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Risques industriels - Un plan anti-vieillissement pour les installations industrielles

Le 13 janvier, environ 200 participants ont assisté à Paris à la journée de présentation d’un plan arrêté par Jean-Louis Borloo, ministre de l'Écologie, qui vise à mieux maîtriser les risques liés au vieillissement des installations industrielles. Etaient essentiellement conviés des inspecteurs et responsables des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), ainsi que nombre d’ingénieurs et responsables des filières industrielles du pétrole, de la chimie et de la pétrochimie. "La loi Bachelot  sur la prévention des risques naturels et technologiques a été un jalon important avec la mise en place des PPRT (plans de prévention des risques technologiques, NDLR). Ou encore l’application de la directive Seveso 2 avec la réduction des risques à la source. Mais il ne faudrait pas que ces efforts soient anéantis à cause de cuves, de bacs, de réacteurs ou de canalisations mal entretenus ou trop anciens", a introduit Chantal Jouanno, secrétaire d’Etat à l’Ecologie.
Les incidents locaux qui ont déclenché ou accéléré la réalisation du plan sont tragiquement connus : pollution aux hydrocarbures des berges de la Garonne en 2007, à Donges en Loire-Atlantique en 2008 ou encore l’été dernier en pleine réserve naturelle de la Crau en Paca… Etant donné l’âge de l’outil industriel français – de 30 ans en moyenne pour les canalisations et de 30 à 50 ans pour les plateformes industrielles et bacs de stockage – le ministère de l’Ecologie reconnaît que "de tels accidents sont susceptibles de se reproduire voire de s’accentuer". Il fallait donc agir : six groupes de travail ont planché sur ce plan, inédit de par son ampleur.

Fort de 38 mesures, il est le fruit de deux ans de travaux et nécessite 500 millions d’euros, un budget réparti sur plusieurs années et essentiellement supporté par les trois filières précédemment citées. Entre exploitants et pouvoirs publics, les responsabilités de sécurité industrielle sont en effet partagées. En amont, en raison du caractère très technique et national du plan, les collectivités n’ont pas été associées à son élaboration. "Mais elles seront impliquées dans son application et son suivi, notamment via les comités locaux d’information et de concertation (Clic) et secrétariats permanents pour la prévention des pollutions et des risques industriels (SPPPI) qui existent par exemple dans les bassins pétrochimiques de la Basse-Seine ou des Bouches-du-Rhône", a expliqué Laurent Michel directeur général de la prévention des risques au ministère de l'Ecologie.

Priorité est donnée à l’élaboration d’un référentiel de suivi des équipements à risque, ce qui conduira à modifier sous peu un arrêté ministériel. Côté ouvrages de génie civil, un état des lieux sera dressé d’ici à 2011, des travaux si besoin engagés dans les 18 à 24 mois suivants et la surveillance renforcée via des visites et la réalisation de nouveaux guides techniques à soumettre à l'administration dès le mois de mars prochain. Le redoublement d’efforts porte également sur l’inspection du parc d’équipements de stockage de liquides dangereux. "Le dispositif est renforcé pour les bacs de stockage à forte capacité mais vise aussi les plus petits et jusqu’à ceux de 10m3, ce qui est en soi remarquable", a précisé Chantal Jouanno.

Enjeu crucial en termes d’économie locale, mais dont les collectivités ont souvent du mal à prendre la mesure en termes de prévention des risques, le transport de matières dangereuses (TMD) s’effectue essentiellement par camion ou train, mais aussi par le biais de 50.000 km de canalisations. Un quart de ce réseau traverse des zones naturelles et parfois des zones densément habitées. La réglementation étant touffue et disparate dans le domaine, une ordonnance est prévue en mai en vue d’harmoniser les dispositions relatives à la surveillance et maintenance de ces réseaux quelque peu vieillissants. Leçon tirée de l’accident de la Crau : cette ordonnance intégrera des exigences environnementales. Globalement, le rythme de contrôle complet de ces canalisations va s’accélérer et passer de dix à cinq ans. "Il passera au rang de priorité pour les Dreal et, dans ce domaine comme celui des tuyauteries industrielles et équipements sous pression, il sera fait appel à la tierce expertise pour valider certains plans d’exploitants", a complété la secrétaire d’Etat. A cette dernière mesure, qui a soulevé certaines réticences dans le milieu industriel, s’en ajoute une flopée d’autres élaborées avec l’interprofession. Elles visent notamment à améliorer l’accidentologie, la recherche et la diffusion de bonnes pratiques en matière de contrôle et de suivi de la dégradation des milliers d'équipements concernés.

 

Morgan Boëdec / Victoires éditions