Handicap : les demandes déposées auprès des MDPH ont amorcé une légère décrue en 2018
La CNSA vient de publier des chiffres sur les volumes et délais de traitement des demandes déposées en 2018. Après des années de hausse forte et continue, les demandes déposées reculent légèrement de 0,58% en 2018. Le mouvement pourrait se poursuivre grâce aux mesures de simplification – comme les attributions à vie – qui se multiplient depuis la fin de 2018.
Dans la dernière livraison de sa lettre "Repères statistiques", la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) présente les chiffres du volume et des délais de traitement des demandes déposées en 2018 auprès des MDPH (maisons départementales des personnes handicapées). Alors que celles-ci sont confrontées à une croissance forte et ininterrompue des demandes depuis la loi Handicap du 11 février 2005, l'année 2018 marque au contraire pour la première fois un – léger – renversement de la tendance.
Un recul moyen de 0,5% en 2018, mais avec de forts écarts
En 2018, le nombre de demandes déposées auprès des MDPH a en effet reculé de 0,53%, pour atteindre un total de 4,480 millions, contre 4,504 millions en 2017. La CNSA précise toutefois que "cette baisse est à considérer avec précaution, compte tenu de l'adoption progressive du nouveau formulaire de demande et des changements dans la façon de comptabiliser les demandes qu'il induit". Si on exclut les MDPH qui utilisent déjà ce nouveau formulaire (distinguant les demandes génériques et les demandes de parcours de scolarisation), la diminution est légèrement moins prononcée : -0,25% contre -0,53%. De même, si on exclut les départements dans lesquels les demandes d'avis de carte mobilité inclusion (CMI) ne sont pas toutes instruites par les MDPH mais par le conseil départemental (dans le cas des demandes d'APA) – soit un échantillon de 54 MDPH –, le nombre de demandes augmente alors de 0,60%.
En outre, la baisse moyenne de 0,53% constatée en 2018 recouvre des écarts territoriaux importants. Ainsi, 58 MDPH ont vu au contraire leur nombre de demandes augmenter : de moins de 5% dans 33 MDPH, entre 5 et 10% dans 13 autres et de plus de 10% dans 12 MDPH. À l'inverse, 45 MDPH ont connu un recul des demandes en 2018 : 20 d'entre elles pour moins de 5%, 14 entre -5% et -10%, tandis que 11 MDPH connaissaient un recul d'activité supérieur à 10%. La moyenne générale étant néanmoins orientée à la baisse, ce sont donc les départements présentant des volumes d'activité importants qui ont, a priori, davantage connu une tendance au recul des demandes.
À noter : si le nombre de demandes déposées a légèrement reculé, celui des demandeurs est resté stable. Ainsi, 1.729.800 personnes ont déposé au moins une demande auprès d'une MDPH en 2018, contre 1.729.400 en 2017 (une même personne pouvant présenter plusieurs demandes simultanément ou successivement).
Des délais de traitement globalement inchangés
Si le nombre de demandes recule ainsi légèrement, les délais de traitement de ces dernières demeurent en revanche inchangés, la CNSA parlant de "délais contenus". Le délai moyen de traitement est calculé entre le moment où la demande est considérée comme recevable et celui ou est rendu l'avis ou la décision (ce qui explique que les demandeurs peuvent avoir le sentiment de délais sensiblement plus long qu'affichés). Ce délai moyen est de 4 mois, ce qui correspond au délai légal de traitement.
Mais ce chiffre recouvre des écarts importants entre départements et entre prestations ou orientations. Pour les adultes, le délai moyen de traitement va ainsi, en moyenne nationale, de 3,3 mois pour la carte mobilité inclusion (CMI) mention "stationnement" 60 ans et plus à 5,5 mois par la prestation de compensation du handicap (PCH) de 20 à 59 ans. Le délai moyen est par ailleurs de 4,1 mois pour l'AAH et pour une orientation en établissement ou en service. Chez les enfants, le délai moyen de traitement va de 3,3 mois pour une orientation scolaire à 5,2 mois pour la PCH des moins de vingt ans. C'est ainsi clairement l'instruction de cette prestation – il est vrai complexe, compte tenu du plan d'aide – qui tire la moyenne vers le haut.
Les bienfaits de la simplification
Si la baisse des demandes déposées auprès constitue une première, la tendance au ralentissement se faisait déjà sentir depuis quelques temps. Après des croissances annuelles de l'ordre de 4% à 7% ces dernières années, la progression était ainsi revenue à 1,9% en 2017 (voir notre article ci-dessous du 14 décembre 2018).
Ce – très relatif – ralentissement a plusieurs causes. C'est le cas notamment de l'arrivée à maturité de certaines prestations, comme la PCH. Mais cette évolution est largement compensée par la poursuite, voire la relance, de la progression de certaines prestations comme l'AAH (du fait du relèvement des plafonds) ou par la progression continue de l'inclusion scolaire.
La véritable raison est plutôt à rechercher du côté de la simplification de certaines démarches. Le ralentissement observé en 2017 et le léger recul en 2018 tiennent ainsi, pour partie, au décret du 3 avril 2015 portant de deux à cinq ans la durée maximale d'attribution de l'AAH pour les personnes présentant un taux d'invalidité inférieur à 80% (voir notre article ci-dessous du 8 avril 2016). Le mouvement de simplification s'est encore amplifié depuis lors. C'est tout particulièrement le cas depuis le comité interministériel du handicap (CIH) d'octobre 2018, qui regroupait un ensemble de mesures destinées à renforcer les droits des personnes handicapées et à simplifier leur vie quotidienne (voir notre article ci-dessous du 25 octobre 2018). Celui-ci a débouché notamment sur des réformes comme l'attribution à vie de l'AAH, de la CMI ou de la RQTH (lorsque le handicap n'est pas susceptible d'évolution favorable) ou encore, tout récemment, le passage de 5 à 10 ans de l'attribution de l'AAH pour une durée limitée (avant révision) aux personnes présentant un taux d'incapacité égal ou supérieur à 80% (voir notre article ci-dessous du 6 janvier 2020).
C'est mesures, intervenues pour la plupart à partir de 2019, devraient donc contribuer à la poursuite, dans les prochaines années, du mouvement de stabilisation, voire de diminution, des demandes déposées auprès des MDPH.