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Pouvoirs locaux - Statut de Paris et aménagement métropolitain : les députés reprennent la main

L'Assemblée nationale a achevé ce 15 décembre l'examen en séance du projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain. Les députés ont souhaité conforter les objectifs du gouvernement, qu'il s'agisse des évolutions prévues pour la capitale (renforcement des pouvoirs du maire notamment), du Grand Paris (aménagement et transports) ou de l'émergence de nouvelles métropoles. Ce faisant, ils sont revenus sur plusieurs modifications introduites par le Sénat. Avec, au passage, plusieurs dispositions nouvelles, dont la création de la Société foncière solidaire.

L'Assemblée nationale a achevé, jeudi 15 décembre 2016, l'examen en séance publique du projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain. Revenant sur nombre des modifications introduites par le Sénat, les députés ont conforté les objectifs du gouvernement :  ils ont réintroduit dans le texte les dispositions prévoyant la fusion des quatre premiers arrondissements et celles facilitant l'émergence de nouvelles métropoles. Ils ont également réintroduit, sur proposition du gouvernement, la création de la Société foncière solidaire que les sénateurs avaient rejetée lors de l'examen du projet de loi Egalité et Citoyenneté. Ils ont aussi voté plusieurs mesures visant à faciliter la réalisation du projet de transport Grand Paris Express.
Les explications de vote et le vote par scrutin public auront lieu mardi 20 décembre après-midi.

Réforme du statut de Paris

Fusion des quatre premiers arrondissements - Examiné en priorité, l'article qui crée un nouveau secteur regroupant les Ier, IIe, IIIe et IVe arrondissements de la capitale avec un seul maire élu, mais en gardant les codes postaux des 20 arrondissements, a été approuvé, malgré des tentatives d'élus LR pour le supprimer. Au Sénat, à majorité de droite, où l'ensemble de ce texte "relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain" avait été adopté le 9 novembre (voir ci-contre notre article du 14 novembre), cette disposition avait été supprimée.

Renforcement des missions des maires et des conseils d'arrondissement -  La commission a supprimé plusieurs dispositions introduites par les sénateurs visant à renforcer les missions des maires et des conseils d'arrondissement, en revenant tout d'abord sur la création d'une "conférence des maires", composée du maire de Paris et des maires d'arrondissement. Celle-ci devait élaborer et proposer "une stratégie de délégation de compétences de la Ville aux arrondissements". Elle a également supprimé les dispositions déléguant aux maires d'arrondissement le versement de subventions aux associations, l'attribution des logements sociaux et la gestion du service de la petite enfance. Les députés ont également supprimé la possibilité de faire arbitrer par le conseil municipal un éventuel désaccord entre le maire de Paris et les maires d'arrondissement concernant le mode de calcul de la dotation de gestion locale des arrondissements.

Renforcement des pouvoirs du maire - En commission, les députés ont rétabli plusieurs missions du maire de Paris relatives au maintien de l'ordre public. Il est désormais chargé de la police municipale en matière de salubrité sur la voie publique, de salubrité des bâtiments à usage d'habitation (notamment lorsque ces immeubles menacent ruine), et en matière de bruits de voisinage.

Transferts de pouvoirs entre le préfet de police et le maire de Paris - En commission, les députés ont supprimé la disposition sur le transfert de certaines polices spéciales du préfet de police vers le maire de Paris. L'amendement sénatorial prévoyait que le président du conseil régional puisse déterminer les règles de circulation et de stationnement sur certains itinéraires. Il visait tout particulièrement la décision de la maire de Paris de fermer à la circulation automobile les voies sur berges rive droite de la capitale.
Par ailleurs, un amendement adopté en séance reporte, "après concertation avec la préfecture de police et la mairie de Paris", la date d'effet des transferts de pouvoirs entre le préfet de police et le maire de Paris au 1er juillet 2017, à l'exception de la réception des demandes et de la remise des cartes d'identité et des passeports dont le transfert demeure prévu au 1er janvier 2018. "Ce décalage de quelques mois permettra d'accorder plus de temps à la préparation de la mise en œuvre opérationnelle de ces transferts ainsi qu'à l'approfondissement de la concertation sociale, déjà en cours", précise l'exposé.

Création de "clubs de jeux" - Les députés ont autorisé, à titre expérimental pour trois ans, la création de "clubs de jeux" dans la capitale, mesure qui devrait permettre "un assainissement du secteur", selon le rapporteur Patrick Mennucci (PS).

