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Transports : TDIE passe les candidats aux régionales à la question

C'est désormais une habitude solidement ancrée, le think tank TDIE vient d'adresser aux candidats aux élections régionales et territoriales un questionnaire particulièrement détaillé sur leurs ambitions en matière de transport. Réponse attendue au plus tard le 26 mai. La véritable épreuve, pratique, ne débutera toutefois que le 28 juin.

"Avec le report du scrutin, les candidats auront eu un peu plus de temps pour se préparer", glisse Philippe Duron, co-président de TDIE, lors de la présentation du questionnaire que ce think tank adresse ce 4 mai aux candidats aux élections régionales et territoriales sur leurs ambitions en matière de transport. Espérons qu'ils l'auront mis à profit, car du temps, les candidats ne devront pas en perdre pour donner réponse : TDIE relèvera les copies le 26 mai prochain au plus tard, et ce afin de pouvoir les mettre en ligne, aux bons soins des électeurs. Or, le questionnaire – deux en réalité, puisque l'Île-de-France bénéficie, du fait de sa spécificité, d'un traitement particulier (mais pas l'outre-mer) – n'a rien d'un QCM.
De l'aveu même de certains de ses auteurs (les membres du conseil scientifique de TDIE), il est "long et dense, peut-être complexe", avoue Caroline Daude, chargée de la recherche à la Direction de la voirie et des déplacements de la Ville de Paris et membre du conseil scientifique de TDIE, qui a détaillé en conférence de presse la version "parisienne" ; "complexe et difficile", reconnaît Dominique Auverlot, chef du département développement durable au Commissariat général à la stratégie et à la prospective (services du Premier ministre) et membre du conseil scientifique de TDIE, qui a présenté l'édition "générale". Pour sûr, les sortants devraient bénéficier de quelques mètres d'avance dans la course ainsi lancée, même si TDIE met à disposition de tous les candidats un dossier documentaire particulièrement riche. "L'objectif est aussi d'aider les équipes candidates à structurer et approfondir leur réflexion", explique Dominique Auverlot. TDIE entend également "secouer le cocotier", affirme Louis Nègre, co-président, qui déplore que les transports, "sujet de préoccupation pour les Français de base, le soient un peu moins pour la France d'en-haut".

Figures libres et imposées

Pour faciliter l'appréhension du document, l'organisme a mis en relief les quatre enjeux – les "figures imposées", explique Dominique Auverlot – qu'il estime prioritaires "pour une politique régionale durable" : le fret et la logistique ; la gouvernance et les services de mobilité ; les infrastructures et investissements ; l'innovation et la recherche. Le tout étant précédé de "figures libres" – disons moins corsetées –, avec la présentation des "orientations générales" que les candidats entendent donner à leur politique des transports pour qu'elle contribue au développement régional tout autant qu'à la lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l'air. L'ensemble comprend moult questions, plus ou moins ouvertes (par exemple, "Vers quels projets souhaitez-vous orienter les fonds de relance au niveau régional en matière de transport, mobilité, logistique ?") ou fermées (par exemple, "Souhaitez-vous mettre en place un plan régional pour le vélo et/ou la marche ?").

Une question des mobilités renouvelée

Beaucoup constituaient déjà la trame du questionnaire adressé pour le scrutin de 2015. Ce qui n'est guère surprenant dans un domaine aussi structurant à moyen ou long terme, comme le rappelait récemment Louis Nègre, avec sa casquette de président du Groupement des autorités responsables de transport (Gart), célébrant les 40 ans de ce dernier.
Philippe Duron souligne néanmoins que "la question des mobilités a été renouvelée depuis 2015, avec la loi d'orientation des mobilités (LOM) qui a confié aux régions le rôle de chef de file, sans compter la pandémie, qui conduira à rechercher de nouvelles ressources et de nouvelles approches pour faire revenir les citoyens vers les transports publics, ou encore les transitions numérique et écologique".
Sans être totalement nouveaux, certains traits, qui n'étaient parfois qu'esquissés en 2015, ont indubitablement pris de l'épaisseur.

Ouverture à la concurrence

Parfois sous le seul coup du calendrier. Ainsi de l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, qui prendra corps au cours du mandat "avec un quart de siècle de retard sur l'Allemagne", déplore Louis Nègre. Faisant écho à Philippe Duron évoquant une meilleure maîtrise des coûts et une amélioration de l'offre, le vice-président de la métropole Nice-Côte d'Azur se félicite déjà des bénéfices que devraient en retirer "tant l'usager que le contribuable". Dans sa région, précise-t-il, "rien que l'annonce de l'introduction de la concurrence s'est traduite par une amélioration de la ponctualité".

Effets de la crise sanitaire

Plus largement du fait de la crise sanitaire, qui aura entraîné moult changements de perspectives, délaissant les nuances de l'aquarelle pour les traits au couteau.

• Ainsi, la question du fret et de la logistique – préoccupation ancienne de TDIE, "même si elle n'entre pas directement dans les compétences des régions", rappelle-t-on – déjà crayonnée en 2015, s'est empâtée depuis. "La pandémie a montré combien la question était vitale", relève Philippe Duron. Président du conseil scientifique de TDIE, Michel Savy insiste également sur le fait que "la logistique urbaine constitue un enjeu considérable, qui suscite beaucoup de débats (centres commerciaux, entrepôts…) et mérite beaucoup d'éclaircissements". Et d'appeler à une "véritable réflexion stratégique" en la matière, incluant singulièrement la question des plateformes logistiques. On relèvera toutefois que si le document fourmille de questions sur la décarbonation des transports, il reste taiseux sur l'anguleux objectif de "zéro artificialisation nette" des terres.

• De même en matière de tarification, et plus largement d'équilibre économique de l'activité, plus que jamais mis à mal par une chute considérable des fréquentations. "Le télétravail continuera d'occuper demain une place importante, ce qui est préoccupant pour les recettes", prédit Philippe Duron. Une évolution qui pourrait redonner du grain à moudre aux partisans de la "gratuité", Louis Nègre rappelant que cette solution d'un paiement indirect est d'autant plus séduisante lorsque le coût de la billetterie est à peine compensé par les recettes qu'elle génère.

• Ou encore en matière de santé, préoccupation qui a repris le devant de la scène, tant du fait du covid que des effets de sa gestion (le confinement). "La première nuisance des transports, c'est le bruit", entonne Louis Nègre, qui souligne également l'enjeu de la lutte contre la pollution – qui n'épouse qu'imparfaitement celui de la lutte contre le réchauffement climatique. Des défis en rien nouveaux, mais qui prennent un relief particulier.

• In fine, depuis 2015, peu de sujets ont été dilués. En dépit (à cause ?) des multiples réformes, les questions de gouvernance, par exemple, restent prégnantes. Particulièrement en Ile-de-France, qui doit notamment composer "avec la métropole du Grand Paris, qui s'est saisie de la ZFE-m [zone à faibles émissions mobilité] et de la question logistique urbaine, et avec la société du Grand Paris", souligne Caroline Daude, qui ajoute que la région devra par ailleurs faire face à des défis spécifiques, comme les jeux olympiques et paralympiques et leurs impacts, entre autres, sur "la mise en accessibilité des réseaux".

Bref, passée l'épreuve théorique du questionnaire – et celle de l'élection – se dresseront devant les heureux élus les véritables difficultés, pratiques. Nul doute que les réflexions de TDIE ne leur seront alors pas de trop.