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Un rapport sénatorial pour valoriser les initiatives numériques des territoires

Présenté à la délégation aux collectivités territoriales du Sénat le 19 avril, le rapport "Les nouvelles technologies au service de la modernisation des territoires", porté par les sénateurs Jacques Mézard et Philippe Mouiller, constitue une somme d'exemples sur le volontarisme des collectivités en matière d'aménagement numérique, d'innovation et de ville intelligente. Les rapporteurs estiment que les efforts au niveau national sont encore insuffisants. Pour s'en convaincre, ils ont notamment visité l'Estonie, pays modèle en matière d'administration électronique. La délégation aux collectivités, séduite par l'initiative, devrait désormais se pencher plus fréquemment sur les enjeux du numérique pour les collectivités.

Valoriser les démarches innovantes des collectivités. Tel était l'objectif que les sénateurs Mézard et Mouiller s'étaient attribué, tous deux issus de territoires à dominance rurale. "Cette capacité d'innovation est trop souvent méconnue, alors que de nombreuses initiatives réussissent", a souligné le sénateur Mézard auprès de ses pairs. "Les associations d'élus ne la mettent pas suffisamment en exergue." Le rapport des sénateurs, au-delà de l'aménagement numérique, balaye un vaste spectre thématique, avec une conviction : l'innovation est à l'œuvre dans l'exercice de toutes les compétences des collectivités. On compte là les mobilités, le traitement des déchets, la transition énergétique, mais aussi la sécurité, la santé ou la simplification administrative. Alors que les nombreuses études sur la smart city privilégient souvent les retours d'expérience issus des grandes agglomérations, les sénateurs se démarquent en rapportant des initiatives basées dans tous types de territoire.

Numérique et prévention des risques

Dans le domaine de la sécurité, le rapport met en avant l'apport du numérique en termes de prévention des risques. Un aspect souvent trop peu souligné dans les stratégies de ville intelligente, mais qui prend tout son sens dans les territoires soumis aux aléas climatiques. Le département des Bouches-du-Rhône a dès 2012 équipé ses pompiers de drones, renouvelés en 2014. L'objectif était de permettre une meilleure cartographie des feux de forêt sans mettre la vie des pompiers en danger et en économisant de coûteux survols en hélicoptère. La nouvelle génération de drones permet également de faire une analyse thermique des terrains. Non loin de là, la ville de Nîmes, déjà connue pour avoir impulsé un réseau de vidéosurveillance mutualisé sur son agglomération, a été pionnière dans la mise en place d'un système d'information prédictif sur la pluviométrie. Un réseau de capteurs qui, désormais, remontent leurs informations via réseau radio.

L'administration électronique continue de mobiliser les territoires

Cher aux rapporteurs, le processus de simplification administrative tire aussi parti du numérique. Et les efforts, là encore, ne se concentrent pas seulement dans les grandes villes. Les sénateurs saluent notamment les initiatives du Sictiam (Syndicat intercommunal des collectivités territoriales informatisées Alpes Méditerranée) qui met à disposition de différents territoires des offres mutualisées de gestion de la relation avec les citoyens (GRC). Le syndicat, qui existe depuis 1989 et regroupe plus de 200 membres, a su évoluer en proposant des portails de services aux usagers performants, mais aussi par exemple, des solutions open data. Le Sictiam est d'ailleurs partie intégrante de l'expérimentation Open Data Locale impulsée par l'État et pilotée par Opendatafrance. Les sénateurs mettent également en avant l'expérience probante de la communauté de communes de Parthenay-Gâtine qui, en initiant une démarche d'administration électronique dès 2001, a pu mettre en place une carte de vie quotidienne connectée au portail famille : une manière d'accéder "sans couture" à de nombreux services de la ville.

Créer les conditions d'une généralisation des expériences pionnières

En valorisant toutes ces initiatives, les sénateurs appellent à créer les conditions optimales pour que tous les territoires puissent déployer une stratégie d'innovation sans entraves et avec les moyens adéquats. Le rapport lance donc un appel à une couverture intégrale du territoire en très haut débit. Les sénateurs s'attachent également à encourager autant la médiation numérique que l'émergence de nouveaux innovateurs (start-up, projets collaboratifs). La notion d'intéropérabilité est souvent mentionnée, dans l'idée de permettre un maximum d'échanges entre les différents dispositifs montés au niveau local. Cela concerne l'administration électronique, mais aussi les nouveaux services de la ville intelligente (réseaux de l'internet des objets, ouverture des données, etc.). Les conclusions des rapporteurs restent cependant très générales. Il ne s'agit pas tant de proposer des solutions concrètes que de souligner l'importance de certains enjeux. La lecture de ce travail se complète utilement par celle du rapport Belot, paru quelques jours plus tôt, et qui formule des recommandations précises pour permettre l'avènement d'une ville intelligente réellement pilotée par la collectivité (voir notre article du 20 avril).