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Développement local - La logistique : quelles opportunités pour les territoires ?

Dans le contexte de mondialisation des échanges, la logistique est promise à un bel avenir avec la perspective de 700.000 emplois créés d'ici cinq ans. En dehors des grands pôles situés sur l'axe Nord-Ile-de-France-Vallée-du-Rhône, des territoires, comme le département de l'Indre, tentent de se faire une place.

La logistique et les collectivités ont longtemps entretenu des rapports ambigus. Pour les collectivités, elle représente un vivier d'emplois et de création de richesse mais avec son lot de nuisances (trafic de poids-lourds, consommation d'espace, etc.). Or, ce sont elles qui, à travers les PLU, détiennent les clés du développement du secteur. La donne serait-elle en train de changer ? "En dix ans, il y a eu une évolution dans la connaissance de la logistique au sens large, les collectivités savent bien mieux de quoi il s'agit, mesurent les avantages et les inconvénients." C'est ce qu'a constaté François de La Rochefoucauld, directeur général de Foncière Europe Logistique, filiale du groupe Afilog, lors d'un séminaire organisé par le Cner (Conseil national des économies régionales), jeudi 17 juin. Tant mieux, car après une chute des trafics l'an dernier accompagnée d'un coup de frein aux projets immobiliers, la logistique affiche de belles perspectives. Elle représente 1,7 million d'emplois en France et 700.000 créations sont envisagées à horizon 2015, pour un taux d'emploi estimé par les professionnels à 100 pour 20.000 m2 d'entrepôts construits.
S'agissant des corridors d'échanges, le trafic de marchandises reste largement dominé par la route avec 86% du total en 2008, 12% pour le ferroviaire et à peine 2% pour le fluvial. Sans remettre en cause le poids de la route, les modes alternatifs devraient toutefois connaître une forte progression. Le gouvernement envisage en effet d'augmenter de 25% la part du ferroviaire d'ici à 2012. Quant au fluvial, en 2010, il devrait passer à 4% du total. Il présente de nombreux avantages pour acheminer directement les marchandises au centre des grandes agglomérations. L'ouverture en 2015 du canal à grand gabarit Seine-Nord-Europe offrira de nouvelles opportunités en ouvrant les bassins de la Seine et du Nord de la France vers les hinterlands du reste de l'Europe.
Mais dans un contexte de concurrence croissante, le secteur logistique pâtit d'un manque d'organisation en France, comme le soulignait un rapport du Pipame (pôle interministériel de prospective et d'anticipation des mutations économiques) en septembre dernier. En réalité il y a bien deux secteurs en un. Celui qui se place dans le commerce mondial et qui se concentre sur les grands axes le long de la "banane" Londres-Madrid. "Le centre de gravité se déplace à l'Est, notamment vers la Pologne, ce qui profite beaucoup à l'Allemagne, mais en 2012 on devrait assister à un retour vers l'Ouest", entrevoit Caroline Ceccaldi, directrice d'Afilog, notamment en raison de la baisse des avantages compétitifs de la Pologne.

 

Créations d'emplois

Les investissements immobiliers se concentrent aujourd'hui vers quelques grands pôles : l’Ile-de-France, Orléans, le Nord-Pas-de-Calais, Lyon, Marseille. Et les tentatives d'en démordre se sont généralement soldées par un échec, avertit François de La Rochefoucauld, qui conseille de rester à proximité immédiate des points de livraison et des bassins de consommation (zones urbaines ou périrubaines). Les périphéries des métropoles offrent de nombreux avantages : moindre coût du foncier, infrastructures, échangeurs, ports, aéroports...

Les deux portes d'entrées maritimes, Marseille et Le Havre, permettent d'irriguer leur région respective même si la cité phocéenne a raté le coche de l'explosion des échanges commerciaux et s'est fait tailler des croupières par les ports espagnols en quelques années. En revanche, Le Havre, bien que dominé par les ports d'Europe-du-Nord, a amorcé le virage grâce à son projet de Port 2000. Le canal Seine-Nord-Europe devrait lui offrir de belles opportunités de croissance.
Difficile donc de rivaliser avec ces grands pôles pour atirer les investissements logistiques. A l'ombre des grands axes pourtant, il existe une logistique de proximité qui diffuse sur le territoire et dont les retombées sont loin d'être négligeables, grâce à des secteurs en progression comme le e-commerce qui ne demande pas de grandes surfaces de stockage. Et certaines collectivités n'hésitent pas à se vendre. C'est le cas du conseil général de l'Indre qui, via son agence de développement Adeindre, communique sur sa position de choix au centre de l'axe Londres-Barcelone et sur sa desserte : autoroute A20, lignes Paris-Toulouse et Tours-Châteauroux, aéroport international de Châteauroux… Avec 142 établissements présents, la logisitique représente quelque 4.600 emplois dans le département. Des atours qui ont séduit GRT Gaz, filiale transport de GDF-Suez et Sider, filiale du groupe Bricodeal, pour deux gros projets de plateformes logistiques, avec respectivement 20 et 47 emplois créés à la clé. Même locale, la logisitique n'est pas épargnée par les nuisances. Le regroupement des activités en un lieu unique apparaît comme une solution. D'autant que la logistique est face à un contexte de plus en plus contraignant sur le plan environnemental : ce qui est vrai pour les modes de transport l'est aussi pour l'immobilier avec les normes HQE (haute qualité environnementale), ICPE (installations classées pour la protection de l'environnement), le Grenelle de l'environnement et une sensibilité plus grande des élus pour la préservation des terres agricoles. De nombreux efforts sont faits pour limiter l'impact, notamment en milieu urbain avec un acheminement par camion électrique comme à Garonor, en région parisienne. François de La Rouchefoucauld a toutefois invité les collectivités à lever certains obstacles à un marché en forte expansion, en particulier "l'envolée brutale des taxes foncières" qui peuvent représenter "jusqu'à 40% des loyers". Il leur demande aussi d'instruire et de délivrer les permis de construire dans des délais plus courts et de ne pas fausser la concurrence en offrant des terrains à certains utilisateurs, de respecter les engagements pris en cas d'alternance politique, de limiter le nombre d'interlocuteurs des différents échelons de collectivités et de créer un guichet unique. Les professionnels de la logistique insistent aussi sur les retombées locales en termes d'emplois. "La logistique est un formidable moyen d'employer des gens qui n'ont pas tous bac +5 et qui ont là une opportunité de trouver du travail, d'évoluer d'une entreprise à une autre", estime Angelina Seekamps Marçais, consultante, pour qui "la logistique n'est plus un mal nécessaire". Le phénomène de tertiarisation de l'économie n'épargne pas la logistique qui emploie de plus en plus dans les activités de service.

Michel Tendil
 

 

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