Violences contre les élus : Éric Dupond-Moretti défend l'action du ministère de la Justice
Devant la commission des lois du Sénat qui l'auditionnait ce 23 mars, le garde des Sceaux a mis en avant les mesures mises en place depuis son arrivée place Vendôme pour lutter contre les violences envers les élus. 95% des atteintes visant ceux-ci font l'objet de poursuites, a-t-il indiqué.
Démission du maire de Saint-Brevin oblige, les atteintes aux élus se sont invitées, ce 23 mai, dans les travaux de la commission des lois du Sénat. Auditionné sur le projet de loi d'orientation du ministère de la Justice, le garde des Sceaux a énuméré les mesures prises depuis son arrivée à la tête de ce ministère pour mieux protéger les élus victimes d'agression.
Éric Dupond-Moretti a notamment cité la loi du 24 août 2021, qui instaure un délit de "révélation d'informations relatives à la vie privée ou professionnelle d'un élu", ou encore celle du 24 janvier 2023, qui permet à toutes les associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir un élu victime d'agression et sa famille.
"Une réponse pénale rapide, systématique"
Le ministre de la Justice est également revenu sur trois instructions pénales qu'il a transmises aux procureurs. Les circulaires du 7 septembre et du 15 décembre 2020 ont "réaffirmé l'importance qui s'attache à la mise en oeuvre d'une politique pénale empreinte de volontarisme, de fermeté, de célérité et d'un suivi judiciaire renforcé des procédures pénales concernant les élus", a-t-il souligné. "J'ai demandé ainsi au parquet une réponse pénale rapide, systématique, en privilégiant les défèrements [NDLR : à l'issue de la garde à vue, présentation devant le procureur de la République ou le juge d'instruction]", a détaillé le ministre. "Pour les faits les plus graves, j'ai demandé que l'on privilégie la comparution immédiate", a-t-il ajouté. En outre, un magistrat de chaque parquet a été désigné pour être "l'interlocuteur privilégié" des élus.
La circulaire de politique pénale générale du 20 septembre 2022 a confirmé cette mesure, allant plus loin. "J'ai demandé avec force au parquet de poursuivre le renforcement des échanges avec les élus, en premier lieu avec les maires et les présidents de conseils départementaux, a rappelé Éric Dupond-Moretti.
Taux de poursuite de 95%
Le ministre a également voulu montrer que les agissements contre les élus locaux ne restaient pas sans réponse pénale. "D'après les remontées d'informations depuis 2018", le taux de poursuite est de 95% en cas d'atteintes aux élus", a-t-il indiqué. "Lorsque l'infraction est caractérisée et qu'un auteur a été identifié, 100% des mis en cause poursuivables font l'objet d'une réponse pénale, notamment 92% sous la forme d'une poursuite devant le tribunal correctionnel", s'est-il félicité en précisant que "c'est 10 points de plus que pour les autres victimes". Dans 84% des condamnations contre les auteurs qui ont visé un maire, une peine de prison a été prononcée, selon lui.
Mais selon les maires agressés ou ayant reçu des menaces, les délais d'instruction sont "trop longs" et les réponses pénales "pas toujours adaptées" et "un petit peu faibles", a pointé la sénatrice (RDSE) Maryse Carrère, présidente de la mission d’information sur l’avenir de la commune et du maire en France.
Saint-Brevin : "Les parquets locaux ont toujours été en contact avec le maire"
Lors de son audition, le 17 mai, devant la même commission, Yannick Morez, maire démissionnaire de Saint-Brevin, avait déploré l'absence de réponse du procureur de la République à un courrier qu'il lui avait adressé le 15 février (voir notre article sur cette audition). Dans son courrier, l'élu faisait la liste des "insultes et menaces" dont il avait été victime, et pointait "le manque de soutien de l'État". Le 22 mars, les véhicules du maire étaient incendiés et le feu se propageait à son domicile.
Selon Éric Dupond-Moretti, les autorités judiciaires ne sont pas restées inactives, contrairement aux dires de l'élu. "Dès réception" du courrier adressé au procureur de Nantes, "la procureure de Saint-Nazaire a informé téléphoniquement le directeur de cabinet du maire que cette affaire relevait de sa compétence territoriale", a déclaré le ministre. "Les parquets locaux ont toujours été en contact avec ce maire menacé et ils ont pris très au sérieux ces faits en ouvrant immédiatement des enquêtes", a-t-il notamment indiqué.
Les élus "font un travail remarquable. C'est le don de soi, l'intérêt général. S'attaquer à un maire, c'est s'attaquer à la République", a martelé le ministre.