Culture - Archives numérisées payantes : la décision appartient aux collectivités
Dans une question écrite, Philippe Folliot, député du Tarn, s'étonne que certains départements mettent en place un système de péage pour accéder aux archives en ligne des registres paroissiaux et d'état civil. Il se dit d'autant plus surpris que la numérisation des registres "est encouragée par le ministère de la Culture, qui débloque des dotations aux conseils généraux qui en font la demande après examen de leur projet". Parmi les départements ayant instauré un péage, le député du Tarn cite l'exemple de la Meurthe-et-Moselle et celui, très récent, du Calvados. Il rappelle que le département de l'Hérault avait également opté pour un accès payant, avant de revenir sur sa décision. Dans le cas du Calvados, par exemple, le nouveau site entièrement consacré aux archives numérisées propose un accès gratuit aux délibérations municipales et aux cartes et plans, ainsi qu'aux cartes postales et aux photographies. En revanche, l'accès est payant pour les registres paroissiaux et d'état civil et pour le cadastre napoléonien. Selon Philippe Folliot, le coût est de deux euros par jour, avec un plafond de 200 euros par an. Pour le député, ce péage "n'est pas vraiment symbolique", en particulier pour les très nombreux généalogistes amateurs. Il souhaite donc savoir "pourquoi certains conseils généraux imposent ce péage et d'autres non, et si ce péage est autorisé par le ministère".
Dans sa réponse, le ministre de la Culture et de la Communication estime - sans toutefois donner d'indication chiffrée - que les départements ayant choisi de rendre payantes leurs archives numérisées sont "en nombre extrêmement limité". Il ne précise pas non plus si les départements cités par le député du Tarn ont ou non bénéficié d'une subvention ministérielle pour la numérisation de leurs registres. Hors ce cas de figure, la marge de manoeuvre de l'Etat apparaît très limitée. La réponse ministérielle rappelle en effet qu'aux termes de l'article 72 de la Constitution (dans la rédaction issue de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003), les collectivités territoriales "s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences". Tout en confirmant qu'il encourage la mise en ligne par les départements des sources de l'état civil français, le ministère de la Culture ne dispose pas de véritables moyens de pression. Certes, rien n'interdit de lier l'octroi d'une subvention à certaines modalités d'utilisation mais, en l'espèce, la condition mise à l'octroi de la subvention porte uniquement sur l'engagement de mettre en ligne, dans le délai d'un an, les documents numérisés. Elle ne précise pas le caractère gratuit ou payant de l'accès à ces ressources. Pour couper court à une demande des sociétés de généalogie, le ministère se fait d'ailleurs modeste en rappelant que, malgré la subvention de l'Etat, "le financement demeure cependant assuré en grande partie par les collectivités elles-mêmes, souvent en totalité d'ailleurs". Conclusion sans appel : "Dans le respect de la Constitution, le gouvernement ne peut imposer une mise en ligne gratuite de leur patrimoine archivistique aux collectivités qui en disposent autrement. C'est aux seuls élus de ces collectivités que revient cette décision."
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : Assemblée nationale, question écrite numéro 70751 de Philippe Folliot, député du Tarn, et réponse du ministre de la Culture et de la Communication (JOAN du 16 mars 2010).