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Congrès USH - Une première confrontation traditionnelle ou une mise au pas du mouvement HLM ?

D'un côté, Christine Boutin a délocalisé, pour quelque jours, le ministère du Logement à Lyon, de l'autre, les HLM ont fait leur congrès dans la capitale rhônalpine. Rencontres, confrontations et tentatives de concertation dans la quiétude de la Cité internationale.

Tout avait bien débuté ! La Cité internationale de Lyon accueillait, du 18 au 20 septembre, les nombreux congressistes et exposants du Congrès HLM dans un écrin de verdure et sous un soleil éclatant... Comme chaque année, le congrès se déroulait sur la base des réflexions engagées dans des commissions thématiques réunies durant l'année. Selon un schéma bien rodé, les tables rondes et les ateliers ciblés sur la rénovation urbaine, le développement durable, la loi Dalo... se succédaient, entrecoupés de reportages projetés sur de grands écrans. Bien sûr, il y avait un risque de rebondissement. Dès son discours d'ouverture, le président de l'Union sociale pour l'habitat, Michel Delebarre rappelait la spécificité de ce congrès : "Il y a déjà cinq ans, nous étions reçus par Lyon, et c'était le premier congrès après l'élection présidentielle." Le congrès avait été l'occasion pour le nouveau gouvernement de faire sa rentrée en matière de logement : Jean-Louis Borloo, alors ministre délégué à la Ville, avait créé la surprise en annonçant la préparation d'une loi d'orientation et de programmation pour le logement. D'autres indices laissaient présager que la cuvée 2007 du congrès HLM serait spéciale. Nicolas Sarkozy, durant la campagne présidentielle, avait affiché un objectif d'une France où 70% des ménages seraient propriétaires. Ces derniers jours, l'ambiance s'était un peu plus crispée avec la diffusion du livre blanc de l'UNPI prônant la disparition des HLM, des critiques médiatisées sur la sous-occupation des logements HLM...

 

Des propositions pour augmenter l'offre de logements

Durant le Congrès HLM, les intervenants ont mis en avant les dysfonctionnements de la politique du logement mais l'USH s'est positionnée comme force de propositions. Tous ont reconnu la persistance inadmissible d'un écart trop important entre l'offre et la demande de logements sociaux. "Nous avons plus que doublé la construction de logements en cinq ans, nous avons multiplié par cinq nos financements et nous avons encore 20.000 demandes de logements !", a illustré Gérard Collomb, maire de la ville de Lyon et président de la communauté urbaine. Foncier trop cher, coûts croissants de la construction, manque de financements... les explications n'ont pas manqué. Michel Delebarre, à l'issue de la rencontre nationale, a tenu à rappeler que les organismes HLM poursuivront et amplifieront leur mobilisation. "Nous contribuons d'ores et déjà par une mise de fonds propres plus élevée que par le passé aux opérations. Vouloir ponctionner encore plus ces fonds propres, ce serait mutiler gravement l'action des organismes (...). Mieux vaudrait que l'Etat fasse son affaire du remboursement de sa dette à l'égard des organismes et du paiement des actions de renouvellement urbain." Le président de l'USH s'est voulu constructif en proposant, pour réduire le trop grand nombre d'appels d'offres infructueux, un plan d'urgence qui pendant trois ans permettrait de faciliter l'accès des PME aux marchés. Sur la question du manque de mobilité et de la sous-occupation du parc HLM, le mouvement admettant que 6,8% des ménages du parc dépassent les plafonds des ressources, a rappelé son attachement au droit au maintien dans le logement social et a annoncé la mise en place d'un véritable "service du parcours résidentiel des locataires". Sur l'inadaptation des logements aux exigences environnementales, l'USH annonce un plan "énergie-climat" dont la première étape sera la réhabilitation de 800.000 logements.

