Un retour progressif et partiel des élèves à l'école à partir du 11 mai

Le président de la République a annoncé la réouverture des établissements scolaires à partir du 11 mai. Son ministre de l'Éducation a, lui, précisé les grandes lignes des aménagements indispensables à cet effet. Les syndicats d'enseignants sont, de leur côté, sceptiques sur la possibilité d'un retour à l'école sans risque sanitaire.

Près d'un mois après la fermeture des établissements scolaires pour cause d'épidémie de Covid-19, le président de la République a, dans son allocution télévisée du 13 avril, annoncé que crèches, écoles, collèges et lycées allaient rouvrir "progressivement" à partir du 11 mai, sous réserve d'un certain nombre de conditions, et notamment que la propagation du virus ait effectivement continué à ralentir. En revanche, il n'y aura aucune reprise des cours pour les étudiants de l'enseignement supérieur jusqu'à l'été.

Ce retour des élèves à l'école est, pour Emmanuel Macron, "une priorité". En effet, alors que la continuité pédagogique est à l'œuvre depuis le 16 mars, le président estime que "la situation actuelle creuse des inégalités". Pour lui, "trop d’enfants, notamment dans les quartiers populaires et dans nos campagnes, sont privés d’école sans avoir accès au numérique et ne peuvent être aidés de la même manière par les parents. Dans cette période, les inégalités de logement, les inégalités entre familles sont encore plus marquées. C’est pourquoi nos enfants doivent pouvoir retrouver le chemin des classes". Ce constat vient en écho à celui dressé, notamment, par des associations d'élus locaux et d'agents territoriaux du secteur de l'éducation (lire notre article du 8 avril).

Toujours à propos du retour des élèves dans les établissements scolaires, Emmanuel Macron a assuré que le gouvernement "aura à aménager des règles particulières : organiser différemment le temps et l'espace, bien protéger nos enseignants et nos enfants, avec le matériel nécessaire".

Priorité aux élèves en difficulté

Quelles pourront être ces "règles particulières" ? Intervenant sur France 2 le 14 avril, Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation, a précisé les grandes lignes de la future organisation des classes du 11 mai au 4 juillet, date maintenue de fin des cours dans tous les établissements scolaires de France.

La progressivité annoncée se fera d'abord dans le temps. "Il est évident que tout ne va pas se passer du jour au lendemain", a affirmé Jean-Michel Blanquer. L'objectif poursuivi par la reprise des cours sera "de réussir une resocialisation" car "des élèves peuvent partir à la dérive à cause du confinement", a-t-il poursuivi. Ce sont donc les élèves les plus en difficulté qui devraient retourner en premier sur les bancs des établissements scolaires. "Il y a le sujet du coronavirus, et il y a le sujet des inégalités sociales qui vont en s'accroissant semaine après semaine car chaque enfant est renvoyé à son contexte familial, ce qui creuse terriblement les inégalités", a justifié le ministre.

Pratiquement, il faut imaginer une reprise avec des petits groupes d'élèves, y compris chez les plus petits. "Il est hors de question d'avoir des classes bondées dans la situation actuelle", a martelé Jean-Michel Blanquer. Une piste est alors évoquée : l'allègement de la charge horaire des élèves les plus grands, au lycée voire au collège, en continuant un travail à distance en dehors des heures de cours. Interrogé sur une régionalisation de la reprise des cours, le ministre de l'Éducation n'a en revanche apporté aucun commentaire.

Avec ou sans masques ?

Reste l'aspect sanitaire. Jean-Michel Blanquer a affirmé qu'il était "fort possible" que des masques soient mis à disposition de tous les élèves et de tous les enseignants, mais que cela serait défini "en lien avec les autorités sanitaires". Et le ministre d'ajouter : "Nous nous donnerons les moyens en termes sanitaires avec les collectivités locales par exemple pour tout ce qui est gel hydroalcoolique, savon, etc." Toujours en termes sanitaires, la rentrée sera progressive selon l'âge, les plus jeunes devant faire l'objet d'une attention particulière en raison de leurs difficultés à suivre les consignes de distanciation interpersonnelle. Une autre étape décisive consistera enfin à nettoyer les locaux avant le retour des élèves dans les établissements. "Là, nous avons un sujet avec les collectivités locales. Nous allons préparer ça ensemble, de façon consensuelle", a commenté Jean-Michel Blanquer.

L'ensemble de ces pistes seront discutées dans les deux semaines à venir. Cette concertation débutera dès ce 14 avril par des entretiens avec les organisations syndicales de l'Éducation nationale, puis avec les représentants des parents d'élèves, des lycéens et, bien entendu, des collectivités.

Qu'il s'agisse de l'annonce d'Emmanuel Macron ou des précisions de son ministre de l'Éducation, la reprise des cours pour le 11 mai a déjà beaucoup fait réagir. Dans un communiqué du 13 avril au soir, le SE-Unsa juge que "la perspective du 11 mai apparaît très rapide au regard de la situation sanitaire actuelle" et estime qu'"avant toute chose, il faudra que toutes les conditions de sécurité soient réunies". La crainte d'une reprise des cours alors que la situation sanitaire reste encore incertaine est partagée par Francette Popineau. Interrogée par RTL le 14 avril, la secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, a déclaré que "l'idée de reprendre la classe, les enseignants y sont très favorables", avant d'ajouter : "Pour les maternelles, honnêtement, nous ne voyons pas comment un retour est possible. Il faudrait des groupes extrêmement petits pour qu'on puisse les tenir à distance, c'est quand même très compliqué d'expliquer à un enfant en bas âge qu'il ne peut pas jouer à proximité de son copain. Comment peut-on penser que les restaurants seraient fermés après le 11 mai mais que les cantines seraient ouvertes ? Aujourd'hui, cela nous semble imprudent d'avancer une date."

Quant au Snes-FSU, majoritaire dans le secondaire, il fustige le manque de clarté des annonces d'Emmanuel Macron : "Aucune information précise, aucune garantie n’ont été apportées en matière de sécurité et de santé", écrit le syndicat qui réaffirme les "préalables indispensables" sans lesquels, selon lui, "la réouverture des établissements ne pourra pas être envisagée" : désinfection des établissements, tests de tous les élèves et adultes, matériels de protection, et diminution des effectifs.