Eclairage public - Une charte associant éclairage urbain et biodiversité séduit les villes

Le 25 avril, l'association Noé Conservation a lancé à destination des communes une charte de l'éclairage durable, qui intéresse par exemple les villes de Paris, de Niort et de Valenciennes. Cette charte complète bien le panel d'outils existants puisqu'elle cible les impacts de la pollution lumineuse sur la biodiversité.

Aides de l'Ademe, nouvelles technologies disponibles et récente réglementation sur la pollution lumineuse : tout pousse aujourd'hui les élus à rénover leur éclairage public. "Il constitue un réel enjeu et représente près de la moitié de la consommation d'électricité des communes. Responsable de 4% des émissions de gaz à effet de serre, il consomme chaque année 6 térawattheures. Cela correspond en puissance appelée à la production d'une tranche nucléaire récente. Surtout, il accroît les effets de pointes sur le réseau électrique", confirme Valérie Martin, chef du service Communication institutionnelle à l'Ademe. Celle-ci s'exprimait le 25 avril à l'occasion du lancement à Paris, à l'initiative de l'association Noé Conservation, d'une charte de l'éclairage public. L'idée étant d'inviter "les élus des 36.000 communes de France à adopter et mettre en oeuvre cette charte".
Aux côtés du ministère de l'Ecologie, de Bouygues Energie & Services et, en guise de partenaires techniques, de l'association Les Eco Maires et du Syndicat de l'éclairage, l'Ademe estime que cette nouvelle charte part du bon principe en associant le maximum d'acteurs et en partant bien des besoins des utilisateurs. En dix engagements, le document propose d'accompagner les services techniques des communes et communautés d'agglomération tout au long du processus d'adaptation de leur éclairage public. "Les engagements sont progressifs. Leur trame épouse celle des schémas directeurs d'aménagement lumière (Sdal), un outil déjà à la disposition des communes pour leurs projets d'éclairage", indique Emmanuel Berod, chargé de programme Eclairage durable & Biodiversité chez Noé Conservation.
Tout le monde sait que l'éclairage public constitue un gisement important d'économies. Ne serait-ce que du fait de l'âge des luminaires, qui ont dans 40% des cas plus de 25 ans. "Les luminaires sont généralement installés pour 20-30 ans. "De fait, ceux qu'on voit aujourd'hui en élevant la tête dans nos villes ne correspondent pas du tout à ce qui est disponible sur le marché, où de véritables sauts technologiques ont eu lieu", appuie Jean-Michel Trouis, président du Syndicat de l'éclairage, une organisation professionnelle qui a participé au comité d'experts associé à l'élaboration de cette charte.

Eclairage nocturne et biodiversité

"Il y a des économies à faire et des enjeux spécifiques qui se posent, notamment avec l'éclairage des parcs et espaces verts. Et il y a toujours des questions de sécurité et de confort de l'usager à prendre en compte. A Paris, à l'issue d'un travail ayant impliqué des services aussi divers que la propreté, les finances, la sécurité, nous avons tout mis sur la table : nos consommations, le nombre de candélabres, etc.", témoigne Philippe Jacob, responsable de l'Observatoire parisien de la biodiversité.
Mais avant même de s'efforcer d'économiser l'énergie dépensée par les points lumineux, l'idée - et la spécificité - de la démarche proposée est de commencer par s'intéresser à la biodiversité... et donc, concrètement, par identifier l'environnement naturel que l'éclairage public impacte. "Car énergie et biodiversité sont liées et l'éclairage, on le sait, perturbe la vie de la faune qui vit surtout la nuit", insiste Laurent Roy, directeur de l'eau et de la biodiversité au ministère de l'Ecologie. Au Muséum national d'histoire naturelle, Romain Sordello, chef de projet, explique que la pollution lumineuse rebat insidieusement les cartes de la biodiversité en pénalisant certaines espèces tout en profitant à d'autres : "Dès lors, privilégier certains types de luminaires et de longueurs d'onde est un choix délicat."
La charte traite de cet aspect technique à travers trois de ses engagements. "C'est pour cela qu'elle nous intéresse. Cette méthode paraît robuste. En complément du partenariat public-privé (PPP) sur l'éclairage public que nous venons de signer avec Bouygues Construction, pour lequel nous avons été attentifs aux impacts sur la biodiversité notamment dans les parcs, cet outil devrait nous aider", salue Bernard Brouillet, adjoint au maire en charge du développement durable à Valenciennes.
Les communes qui ratifieront cette charte s'engagent à mettre progressivement en oeuvre la démarche qu'elle fixe, en s'appuyant sur un guide technique et un ensemble de préconisations qui seront publiés cet été. Une date à laquelle un arrêté sur l'éclairage des bâtiments non résidentiels entrera d'ailleurs en vigueur. Localement, cet arrêté a déjà suscité des arbitrages et des dérogations sont prévues. Cette charte se veut donc un outil d'aide à la décision pour mettre en place ce type de mesures.