Téléphonie mobile : l'Arcep retoque la demande de Valocîme d'obliger les opérateurs à négocier

La guerre des pylônes fait rage entre les opérateurs, les towercos et Valocîme, nouvel entrant qui tente d'imposer une augmentation des loyers des sites dont il a repris le bail. Valocîme vient cependant d'être débouté par l'Arcep sur sa demande d'obliger les opérateurs à négocier des conventions.

Au dernier Salon des maires en novembre 2024, le stand de Valocîme alpaguait les élus en leur demandant "vous voulez gagner de l'argent ?". Car la promesse de cette société créée en 2017, positionnée sur le foncier nécessaire aux antennes de téléphonie mobile, est de permettre aux propriétaires des points hauts – communes, bailleurs sociaux, particuliers… - d'obtenir des loyers supérieurs à ceux versés aujourd'hui par les opérateurs ou les gestionnaires d'infrastructures mobiles, les towercos. La société revendique aujourd'hui un portefeuille de 2.700 sites, sur les quelque 70.000 sites mobiles qu'on compte en France. Problème : la cession de bail à Valocîme ne garantit pas aux élus que le pylône accueillera effectivement les opérateurs mobiles. Pire : il y a le risque que le territoire se retrouve avec des services mobiles dégradés comme l'atteste la jurisprudence (lire ci-dessous).

Pas d'obligation des opérateurs à contractualiser

C'est du reste pour obliger les opérateurs à contractualiser que Valocîme a saisi l'Arcep en septembre 2024. Valocîme demandait à l'Arcep d'enjoindre Bouygues Telecom, Orange et SFR à entrer en négociation avec elle afin de conclure des conventions d'hébergement. En clair, il s'agissait d'obliger ces trois opérateurs, soupçonnés d'entente par Valocîme, à maintenir leurs équipements actifs sur les terrains gérés par Valocîme. L'Arcep a estimé qu'elle pouvait intervenir quand un towerco refuse l'accès à un opérateur, mais pas l'inverse, c'est-à-dire quand un gestionnaire d'infrastructure veut forcer des opérateurs à utiliser son pylône. En outre, la loi ne donne pas à l'Arcep le pouvoir d'obliger des opérateurs de téléphonie mobile à utiliser une infrastructure particulière. L'Arcep précise que cette décision ne change rien aux obligations de couverture des opérateurs mobiles.

Le sort de Valocîme suspendu au mandat des opérateurs

Cette décision apparait comme un sérieux revers pour Valocîme, d'autant plus que se profilent de nouvelles obligations qui pourraient freiner sérieusement ses ambitions. En cause, l'article 17 du projet de loi sur la simplification de la vie économique, adopté en avril 2024 par le Sénat, resté depuis en suspend du fait de la dissolution. Ce texte envisage en effet d'imposer à "toute personne, qui n'est pas elle-même opérateur de téléphonie mobile et qui acquiert ou loue un emplacement pour une infrastructure de télécommunication, de joindre à son information un document attestant l'engagement d'un opérateur de téléphonie mobile à exploiter cette infrastructure d'accueil". 
Valocîme pourra-t-il obtenir de force ce mandat ? Rien n'est sûr à ce stade. "En pratique les équipements actifs sont le plus souvent démontés par les anciens tenants du bail et réinstallés sur un nouveau site à proximité", nous explique l'AMF, très sollicitée sur ce dossier. Une multiplication des antennes qui fait enrager les maires mais qui a le mérite de maintenir la couverture mobile. Pour les sites isolés, où l'offre de points hauts est quasi inexistante, Valocîme pourrait en revanche jouer sur les obligations de couverture des opérateurs. Ce n'est du reste pas un hasard si l'échéance des baux des ex-sites zone blanche sont scrutés de près par Valocîme. 

La justice attentive à la couverture mobile

Cette guerre des antennes, principalement entre Valocîme et les towercos (des entités créées par les opérateurs mobiles), génère un abondant contentieux. On notera que la justice prend en compte le risque de créer des zones blanches là où il n'y en avait pas. Dernièrement, la cour d'appel de Bourges a tranché un conflit opposant Hivory, un towerco racheté depuis par Cellnex, et Valocîme. En première instance, la justice avait validé l'expulsion du site d'Hivory demandée par Valocîme, nouveau titulaire du bail. La cour d'appel de Bourges a suspendu cette expulsion en août 2024 au nom du risque pesant sur la couverture mobile. Les juges se sont appuyés sur des affaires similaires pour justifier leur décision, citant le cas de deux territoires où les habitants ont subi des interruptions de service. Hivory a en revanche été condamné à payer les impayés de loyers.

Réf : décision de la cour d'appel de Bourges

 

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