Transfert de la médecine scolaire aux départements : une proposition de loi sénatoriale relance le débat
Considérant que la médecine scolaire n’est actuellement pas "à la hauteur des enjeux", Françoise Gatel et 50 autres sénateurs proposent d’expérimenter le transfert de compétence aux départements volontaires.
Alors que le Premier ministre a annoncé sa volonté de renforcer la médecine scolaire, avec notamment une revalorisation prochaine du salaire des infirmières scolaires, une proposition de loi (PPL) sénatoriale relance le débat sur une éventuelle décentralisation de cette compétence. Visant à "expérimenter le transfert de la compétence ‘médecine scolaire’ aux départements volontaires", le texte a été déposé le 30 novembre 2023 par la sénatrice Françoise Gatel (UC, Ille-et-Vilaine) et 50 autres sénateurs. Il a été présenté à François Sauvadet, président de Départements de France, et Philippe Gouet, président du Loir-et-Cher, le 14 février 2024, alors que ce transfert de compétence est une ancienne revendication de l’association d’élus.
"En déshérence et faisant face à des ‘difficultés endémiques’, la médecine scolaire n'est pas aujourd'hui à la hauteur des enjeux", peut-on lire dans l’exposé des motifs. "En 2018, seules 18% des visites médicales obligatoires pour la sixième année des élèves ont été assurées", est-il pointé, sur la base d’un rapport sévère de la Cour des comptes datant de 2020 (voir notre article). "Un tiers des postes de médecins de l'Éducation nationale (contractuels compris) sont vacants et le nombre de médecins scolaires a chuté de 15% depuis 2013", signalait ce même rapport. Pour les sénateurs, ces difficultés de recrutement sont "une nouvelle preuve de l'inefficacité de l'organisation de la médecine scolaire".
Un article unique prévoit cette expérimentation sur cinq ans du transfert de la compétence médecine scolaire et des "obligations relatives au bilan de santé et à la promotion de la santé en milieu scolaire". Cela "afin d’assurer la continuité de la prise en charge par les services départementaux de protection maternelle et infantile des enfants scolarisés". Ce transfert de compétence s’accompagnerait d’un transfert de crédits, défini par convention entre l’État et le département expérimentateur, ainsi que d’une mise à disposition du département des services et parties relevant de l’État et contribuant à ces missions.
Un rapport des Inspections générales toujours attendu
En mai 2023, un rapport du député Robin Reda (Renaissance, Essonne) avait plaidé pour un maintien de la politique de santé scolaire sous l’égide du ministère de l’Éducation nationale, jugeant notamment qu’un transfert aux départements "risquerait de complexifier davantage la répartition des compétences en matière de politique éducative" entre État, régions, départements et communes (voir notre article).
Inscrite dans la loi 3DS de février 2022, la remise d’un autre rapport au gouvernement par les Inspections générales (administration, affaires sociales et éducation) a pris du retard. "Il devrait être remis d'ici la fin de l'année 2023", indiquait le gouvernement en novembre dernier, en réponse à une question de juillet 2023 de la députée Céline Brulin (Communiste, Seine-Maritime). Ce retard mais également la "nouvelle occasion manquée" de la loi 3DS – le gouvernement avait alors refusé le transfert aux départements – sont soulignés dans l’exposé des motifs de la PPL par les sénateurs. Ces derniers estiment que l’expérimentation offre "une première réponse concrète" aux difficultés constatées, en permettant "aux territoires qui le souhaitent de s'engager dans cette voie pour assurer une plus grande efficacité de l'action publique".