Commande publique - Une collectivité peut-elle créer un service de téléassistance pour les personnes âgées et handicapées ?
Les personnes publiques qui souhaitent prendre en charge une activité économique hors de leurs missions de service public ne peuvent le faire que si elles respectent la liberté du commerce et de l'industrie et le droit de la concurrence. Le Conseil d'Etat, dans un arrêt du 3 mars 2010, a ainsi précisé sous quelles conditions une collectivité territoriale pouvait prendre en charge un service de téléassistance aux personnes âgées et handicapées.
Dans le cadre de son action en matière d'aide sociale, le département de la Corrèze souhaitait créer un service de téléassistance aux personnes âgées et handicapées afin de favoriser leur maintien à domicile. Le département a donc engagé, le 26 juin 2000, une procédure de mise en concurrence en vue de la passation d'une délégation de service public. Une société candidate, dont l'offre n'a pas été retenue, a alors saisi le juge administratif au motif que la création de ce service concurrençait l'initiative privée et portait atteinte au principe de liberté du commerce et de l'industrie.
Les juges du Conseil d'Etat rappellent que si les personnes publiques peuvent prendre en charge une activité économique, indépendamment des missions de service public qui leurs sont confiées, "elles ne peuvent légalement le faire que dans le respect tant de la liberté du commerce et de l'industrie que du droit de la concurrence". Les collectivités territoriales peuvent donc intervenir sur un marché lorsqu'elles agissent "dans la limite de leurs compétences" et qu'elles peuvent "justifier d'un intérêt public, lequel peut résulter notamment de la carence de l'initiative privée". La principale limite à cette prise en charge étant que cette intervention "ne doit pas se réaliser suivant des modalités telles qu'en raison de la situation particulière dans laquelle se trouverait cette personne publique par rapport aux autres opérateurs agissant sur le même marché, elle fausserait le libre jeu de la concurrence".
Dans le cas de la Corrèze, le Conseil d'Etat a considéré que même si des sociétés privées proposent ce type de prestations, la création d'un service public de téléassistance, "ouvert à toutes les personnes âgées ou dépendantes du département, indépendamment de leurs ressources" et dont le financement par la collectivité permet de réduire le coût réel de la prestation pour les usagers, "satisfait aux besoins de la population et répond à un intérêt public local". En répondant à ces exigences, la création de ce service ne porte donc pas "une atteinte illégale au principe de liberté du commerce et de l'industrie".
L'Apasp
Référence : Conseil d'Etat, 3 mars 2010, Département de la Corrèze, n° 306911