Aménagement, transports et environnement

Création de la  foncière solidaire - Les députés ont adopté en séance un amendement gouvernemental introduisant, via un nouvel article (après art. 37), la création de la Société foncière solidaire. S'il est toujours bien question que la société soit "constituée conjointement par l'Etat et la Caisse des Dépôts", il est précisé dans l'exposé des motifs que "son activité sera portée par l'actuelle Sovafim (soit directement au niveau de la société mère, soit via une filiale), détenue jusqu'ici à 100% par l'Etat et dédiée uniquement à la valorisation du patrimoine de l'Etat, par transformation des dispositions législatives la concernant". Par ailleurs, "les cessions de biens immobiliers effectuées au profit de la Société foncière solidaire pourront bénéficier, dans les conditions de droit commun, de certains avantages fiscaux".
Pour rappel, la Société foncière solidaire avait été annoncée par François Hollande lors du bicentenaire du groupe Caisse des Dépôts, le 12 janvier 2016 (voir notre article François Hollande à la Caisse des Dépôts : mobiliser 3 milliards de plus d'ici à 2017, du 13 janvier 2016), dont les contours ont été tracés par Thierry Repentin, président de la Commission nationale d'aménagement et du foncier (voir notre article La Foncière solidaire serait opérationnelle début 2017 , du 16 septembre 2016). Sa création avait été rejetée par le Sénat le 12 octobre dans le cadre de la discussion du projet de loi Egalité et Citoyenneté (voir notre article Une maille à l'endroit, une maille à l'envers : que restera-t-il du Plec à la fin du jeu parlementaire ? , du 20 octobre 2016). Sa mission : accélérer et simplifier l'acquisition de terrains publics et privés, pratiquer la dissociation foncière auprès des organismes HLM pour, au final, réaliser 50.000 logements, dont la moitié de logements sociaux (voir aussi notre article Foncière solidaire : Pierre-René Lemas précise la position de la Caisse des Dépôts devant les sénateurs , du 31 octobre 2016).

Regroupement universitaire : 5 ans de plus pour l'expérimentation – Les députés ont adopté un amendement gouvernemental créant un nouvel article (après art. 35 bis) visant à "offrir aux établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche (EPESR) qui le souhaitent les moyens de se structurer en vue de participer au développement des aires métropolitaines". En l'occurrence, les établissements membres d'une des formes de regroupement prévu par la loi Fiorasio de 2013 (regroupement en association ou regroupement en Comue / Communauté d'universités et d'établissements) et qui veulent renforcer leur intégration en expérimentant de nouveaux modes d'organisation et d'administration, en dérogeant à certaines dispositions du code de l'éducation, pourront le faire pendant 10 ans (et non plus 5 ans). Voir aussi notre article Université de demain : big is beautiful ? , du 23 novembre 2016.

Grand Paris Aménagement - L'article 37 du projet de loi vise à modifier la composition du conseil d'administration de Grand Paris Aménagement (GPA) principal établissement public de portage foncier et d'aménagement en Île-de-France. Celui-ci étant appelé à évoluer en termes d'aménagement métropolitain, les députés ont voté en séance un amendement gouvernemental permettant au président de l'établissement public d'aménagement Orly-Rungis-Seine Amont (ORSA) d'être membre de droit du conseil d'administration du GPA compte tenu de la fusion avec l'établissement public d'aménagement Plaine de France. Un autre amendement gouvernemental permet la représentation directe ou indirecte des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, "notamment pour répondre au défaut de représentation de la Métropole du Grand Paris", a justifié la ministre du Logement, Emmanuelle Cosse.

Droit d'initiative - En séance, les députés ont voté un amendement gouvernemental visant à corriger une procédure liée au droit d'initiative institué par l'ordonnance n°2016-1058 du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes, qui s'applique aux documents d'urbanisme faisant l'objet d'une évaluation environnementale, à l'exception des documents soumis à concertation obligatoire. Cette exception concerne les procédures d'élaboration et de révision des schémas de cohérence territoriale – Scot – et des plans locaux d'urbanisme – PLU –, mais pas les procédures de modification. Cet oubli a donc été réparé.

