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Une feuille de route pour les quartiers... et une révision des contrats de ville

Avec les nouveaux engagements du gouvernement en matière de politique de la ville, la révision des contrats de ville 2014-2020 s'impose. Une communication de Jacques Mézard en conseil des ministres le 18 juillet reprend les dernières annonces sur les quartiers prioritaires et en distille de nouvelles, livrant ainsi une "feuille de route" très attendue. L'intervention du ministre portait plus largement sur la "politique des territoires" menée par le gouvernement, dont la future Agence nationale de cohésion des territoires.

Le pacte de Dijon, fraîchement signé par Édouard Philippe et les associations d'élus France urbaine et l'ADCF, est un peu le prétexte. "Le pacte de Dijon sera décliné localement pour répondre aux problématiques spécifiques de chaque quartier" et cette déclinaison "constituera le moteur de la transformation des contrats de ville 2014-2020, qui doivent être révisés à mi-parcours en 2018", a annoncé ce 18 juillet le ministère de la Cohésion des territoires, à l'occasion d'une communication de Jacques Mézard et Julien Denormandie en conseil des ministres sur la "politique des territoires".
Cette communication, très attendue, livre la "feuille de route" du gouvernement "pour répondre aux demandes des habitants par des actions concrètes pour la sécurité, l’éducation, l’emploi, le logement et le lien social". La semaine précédente, on avait pu en avoir un avant-goût lors du "rendez-vous" au ministère avec les acteurs des quartiers ayant collaboré à la grande mobilisation lancée en novembre à Tourcoing par la président de la République (voir notre article du 12 juillet 2018).

1.300 policiers et gendarmes supplémentaires d’ici 2020 dans 60 quartiers

Plusieurs mesures visent à "garantir les mêmes droits aux habitants des quartiers qu’à ceux des autres territoires". En matière de "sécurité du quotidien", le gouvernement s'est engagé à déployer 1.300 policiers et gendarmes supplémentaires d’ici 2020 dans "60 quartiers de reconquête républicaine". Cela se fera en deux temps : 30 quartiers en 2018, 30 quartiers en 2020. Leur action portera sur la lutte contre les trafics, la présence sur la vie publique et le contact avec la population. Un plan sera mis en œuvre pour "décloisonner l’information entre services" et "renforcer le pilotage de la lutte contre les trafics", sous l’autorité conjointe du préfet et du procureur de la République
Le nombre de délégués cohésion police-population (réservistes civils de la police nationale) passera de 151 à 185. Celui des centres de loisirs jeunes (CLJ) passera de 32 à 40 d'ici à 2020.
Le ministère appelle également à "généraliser" les plans d'action locaux de prévention de la radicalisation.

Accélération des projets Anru

Au chapitre de la mixité sociale, le projet de loi Elan, actuellement en discussion en séance au Sénat, devrait "renforcer des dispositions législatives et réglementaires pour ne plus concentrer les demandeurs de logement social les plus modestes dans les quartiers de la politique de la ville" (voir notre dossier).
En matière de renouvellement urbain, Jacques Mézard a rappelé combien il comptait sur l’accélération du nouveau programme national (NPNRU), depuis que le financement a été porté à 10 milliards d’euros avec Action logement et les bailleurs et que l'Anru a révisé ses règles du jeu. L'objectif est désormais que les "conventions opérationnelles de projet" soient conclues avant fin 2019 pour les 200 projets Anru nationaux (15 le sont aujourd'hui) et les 250 projets Anru régionaux (contre 50 aujourd'hui). Cela passera par une déconcentration des processus d'instruction et de validation des projets Anru dans les départements pour tous les projets régionaux et pour les projets nationaux qui ne posent pas de difficulté. Il entend ainsi faire passer les délais d'instruction de 24-30 mois à moins d'un an.
Jacques Mézard présentera dans les prochains jours, avec l'Anah et la Caisse des Dépôts-Banque des Territoires, un plan de mobilisation en faveur des copropriétés dégradées.

Création de 60 "cités éducatives"

Des mesures entendent "favoriser l’émancipation des habitants des quartiers". C'est le cas dans les domaines de l’éducation et de la petite enfance. Le dédoublement des classes de CP et de CE1 en réseau d’éducation prioritaire a naturellement été évoqué. Le ministre a aussi rappelé la création d'un bonus de 1.000 euros par place de crèche versé dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) "afin de permettre la création de places dans les communes qui n’en ont pas les moyens".
Il a confirmé le dispositif "deux adultes par classe" dans les écoles maternelles classées en REP +, via une aide aux communes pour la création de postes d'Atsem. Des "cités éducatives" seront mises en place dans "une soixantaine" de "grands quartiers sans mixité sociale", dans le but d'"améliorer les conditions d'éducation" en concentrant tous les leviers d'action : "accueil petite enfance, santé et action sociale, temps péri et extra scolaire, programmes de réussite éducative..."
Le ministre a également confirmé la prime pouvant atteindre 3.000 euros pour les 60.000 enseignants exerçant dans les écoles et établissements classés en REP + sur trois ans.
Enfin, il a été question de l'ouverture à la rentrée prochaine de la plateforme proposant 30.000 stages de 3e "de qualité" aux collégiens des quartiers.

