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Montagne - A 70 ans, les stations de montagne veulent conserver leur office de tourisme

L'Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM) fêtera ses 70 ans les 18 et 19 mai à Nice. Pour son président, le député-maire de Péone-Valberg, Charles-Ange Ginésy, c'est l'occasion d'ouvrir le réseau aux stations de taille plus modeste. Les élus de stations restent également très mobilisés sur le maintien de leurs offices de tourisme et sur la préparation de l'acte 2 de la loi Montagne...

Localtis : Pour ses 70 ans, l'ANMSM lance le "GR 46-16". Pouvez-vous nous en dire un mot ?

Charles-Ange Ginésy : Il s'agit de renforcer l'idée d'association itinérante en nous déplaçant de station en station, à travers les différents massifs, des Alpes du Nord, des Alpes du Sud, du Massif central, du Jura, des Vosges, des Pyrénées. Autant de massifs où l'on pratique le ski et les sports d'hiver mais notre but est d'être des stations de montagne à part entière et à temps plein, hiver, été et aussi au printemps et à l'automne. Il faut préparer ces évolutions.

Quelles sont les ambitions de l'association pour cette date anniversaire ?

Nous souhaitons développer deux axes majeurs. D'abord agir sur les cotisations de nos adhérents. On a décidé de réduire de 20% les cotisations d'entrée de jeu, c'est une façon de répondre aux difficultés des collectivités. Nous avons aussi la volonté marquée d'ouvrir nos portes aux stations de taille plus modeste et de ne pas rester cantonnés aux 105 stations nationales. Ces dernières sont autant de grandes marques territoriales et grâce à elles la France est reconnue comme la première destination de ski au monde. Mais en réformant nos statuts et en aménagement nos cotisations, nous voulons faire un effort de solidarité entre les grands et les petits.

Qu'est-ce que ces petites stations pourront trouver chez vous ?

Notre ambition est de mener une communication avec France montagne, en partenariat avec Domaine skiable de France et l'Ecole du ski français. France montagne, c'est un plan d'engagement de 4 millions d'euros, dont un million d'euros de l'ANMSM. Nos cotisations sont dégressives et vont, selon la taille des communes, de 4.500 euros à 90.000 euros pour les très gros navires de la neige. Pour la montagne, c'est un investissement très profitable. Les petites stations peuvent ainsi profiter de cet élan.
Notre ambition ne s'arrête pas là. 50% de notre budget est consacré à l'assistance et à l'aide juridique à nos adhérents. Derrière cela, il y a aussi tout le lobbying que l'on mène auprès des ministères. Un travail important aujourd'hui avec la mise en œuvre de la loi Notr ou la préparation de la loi Montagne.

Le grand thème de vos 70 ans sera "L'Ascension numérique : vers de nouveaux sommets ?". Quand on pense aux stations, on pense pourtant plutôt à la neige…

Même si le numérique peut apparaître comme un cheveu sur la soupe dans l'univers de la montagne, par rapport à la nature, il est fondamental pour l'avenir. Il faut qu'on soit au cœur de l'action des schémas directeurs d'aménagement numérique (Sdan). La clientèle vit aujourd'hui dans une société numérique et entend rester connectée. Dans le cadre du passage du GR 46-16 à Montgenèvre, le 11 mars, le président de la région Paca Christian Estrosi a affiché son intention de développer le big data dans les "smart stations". Le but est que toutes les données numériques soient analysées, agglomérées et exploitées afin d'accompagner la clientèle dans ses attentes, d'orienter les décisions que le maire doit prendre pour développer ses projets. Nous assistons aujourd'hui à une vraie révolution mondiale. Une expérience est actuellement menée avec Orange dans ce domaine. Ce dispositif baptisé Flux Vision Montagne est suivi par 6 stations, dont Valberg dont je suis le maire. J'en suis particulièrement satisfait. L'analyse des données, à partir des numéros de téléphone, permet de mieux connaître la fréquentation de la station, l'origine de la clientèle… On a par exemple pu voir que les clients arrivent davantage le vendredi que le samedi, que le week-end du samedi-dimanche a été remplacé par celui du vendredi-samedi. Ce sont des variables d'ajustement pour nos politiques.

Vous avez évoqué la loi Notr. Votre association a été en première ligne pour défendre les offices de tourisme communaux. Où en est-on ?

Il y a toujours de fortes inquiétudes sur certains aspects de la loi. La première, partagée par d'autres associations d'élus, a en effet trait au transfert obligatoire de la compétence tourisme aux intercommunalités. Cela fait des mois que l'on ferraille sur le sujet. Le 20 janvier, devant le Conseil national de la montagne, André Vallini (alors secrétaire d'Etat chargé de la Réforme territoriale, ndlr) a évoqué la possibilité de modifier cet aspect de la loi. Cela va être fait, on attend le bon véhicule. Cela pourrait être la réforme de la loi Montagne que Jean-Michel Baylet vient d'annoncer pour l'automne. Cela aurait pu être le projet de loi El Khomri qui vient de se terminer tragiquement avec le 49-3. On pourrait aussi déposer une proposition de loi ce printemps. Nous devons en discuter avec le ministre (de l'Aménagement du territoire, de la Ruralité et des Collectivités territoriales) le 25 mai.
Le calendrier presse. Le classement en stations de tourisme va tomber. Pour les offices de tourisme de stations c'est la quadrature du cercle. Dès lors que la compétence va être transférée, cela aura des retombées directes sur les dotations de l'Etat. Il faut qu'on soit là en position de lobby : l'Anem, DSF, l'Anett (Association nationale des élus des territoires touristiques, ndlr), mais aussi les stations balnéaires pour lesquelles le problème se pose de la même façon. C'est-à-dire toutes les stations de maires entrepreneurs qui vivent de cette économie du tourisme.

Parmi les 105 stations nationales, combien souhaitent conserver leur office ?

Nous sommes quasiment tous concernés par cette demande de dérogation. Seuls 10% de nos adhérents ont confié cette gestion à l'intercommunalité. Ce qui montre que la loi n'était pas à côté du sujet, mais là où elle est stupide c'est qu'elle a rendu ce caractère obligatoire. Sur les 105 stations nationales, 20% vont dans le mur si on maintient cette obligation. Ce sont les plus grosses qui, si elles perdent leur office, vont se retrouver avec une difficulté majeure sur la promotion touristique. Il y aurait un non-sens.

La réforme de la loi Montagne de 1985 est un des grands chantiers des mois à venir. Avez-vous eu accès aux premières ébauches du texte ?

Le ministère a mouliné quelques écritures qui font l'objet d'aller-retour. Il était nécessaire de moderniser cette loi, notamment au regard du développement durable dont on ne parlait pas il y a trente ans, mais aussi des enneigeurs, des retenues collinaires, ou encore du numérique… Prenons l'exemple des pass mains libres, aujourd'hui, plus aucune grande station n'utilise de forfait en papier. L'économie du numérique rentre de plein fouet dans nos stations avec les ventes par internet, les locations, les plateformes de réservations comme Airbnb… Il faudra prendre en compte ces évolutions. Il faudra aussi dépoussiérer les règles de construction et d'urbanisme. On attend enfin des évolutions législatives par rapport à l'organisation de la pratique du VTT.