Social / Education - Un décret installe un délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale
Un décret du 14 février 2017 crée une nouvelle fonction à l'intitulé quelque peu hybride, en la personne d'un "délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale". Dans une communication au conseil des ministres du 15 février - jour de publication du décret - sur "la politique en faveur de la langue française pour la cohésion sociale", le Premier ministre explique ainsi qu'"en plus d'être une compétence scolaire ou professionnelle, la maîtrise de la langue française est une compétence sociale, indispensable à l'exercice de la citoyenneté. Bien maîtriser le français est une condition essentielle pour trouver sa place dans l'espace républicain".
Une ambition "réaffirmée au lendemain des attentats de 2015"
Pour Bernard Cazeneuve, la création de ce nouveau délégué interministériel "s'inscrit dans une ambition, portée depuis 2012 et qui a été réaffirmée au lendemain des attentats de 2015 dans le cadre des comités interministériels à l'égalité et à la citoyenneté. Elle marque l'importance de la maîtrise de la langue et vise à garantir la coordination des politiques y concourant et à amplifier les moyens qui lui sont consacrés".
Le décret du 14 février 2017 précise que le délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale "apporte son concours à la définition et à la mise en œuvre des politiques favorisant l'accès de tous à la lecture, à l'écriture et à la maîtrise de la langue française, en complément des actions de formation linguistique conduites dans le cadre de la politique d'accueil et d'accompagnement des étrangers".
Assisté d'un conseil d'orientation stratégique - dont la composition sera fixée par un arrêté du Premier ministre -, le délégué doit notamment "favoriser les partenariats entre l'Etat et les collectivités territoriales, les partenaires sociaux, les établissements publics et le secteur associatif pour la lutte contre l'illettrisme et la maitrise de la langue française".
Il doit également soutenir des actions de prévention de l'illettrisme et d'accès à la maîtrise de langue française, favoriser la mise en place d'actions spécifiques dans le cadre de la formation professionnelle ou encore "apporter son concours aux politiques visant à lever l'obstacle de la langue orale ou écrite dans l'accès aux services publics et aux droits, notamment en s'assurant de la promotion d'un registre de langue plus adapté aux usagers du service public".
Un réseau de délégués régionaux
Pour cela, le délégué coordonne l'action des différents ministères compétents : Affaires sociales, Education, Affaires étrangères, Travail, Justice, Aménagement du territoire, Ville, Intérieur et immigration... Il peut faire appel à différents organismes et services existants, comme l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme, la délégation générale à la langue française et aux langues de France, ou encore le Centre international d'études pédagogiques (dans le domaine de la promotion de l'apprentissage du français langue étrangère).
Chargé de veiller à la mise en œuvre des actions décidées au niveau national et à l'échelon régional, le délégué interministériel "s'appuie sur un réseau de délégués régionaux dont il assure l'animation". Il anime aussi le partenariat avec les centres de ressources pour la prévention et la lutte contre l'illettrisme et l'analphabétisme.
Thierry Le Paon nommé délégué interministériel
Un décret du 16 février 2017 nomme Thierry Le Paon délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale. Bien que la communication de Bernard Cazeneuve en conseil des ministres le présente comme "très investi sur la question de l'illettrisme depuis plus de vingt ans", l'intéressé est surtout connu comme ancien - et éphémère - secrétaire général de la CGT de mars 2013 à janvier 2015. Comme indiqué dans la communication en conseil des ministres, Thierry Le Paon sera également nommé président de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI), en remplacement de Marie-Thérèse Geoffroy, qui présidait, bénévolement, l'organisme depuis 2000.
Le 6 juin 2016, Manuel Valls avait donc chargé Thierry Le Paon de préfigurer une refonte de l'ANLCI en une Agence de la langue française. Le rapport correspondant a été remis au Premier ministre le 29 novembre dernier. Mais, bien qu'annoncée par Manuel Valls (voir notre article ci-dessous du 2 décembre 2016), l'Agence de la langue française s'est finalement transformée en un simple poste de délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale - objet du décret du 14 février - qui va donc désormais coexister avec l'ANLCI...
Références : décret 2017-174 du 14 février 2017 portant création d'un délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale (Journal officiel du 15 février 2017) ; décret du 16 février 2017 portant nomination du délégué interministériel à la langue française pour la cohésion sociale (Journal officiel du 17 février 2017).