 

Vendre 40.000 logements

Et puis, patatras ! On connaissait les intentions de Christine Boutin mais on ne s'attendait pas à une déclaration si tonitruante. Sur le stand de la Caisse des Dépôts aux baies vitrées surchauffées par le soleil, à l'occasion de la signature de la convention triennale entre la CDC et l'USH, la ministre du Logement a annoncé les objectifs chiffrés du gouvernement : chaque année, 500.000 logements devront être construits dont 120.000 logements sociaux. "Ce dernier chiffre étant lié à la vente de 40.000 logements HLM par an à leurs occupants." Le mouvement HLM, dans sa résolution adoptée à l'issue du congrès, a acté : "Les besoins sont maintenant connus : tous les organismes répondront à l'enjeu de la production des 120.000 logements locatifs sociaux par an." Avec près de 60.000 logements sociaux financés (45.100 construits, 16.600 achetés et 8.500 en accession à la propriété), le mouvement HLM a rempli son objectif à 94% en 2006. 
Le véritable débat est ailleurs. On peut même parler, depuis plusieurs années, d'un  bras de fer entre les HLM et les gouvernements : il porte sur la possibilité ou non de quantifier et d'imposer des objectifs de vente des logements sociaux. En 2003, lors du Congrès HLM de Lille, Gilles de Robien, alors ministre en charge du dossier Logement, appelait les HLM à devenir "des promoteurs sociaux" et envisageait que chaque organisme HLM propose un programme de ventes. 
Si le mouvement HLM se dit favorable à l'accession sociale à la propriété qui consiste à construire des logements affectés à la vente, il se refuse à concevoir la vente du parc existant comme une solution à la crise du logement. "Personne ne refuse l'idée, ni la mise en oeuvre de la vente de logements sociaux, les débats se sont développés sur l'ampleur, les modalités et les conditions de vente aux locataires", a précisé dans son discours de clôture Michel Delebarre. Reconnaissant que la vente de 6.000 logements par an est insuffisante, le président de l'USH estime qu'il convient "comme nous le faisons pour l'accession sociale à la propriété que la vente soit totalement sécurisée et ne conduise pas les accédants à des situations dramatiques". Et de proposer la mise en place d'un livret d'épargne pour les locataires qui souhaitent accéder à la propriété de leur logement.

 

Pour une solidarité entre organismes bailleurs

Répondant à l'argument qui consiste à expliquer le manque d'offres par la cherté du foncier, Christine Boutin a pour sa part annoncé un plan de mobilisation foncière permettant d'ici 2012 "la mise en chantier de 60.000 logements sur des terrains publics à céder. Une première liste sera disponible en début 2008".   Autre point qui devrait satisfaire les acteurs du logement social, Christine Boutin s'est déclarée favorable à une incitation financière pour les maires bâtisseurs, c'est-à-dire ceux qui remplissent les objectifs de l'article 55 de la loi SRU (20% de logements sociaux). Elle a évoqué, comme l'a demandé l'USH durant le congrès, la définition d'une exception francilienne en matière d'urbanisme, d'aménagement et de financement du logement.
Le président de l'USH comme la ministre se sont accordés sur la nécessaire "solidarité" sur les zones tendues bien que leurs recettes pour y parvenir soient assez différentes. Pour le premier, il faut notamment, dans ces zones, "permettre qu'une partie importante des opérations PLUs  (prêt locatif à usage social) puisse sortir dans les plafonds actuels du PLAI (prêt locatif aidé d'intégration)" et renforcer l'application de la loi SRU. Pour la ministre, la solidarité passera par la définition d'une charte d'utilité sociale pour aider les bailleurs opérant dans ces zones. "Ce soutien prendrait la forme d'abattements significatifs pour l'acquisition de terrains, de prêts super-bonifiés à long terme de la Caisse des Dépôts et de mesures d'accompagnement fiscal et d'urbanisme." En conclusion, la ministre a déclaré : "Pour les bailleurs sociaux qui refusent de s'engager suffisamment en faveur de la construction, de la réhabilitation, de l'amélioration du service et de la vente aux occupants alors qu'ils en auraient les moyens techniques et financiers, il faudra étudier les moyens d'affecter leurs ressources inutilisées aux bailleurs qui font les efforts nécessaires." C'est dit !


 

Clémence Villedieu

 

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