Patrimoine / Environnement - Une nouvelle proposition de loi pour sauver les moulins à eau
Véronique Louwagie, députée de l'Orne, et une quarantaine de ses collègues du groupe Les Républicains, viennent de déposer une proposition de loi tendant à préserver et encourager la capacité hydroélectrique des moulins. La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (voir notre article ci-dessous du 12 juillet 2016) était pourtant supposée avoir réglé la question de la préservation des moulins à eau, à la grande satisfaction des défenseurs du patrimoine. Son article 101 prévoit en effet que "la gestion équilibrée de la ressource en eau ne fait pas obstacle à la préservation du patrimoine hydraulique, en particulier des moulins hydrauliques et de leurs dépendances [...], protégé soit au titre des monuments historiques, des abords ou des sites patrimoniaux remarquables".
Poissons contre moulins
A peine un an plus tard, en avril 2017, un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) - le troisième en six ans sur le sujet - était venu tenter, une nouvelle fois, d'apaiser les tensions entre les tenants de la continuité écologique des cours d'eau, pour lesquels les moulins perturbent l'équilibre naturel, et les défenseurs du patrimoine et d'une activité pluriséculaire, pour lesquels les moulins sont un élément de plus en plus menacé et donc à préserver (voir notre article ci-dessous du 10 avril 2017).
Mais la loi et les recommandations du CGEDD n'ont manifestement pas suffi à résoudre la contradiction. La proposition de loi - qui succède à une autre déposée au Sénat en décembre - rappelle qu'"il existe en France environ 19.000 moulins hydrauliques, dont 3.400 présentent un fort enjeu patrimonial". Le texte entend donc "assurer la protection des moulins qui, in fine, permet la protection du patrimoine et de l'environnement, tout en encourageant la production d'hydroélectricité à petite échelle".
Forte de onze articles, la proposition de loi ne donne pas de définition des "moulins patrimoniaux", mais elle harmonise la législation portant sur la continuité des cours d'eau.
La faute aux barrages, pas aux moulins
Elle étend le dispositif de protection aux moulins situés sur les cours d'eau classés en liste 1 et différencie moulins et barrages dans l'application des règles relatives à la continuité écologique de ces cours d'eau. L'exposé des motifs fait en effet valoir que "le blocage définitif des déplacements des poissons migrateurs relève de la seule responsabilité des barrages, ce qui doit concentrer les efforts des agences de l'eau".
Dans le même esprit, le texte prévoit d'éviter, "pour des raisons de bon sens", que les moulins soient taxés au titre des dommages à l'environnement prévus par l'article L.213-10 du code de l'environnement. En effet, "un moulin hydraulique ne prélève pas d'eau entre l'entrée et la sortie de son système hydraulique, mais participe pourtant à son épuration". De même, les moulins seraient exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties, "en raison du rôle qu'ils jouent au bénéfice de l'intérêt général".
Enfin, le texte encadre la notion de "réservoir biologique", centrale dans le classement des cours d'eau, car elle détermine les obligations de continuité écologique pour les ouvrages concernés.
Références : Assemblée nationale, proposition de loi tendant à préserver et encourager la capacité hydroélectrique des moulins (enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 7 mars 2018).