Des agressions d’élus toujours en hausse, une nouvelle circulaire du garde des Sceaux
Éric Dupont-Moretti vient d’adresser aux parquets une nouvelle circulaire leur présentant les dispositions de la loi du 24 janvier dernier élargissant les possibilités pour les assemblées et associations d’élus de se constituer partie civile en cas d’agression de ces derniers. Des agressions qui, d’après l’observatoire de l’AMF, auraient augmenté de 15% l’an passé.
Le garde des Sceaux vient d’adresser une nouvelle circulaire à ses parquets relative aux agressions d’élus. Une de plus, après celles du 6 novembre 2019 (voir notre article du 15 novembre 2019) et du 7 septembre 2020 (voir notre article du 8 septembre 2020), auxquelles il faut ajouter des dépêches du 6 mai 2021 (pour faire remonter semestriellement un rapport d’analyse) ou encore du 26 janvier 2023 (face aux coupures de courant ciblant des permanences d’élus). Sans compter celle du ministère de l’intérieur aux préfets (voir notre article du 10 novembre 2021). Cette fois, le texte vise à présenter les dispositions de la loi du 24 janvier dernier "visant à permettre aux assemblées d'élus et aux différentes associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, une personne investie d'un mandat électif public victime d'agression" (voir notre article du 25 janvier).
Des précisions
Le ministre y rappelle notamment que "trois échelons territoriaux sont identifiés" (commune, département, région), avec pour chacun la mention de "l’association la plus représentative" – respectivement l’Association des maires de France, Départements de France et Régions de France. Il précise que ces mentions ne sont pas exhaustives, d’autres associations "telles que France urbaine ou l’Association des maires ruraux de France" pouvant elles aussi se constituer partie civile.
De même il explique que la locution "élus territoriaux" utilisée par la loi, qui "ne renvoie pas à une réalité juridique précise", s’entend "pour désigner les élus des entités institutionnelles locales des collectivités d’outre-mer et de Nouvelle-Calédonie", en précisant les entités concernées. Il attire en outre l’attention sur le fait que le recueil de l’accord de l’élu concerné est toujours nécessaire.
Des agressions en hausse
L’incipit de la circulaire rappelle que la loi du 24 janvier 2023 a été adoptée "dans un contexte de multiplication des atteintes visant les élus". Ce que confirme une note du 10 février dernier de l’Association des maires de France (AMF), qui fait état d’une augmentation de 15% de ces atteintes en 2022 par rapport à 2021, avec un total évalué à 1.500 agressions environ. Un nombre qui agrège les déclarations faites à l’observatoire mis en place par l’association (voir notre article du 6 octobre 2020) et les faits relayés par la presse. "Les chiffres sont des estimations", précise ainsi l’association, en soulignant que si "les maires hésitent de moins en moins à déposer plainte, […] ils n’ont pas forcément le réflexe de déclarer l’agression auprès de l’AMF". Pour l’association, cette hausse pourrait néanmoins s’expliquer en partie par "une libération de la parole", du fait de l’attention accrue portée au phénomène, sans minimiser pour autant "une augmentation des violences du fait des crispations de la société".
Les maires principales victimes
L’AMF observe que les maires sont les principales victimes, les conseillers l’étant dans une moindre proportion. Elle estime qu’ils sont à 50% victimes d’outrage, à 40% de menaces et à 10% de violences volontaires. L’on imagine le cumul possible.
Dans les trois quarts des cas, l’agression a lieu lors de "relations directes avec un administré" (ex., un maire admonestant un administré du fait d’une incivilité). Ce qui a d’ailleurs motivé le recours à des formations assurées par le GIGN (voir notre article du 29 mars 2021). L’association souligne par ailleurs le facteur aggravant que constituent les réseaux sociaux, qualifiés "d’incubateurs numériques de la violence".