Emploi et formation professionnelle

Dans les domaines de l’emploi et de l’insertion professionnelle, en complément de l’expérimentation sur les emplois francs lancée en avril dernier, d'autres mesures ont été évoquées pour une mise en œuvre d’ici à 2022. Une bonne partie avait été présentée la veille à de grandes entreprises.
Le plan d’investissement dans les compétences est bien mobilisé pour la formation de 150.000 jeunes sans qualification et de 150.000 chômeurs de longue durée résidant dans les quartiers. L’objectif est fixé de porter le nombre d’apprentis issus des quartiers à 35.000 jeunes. De plus, 100.000 jeunes des quartiers seront accompagnés dans leur insertion professionnelle, avec "les cordées de la réussite", le parrainage et le tutorat dès cette année.
Enfin, l’État lancera un "testing" sur les embauches dans les grandes entreprises et s'engage lui-même à être exemplaire en matière de non-discrimination au travail.

15 millions d’euros à destination des associations

Jacques Mézard a confirmé la mobilisation d’un nouveau fonds de 15 millions d’euros à destination des "associations nationales les plus structurantes". "Une attention particulière sera également portée aux métiers de l’humain, avec la revalorisation statutaire des travailleurs sociaux, dont les agents actuellement en catégorie B intégreront la catégorie A en février 2019", s'est-il engagé. Il a aussi redit la création de 1.000 postes supplémentaires d’adultes-relais en 2019 et le doublement des coordonnateurs associatifs : les postes "Fonjep" (fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire) passeront de 750 à 1.500 dans les quartiers.
Par ailleurs, le ministère entend ouvrir 260 "centres sociaux" ou "espaces de vie sociale" d'ici à 2022.
Et parce que selon la formule consacrée "l'État ne peut pas tout", Jacques Mézard a présenté à ses collègues les partenariats qu'il a formalisés avec les acteurs des quartiers qui ont contribué à la grande mobilisation lancée en novembre à Tourcoing par la président de la République. Ce sont : le pacte de Dijon avec les élus locaux, le "partenariat national pour la cohésion des territoires" avec les associations, et le paQte (Pacte avec les quartiers pour toutes les entreprises) avec les entreprises. 

La politique des territoires, c'est aussi "Cœur de ville" et l'Agence nationale de cohésion des territoires...
En conseil des ministres ce 18 juillet, Jacques Mézard a donné un aperçu des champs d'intervention de la future Agence nationale de cohésion des territoires. L'ANCT devra répondre à l'un des objectifs de la politique des territoires : "l’accès aux services essentiels, en particulier le numérique, l’ingénierie et les services au public". Mais la communication du ministre parle aussi "d’accès aux soins", de "développement des mobilités du quotidien" et de "police de sécurité de proximité".
Question méthode, "l'ambition" de la future agence sera de "croiser des approches nationales organisées autour de programmes d’action (sur le numérique, l’accès aux services, les cœurs de ville…) avec les projets portés par les territoires". Observant que "pour beaucoup de territoires, les projets peinent à émerger faute d’une ingénierie suffisante", Jacque Mézard indique que "l’un des rôles de l’agence sera de faciliter l’accès à une ingénierie de montage de projet, en puisant dans ses ressources propres, en organisant celle de ses partenaires et en articulant l’offre disponible au plan local et national". Il précise que "les préfets seront les délégués territoriaux de l’agence", c’est-à-dire les "interlocuteurs des porteurs de projets, pour l’ingénierie comme pour l’accès aux financements".
Le programme "Cœur de ville" a aussi été évoqué, comme répondant à un autre objectif de la politique des territoires du gouvernement : "le renforcement de pôles intermédiaires". Le ministre a rappelé que le programme bénéficie d'une enveloppe de 5 milliards d’euros affectée d’ici à 2022, avec pour objectif de finaliser les conventions pour chacune des 222 villes et intercommunalités retenues d’ici à fin septembre 2018. Il s'est félicité que ce programme ait permis d'"inventer un mode d’intervention partenarial dans les territoires, avec l’appui d’Action logement, de la Caisse des Dépôts, de l’Anah, mais aussi de tous les acteurs de l’aménagement".
V.L.