337 maires d'Île-de-France opposés à la réouverture des écoles le 11 mai
Des centaines de maires d'Île-de-France demandent que les écoles ne rouvrent pas le 11 mai 2020, comme l'a annoncé le gouvernement. Ils estiment qu'ils n'auront pas le temps de bien préparer le retour des élèves mais aussi qu'un certain nombre de décisions devraient être de la responsabilité de l'État et non de la leur.
337 maires d'Île-de-France (sur 1.268) demandent "solennellement" au président de la République de repousser "à une date ultérieure au 11 mai" la réouverture des écoles. Dans une lettre ouverte publiée par le site latribune.fr le 3 mai, les édiles franciliens entendent "tirer la sonnette d'alarme" devant ce qu'ils estiment être un calendrier "intenable et irréaliste" pour la plupart des communes de la région.
Alors que le ministère de l'Éducation nationale a publié le 1er mai son protocole sanitaire pour la réouverture des écoles (lire encadré ci-dessous et notre article du 30 avril), les maires signataires jugent que "les conditions sanitaires à mettre en œuvre sont sérieuses" et que "cela ne s'improvise pas". Si les élus se sont "mis au travail pour organiser la réouverture des écoles à compter du 11 mai", les conditions dans lesquelles le gouvernement compte mettre en œuvre ce retour des élèves dans les établissements ne leur convient pas : "Nous apprenons, dix jours avant la date de réouverture des écoles, qu'il appartiendrait aux maires de décider de la réouverture des écoles, et aux parents de décider du retour vers le chemin des classes de leurs enfants. Que le calendrier de la reprise progressive des niveaux de classes, initialement annoncé, n'est plus valable, s'agissant des GS, CP et CM2. Et que nous ne saurons que le 7 mai, à la veille d'un week-end de trois jours précédant la rentrée annoncée, si nos départements sont officiellement classés en zone rouge." Et les maires d'énumérer les inconnues de l'équation :
• nombre d'enseignant disponibles
• nombre d'animateurs disponibles pour les activités périscolaires
• et, le plus important sans doute, effectifs des élèves à accueillir.
"Compétences régaliennes"
Les maires ne comprennent pas, par exemple, comment il leur sera possible de choisir entre les enfants que les parents souhaitent remettre à l'école, ceux dont les parents doivent reprendre une activité professionnelle et ceux qui se trouvent en situation de décrochage scolaire dans la mesure où tous ne pourront être accueillis en même temps.
Parmi les autres problèmes concrets que le courrier au président de la République fait ressortir : l'approvisionnement en masques, alors qu'il faut quatre à cinq semaines pour commander des masques, et les repas à la cantine, alors qu'il faut une semaine pour en organiser l'apport. Pour les maires, "l'État se désengage de ses responsabilités en la matière, alors même que l'éducation d'une part, et la santé d'autre part, sont des compétences régaliennes".
"Des moyens financiers"
Face à ce "calendrier à marche forcée", les signataires demandent "solennellement de repousser la date de réouverture des écoles s'agissant des départements classés rouges et en particulier de l'Île-de-France à une date ultérieure au 11 mai".
En outre, ils souhaitent "ne pas faire reposer sur les maires la responsabilité juridique, politique et morale de la réouverture des écoles" et demandent que le gouvernement priorise "clairement les enfants qui pourront/devront reprendre le chemin de l'école en Île-de-France en tenant compte du contexte familial de chaque enfant et en suivant un impératif de justice et d'équité".
Enfin, les maires signataires réclament "des moyens financiers suffisants" pour un accueil périscolaire dans le strict respect du protocole sanitaire et la fourniture d'un équipement pour tout le personnel d'une école par l'Éducation nationale (lire également notre encadré ci-dessous).
Le décrochage, "une bombe à retardement"
Ce week-end, d'autres élus territoriaux se sont exprimés pour faire savoir leurs réticences face à la réouverture des écoles. Hervé Morin, président du conseil régional de Normandie, a affirmé qu'il ne rouvrirait pas les lycées de son territoire, sauf pour des faire passer des examens ou réunir des jurys. De son côté, Frédéric Bierry, président du conseil départemental du Bas-Rhin, a invité les parents d'élèves du département à ne pas scolariser leurs enfants avant le 25 mai.
Face à cette fronde, Édouard Philippe a réagi, lundi 4 mai au Sénat, en affirmant que la fermeture des écoles était "une catastrophe pour les plus vulnérables des enfants et des adolescents" et le décrochage scolaire "probablement une bombe à retardement". Le Premier ministre a conclu : "La réouverture des écoles nous semble donc une priorité, sociale et républicaine, qu'il faut évidemment concilier avec nos impératifs sanitaires."
Le protocole sanitaire définitif
Après qu'une version "projet" du protocole sanitaire a été dévoilé le 29 avril, le ministère de l'Éducation nationale a mis en ligne les versions définitives de deux guides : l'un consacré aux écoles maternelles et élémentaires (dont la réouverture progressive commencera le 11 mai), l'autre dédié aux collèges (dont la réouverture s'effectuera à partir du 18 mai pour les 6es et 5es dans les départements classés en vert) et aux lycées (dont la décision de réouverture sera prise fin mai).
Parmi les petits ajustements de la version définitive, notons que le nombre d'élèves pouvant être accueillis dans une salle de 50 m2, "en plaçant des élèves le long des murs", est désormais de 16, contre 15 auparavant.
En ce qui concerne les masques, la nouvelle version précise explicitement qu'"il appartient à chaque employeur, et notamment aux collectivités territoriales, de fournir en masques ses personnels en contact direct avec les élèves ainsi que les personnels d’entretien et de restauration".
Pour le port du masque par les élèves, les guides définitifs apportent les précisions suivantes : s'il reste proscrit en maternelle et possible en primaire, le port du masque n'est obligatoire en collèges et lycées que dans les situations où le respect des règles de distanciation risque de ne pas être respecté. Autrement dit, il est facultatif dans les salles de classe.
Concernant la désinfection, la mention de locaux "réquisitionnés ou mis à disposition pour héberger des personnes malades ou sans domicile fixe" disparaît. Il convient, pour ceux-là, de se conformer aux prescriptions relatives, soit aux lieux qui n’ont pas été fréquentés dans les cinq derniers jours, soit aux lieux "fréquentés dans les cinq derniers jours".
Enfin, le guide destiné aux collèges et lycées comprend un chapitre consacré aux internats.