Environnement/Social - Tarification sociale de l'eau : l'instruction est en ligne
Une instruction interministérielle, mise en ligne le 11 mars, précise le champ d'application, le calendrier et les modalités de l'expérimentation "en vue de favoriser l'accès à l'eau et de mettre en œuvre une tarification sociale de l'eau". Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, Philippe Martin, ministre de l'Ecologie, Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique, et Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée à la Décentralisation, avaient annoncé sa signature le 5 mars dernier (lire notre article ci-contre). Il s'agit de "dégager des mesures spécifiques à l'égard des personnes ayant les plus faibles revenus pour éviter qu'elles ne se retrouvent en situation d'impayés", insiste l'instruction. Le document détaille la procédure à suivre par les collectivités locales autorisées à participer à l'expérimentation prévue par la loi Brottes du 15 avril 2013, à savoir les communes ou leurs groupements "assurant tout ou partie des missions constituant un service public d'eau potable ou d'assainissement", ainsi que les départements "au regard de leur compétence en matière d'aides sociales". Les collectivités et leurs groupements volontaires devront être "dans la mesure du possible, représentatifs de différentes typologies de services" (secteurs urbains, touristiques, ruraux, etc.). L'instruction appelle également à la concordance des services en charge de différentes missions (production et distribution d'eau potable par exemple).
Un dispositif dérogatoire
Sont concernés les tarifs de fourniture d'eau et/ou son assainissement des "seules personnes physiques, abonnées directement au service, ou résidant dans un immeuble à usage principal d'habitation abonné au service", signale l'instruction. L'expérimentation, qui s'étalera sur cinq ans, soit jusqu'au 16 avril 2018, peut porter "sur la définition de tarifs tenant compte de la composition ou des revenus du foyer ("tarification sociale de l'eau"), l'attribution d'une aide au paiement des factures d'eau (aide "curative") ou d'une aide à l'accès à l'eau (aide "préventive), dans des conditions économiquement acceptables par tous, c'est-à-dire tant par les différentes catégories d'usagers que par le service". L'instruction insiste sur le caractère dérogatoire du dispositif (fiche n°2 en annexe). La délibération signifiant la volonté de participer à l'expérimentation doit ainsi mentionner "les dispositions législatives auxquelles la collectivité souhaite déroger, le dispositif qu'elle souhaite mettre en place ainsi que sa durée de validité". Les collectivités pourront définir un barème, sur la part variable et/ou la part fixe, "fondé sur la connaissance des caractéristiques des abonnés (ex : catégories d'usagers, personnes bénéficiant de minima sociaux, nombre de personnes dans le foyer), de la typologie de l'habitat (ex : personnes éligibles au logement social) et de leurs consommations". Toutefois, le prix au mètre cube de la tranche de consommation supérieure ne pourra "excéder plus du double du prix moyen du mètre cube pour une consommation de référence" fixée par arrêté à 120 m3 par logement. A titre dérogatoire, le dispositif autorise par ailleurs, le financement par le budget général de la collectivité de tout ou partie du montant de l'aide attribuée pour le paiement des factures d'eau. Enfin, le montant maximal de la subvention attribuée au fonds de solidarité pour le logement (FSL) est porté à 2% pour les collectivités expérimentatrices. Pour rappel, en l'absence d'intervention du FSL, ce versement peut être réalisé au centre communal ou intercommunal d'action social.
Possible généralisation du dispositif
Les collectivités volontaires devront déposer leurs candidatures auprès du préfet de leur département avant le 31 décembre 2014. Il est "souhaitable" que le candidat accompagne sa demande d'une note de présentation générale du projet d'expérimentation et d'une étude détaillée (fiche n°3), recommande l'instruction. Ces éléments, qui permettront en particulier de préciser les impacts budgétaires et les coûts prévisionnels, pourront faire l'objet d'une demande de financement à l'agence de l'eau. Le gouvernement devrait procéder à "au minimum deux publications" de listes des collectivités territoriales autorisées à participer à l'expérimentation.
Le rapport annuel sur le prix et la qualité du service public de l'eau constituera le support d'évaluation de l'expérimentation, établissant "une partie chiffrant les coûts de gestion rendus nécessaires par la mise en œuvre du dispositif d'aide sociale, afin de les comparer au volume d'aides apportées". Pour ce faire, "il serait utile" que la collectivité définisse "en amont l'organisation du suivi et de l'évaluation de l'expérimentation, qui doivent porter sur les coûts des mesures mais qui pourraient s'étendre utilement à l'examen de l'efficacité de ces mesures" (fiche n°4). Un arrêté interministériel fixera les postes de coûts devant nécessairement figurer dans ce chiffrage.
A l'issue de l'expérimentation, le bilan dressé par le Comité national de l'eau "doit permettre, s'il est concluant, de dégager des solutions généralisables à l'ensemble des communes et de leurs groupements compétents en matière d'eau potable et d'assainissement".
Philie Marcangelo-Leos / Victoires-Editions
Référence : instruction du gouvernement du 4 mars 2014 relative à l'expérimentation en vue de favoriser l'accès à l'eau et de mettre en œuvre une tarification sociale de l'eau suite à l'article 28 de la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes.