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Infrastructures - Un emprunt public européen pour financer les transports ?

La réalisation d'une Europe des transports ne peut pas se contenter de l'action de la BEI ou de subventions de court terme. Pour Bernard Soulage, vice-président de Rhône-Alpes, le salut passe par des mesures plus ambitieuses, malgré le contexte de disette budgétaire.

Relancer l’Europe par des projets d’intérêt commun. L’idée est ressassée à Bruxelles comme à Paris, sans que sa mise en oeuvre ne soit clairement énoncée. Avocat de la croissance, François Hollande appuie les "project bonds", qu’il qualifie confusément d'"eurobonds", pour sortir l’UE de la torpeur de l’austérité. L’outil, tel que proposé par la Commission européenne en octobre dernier, ne repose pas sur l’emprunt public mais bien sur des obligations privées émises par des entreprises dont les projets pourraient être facilités par l’apport d’une garantie publique, à hauteur de 20%, en provenance de la Banque européenne d’investissement et du budget communautaire.

Entre 550 et 1.500 milliards

Cela suffira-t-il ? Non, répond Bernard Soulage, vice-président socialiste de la région Rhône-Alpes. Dans un avis sur les réseaux transeuropéens de transports adopté le 3 mai à l’unanimité par le Comité des régions, l’élu réclame le "recours à un emprunt européen qui, bien au-delà de la proposition de la Commission européenne de créer des 'project bonds' pour financer les infrastructures de transport de l'UE, permettrait d'investir massivement dans un système européen de transport indispensable à la compétitivité du continent".
L’évaluation des coûts nécessaires à l’achèvement du réseau transeuropéen de transports (secteurs routier, ferroviaire, aérien et maritime) atteint des proportions vertigineuses : 550 milliards d’euros d’ici à 2020 selon la Commission et jusqu’à 1.500 milliards d’ici à 2030… Contraint par la négociation à couteaux tirés avec l’Allemagne, François Hollande n’a jamais adjoint de montant précis au pacte de croissance qu’il s’apprête à défendre à Bruxelles.
Dans son rapport, Bernard Soulage appelle "à ne pas négliger le rôle de la Banque européenne d'investissement qui finance, chaque année, environ 10 milliards d'euros de projets liés aux transports". La recapitalisation de la banque, qui pourrait atteindre 10 milliards d’euros, comme l’a rappelé José Manuel Barroso le 9 mai, et la garantie de 230 millions d’euros que l’UE est prête à apporter aux projets d’infrastructures jusqu’en 2013, donnent un aperçu des moyens à disposition. "Les 'project bonds' peuvent être utiles dans un montage financier, mais ils ne sont pas suffisants", avait expliqué Bernard Soulage en mars dernier, autour d’une discussion sur un livre d’entretiens coréalisé avec le sénateur UMP Louis Nègre.

Long terme

D’autres sources de financement doivent donc être mobilisées pour sécuriser des investissements sur plusieurs décennies. Les "emprunts souverains européens", auxquels l’élu PS se dit favorable pour des "raisons politiques mais aussi économiques", offriraient des taux avantageux sur une période longue. S’ajoute le recours aux subventions, grâce auxquelles les collectivités peuvent porter un projet de territoire de long terme. Or, "les modalités d’attribution des subventions européennes […] limitées à une période budgétaire de sept ans" ne permettent pas la projection nécessaire à la "réalisation des très grands projets", déplore l’élu dans son rapport. La signature de "contrats de programme" entre l’Union européenne, les Etats et les régions, pourrait selon lui réduire l’aléa financier en "définissant leurs engagements réciproques en matière de financement et de calendrier de réalisation".
A condition que les Etats jouent le jeu d’une Europe des transports. Lors des précédentes négociations budgétaires, les gouvernements avaient diminué la proposition de la Commission de 150%, réduisant l’enveloppe à 8 milliards d’euros.