaffirmé l'objectif de signature d'un "pacte de confiance" avec les élus locaux pour notamment "organiser les étapes de la baisse des dépenses des collectivités de 13 milliards en 5 ans" et "indiquer les choix faits en matière de péréquation".
Sur le rapprochement des métropoles et des départements dans le ressort où elles se situent, le ministère affiche beaucoup plus de prudence qu'Emmanuel Macron durant la campagne électorale : "Les situations seront examinées au cas par cas, avec tout le temps utile aux études préalables et à la concertation." Les dispositions législatives concernant "l'approfondissement du fait métropolitain" seraient mises en œuvre en 2022. En sachant qu'un "processus particulier de travail" serait mis en place pour le Grand Paris.

Fonction publique territoriale. Dans le cadre du pacte avec les élus locaux, l'Etat veut obtenir des engagements des collectivités territoriales sur le non remplacement d'agents territoriaux partant à la retraite. Selon les orientations retenues dans la feuille de route, un projet de loi sur le temps de travail pourrait "être déposé début 2018 au Parlement".

Elections. Une commission pluraliste sera installée pour proposer une évolution du mode de scrutin législatif et une reconfiguration des circonscriptions législatives. La réforme annoncée par le président de la République devant le Congrès, le 3 juillet, devrait se traduire par une baisse du nombre de députés de 577 à 400, un redécoupage des circonscriptions législatives au printemps 2020 et l'introduction d'"une dose de proportionnelle" à l'Assemblée nationale.
D'autres réformes concernant les élections sont annoncées. L'objectif est à la fois de simplifier et de renforcer la sécurité de leur organisation, notamment en ayant recours au numérique. Ainsi, la procédure destinée à établir une procuration sera rendue plus facile d'utilisation et sera dématérialisée. La propagande électorale doit, elle aussi, être dématérialisée. Le rejet à maintes reprises de cette proposition par la précédente majorité à l'Assemblée nationale n'a pas découragé le ministre de l'Intérieur. La réforme figurait dans l'avant-projet de loi sur le droit à l'erreur que le conseil des ministres devait examiner fin juillet, mais qui a été reporté "à la rentrée". Le ministère annonce vouloir réunir "des propositions sur la mise en œuvre du vote électronique en 2019."

Identité numérique. Le ministère de l'Intérieur va développer des solutions permettant aux citoyens de justifier de leur identité selon un format numérique. Simples d'usage, accessibles à tous et ultra-sécurisées, ces solutions "s'intégreront dans le projet plus vaste de création d'un compte citoyen en ligne." Les prototypes d'identité numérique seront livrés à l'été 2018. Le nouveau service sera délivré à la rentrée 2019 sur demande des administrés, ou à l'occasion du renouvellement d'un titre.

Etat territorial. Pour répondre aux besoins de proximité, en particulier dans les grandes régions, les services départementaux de l'Etat vont être maintenus, mais leur organisation va être réexaminée. Le ministre de l'Intérieur conduira jusqu'au printemps 2018 une concertation sur ce volet des réformes, pour une mise en œuvre au 1er janvier 2019. Quelques grandes orientations sont déjà définies : regrouper les compétences, renforcer la déconcentration, mutualiser les moyens chaque fois que nécessaire. Le rôle du préfet sera réaffirmé. Comme le prévoyait l'avant-projet de loi sur le droit à l'erreur, ce dernier sera autorisé à déroger à la norme réglementaire pour tenir compte de circonstances locales. Une expérimentation de ce dispositif sera mise en place en 2018 dans deux régions de métropole et une collectivité d'outre-mer.
L'Etat veut aussi s'inspirer de l'expérience des délégués du préfet dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour mettre en place des délégués dans les territoires ruraux. D'anciens fonctionnaires de l'Etat faisant partie de la réserve citoyenne pourraient être désignés à la fin du premier semestre 2018 auprès de communautés de communes de cinq départements. Si le bilan de cette expérimentation est positif, une généralisation aurait lieu en septembre 2019.
Autre annonce : le ministère de l'Intérieur va d'ici la fin de l'année définir un "programme de travail quinquennal" en vue de la mise en place d'une "offre complète de services publics dématérialisés".

Sécurité. Une large concertation sera engagée "dès septembre 2017" sur la police de sécurité du quotidien, ce qui permettra d'élaborer "une doctrine d'ici l'automne". Suivra une expérimentation qui aura lieu "début 2018 dans une série de territoires". Au programme figure aussi "une réflexion sur le continuum de missions et responsabilités en matière de sécurité entre les différents acteurs que sont les forces de sécurité intérieure, les polices municipales et la sécurité privée". Une personnalité "d'envergure nationale" sera missionnée à l'automne 2017 pour formuler des propositions au premier semestre 2018 (pour en savoir plus sur ce volet de la feuille de route, lire notre article du 6 septembre 2017 : La police du quotidien s'accompagnera bien d'une réflexion sur la police municipale).

Cultes. Une "instance informelle de dialogue et de concorde" entre les autorités des principaux cultes sera installée en décembre prochain. Les travaux visant à accompagner la structuration d'un Islam de France se poursuivront "au second semestre 2017".