Plateau de Saclay - Les députés ont adopté un amendement gouvernemental visant à favoriser la réalisation du projet d'aménagement du pôle scientifique et technologique du plateau de Saclay par l'Institut des sciences du vivant et de l'environnement AgroParisTech et l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et à organiser son financement. AgroParisTech et l'Inra y regrouperont dans un ensemble immobilier commun leurs activités actuellement réparties sur plusieurs sites franciliens. Le maître d'ouvrage de ce projet sera une société dédiée, la société Campus Agro SAS, filiale d'Agro Paris Tech et de l'Inra.

Interdiction de la publicité à proximité des monuments historiques - Un autre amendement gouvernemental voté en séance propose de coordonner l'entrée en vigueur des dispositions prévues par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, en matière d'interdiction de la publicité à proximité des monuments historiques. La nouvelle rédaction de l'article L. 581-8 5° du code de l'environnement a supprimé l'interdiction de publicité à moins de 100 mètres et dans le champ de visibilité des monuments historiques. Or, la nouvelle rédaction du 1° de ce même article a rétabli l'interdiction aux abords, mais seulement à compter du 9 juillet 2020. Par conséquent, entre le 9 juillet 2016 et le 9 juillet 2020, à défaut de mesure de coordination, il n'y aurait plus eu de restriction à l'installation de publicités autour des monuments historiques (moins de 100 m et champs de visibilité).

Candidature de Paris aux Jeux olympiques - Dans le cadre de la candidature de Paris aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, les députés ont adopté un amendement gouvernemental créant la Société de livraison des équipements olympiques et paralympiques (Solideo). Elle prendra la forme d'un établissement public à caractère industriel et commercial et centralisera la totalité des investissements publics -1,5 milliard d'euros – avec pour mission de garantir la livraison, dans les délais fixés par le Comité international olympique (CIO) de l'ensemble des ouvrages et opérations d'aménagement nécessaires à l'organisation des JO si la candidature de Paris est retenue.

Grand Paris Express - En commission, les députés ont voulu compléter la loi du 3 juin 2010 sur le Grand Paris en adoptant plusieurs mesures visant à faciliter la réalisation du réseau de transport public de voyageurs Grand Paris Express (GPE) et à favoriser l'aménagement des quartiers de gare (articles 40 quater à 40 sexies et 40 octies à 40 decies du projet de loi). Les missions de la Société du Grand Paris (SGP) ont ainsi été élargies à l'aménagement de ces quartiers. Les députés ont aussi souhaité que les constructions des gares et des sites de maintenance ou de remisage du GPE soient exonérées du versement de la participation financière prévue par l'article L. 311-4 du code de l'urbanisme. Mais cette mesure a été supprimée en séance.
En commission, les députés ont également proposé d'étendre le recours à l'article 22 de la loi du 3 juin 2010 qui permet de confier à des partenaires publics ou privés un contrat qui porte à la fois sur la conception d'un projet d'aménagement global et sur sa réalisation. Le recours à cet article devient possible pour les opérations d'aménagement ou de construction dans le périmètre desquelles est située une gare appartenant au GPE, au bénéfice des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents, ou après accord de ces collectivités, à la SGP. Les députés ont en outre étendu au projet de GPE la possibilité de déroger aux règles habituelles d'allotissement en recourant à des marchés publics locaux sectoriels. Ils ont aussi souhaité garantir au GPE le bénéfice des assouplissements introduits par l'ordonnance du 3 août 2016 qui permet de cibler l'évaluation environnementale sur les projets les plus "impactants" et qui s'appliquera à ceux pour lesquels la première demande d'autorisation est déposée après le 16 mai 2017. Dans l'hypothèse d'un projet nécessitant la délivrance de plusieurs autorisations - ce qui est le cas du GPE -, la jurisprudence considère que la première demande d'autorisation de chacun de ces projets peut être celle qui conduit à la déclaration d'utilité publique. C'est cette solution jurisprudentielle que les députés ont proposé de transposer. Enfin, les députés ont tenté de répondre aux difficultés rencontrées par la SGP et les maires des communes concernées du fait des horaires d'ouverture des chantiers du GPE. En l'état du droit, les dérogations ne peuvent être accordées que par les préfets. Ils ont donc proposé un dispositif en deux phases : les autorités municipales pourraient délivrer des autorisations dérogatoires aux limites horaires déjà fixées par l'arrêté préfectoral et en cas de carence de ces autorités ou sur demande du maître d'ouvrage justifiée notamment par l'accélération de la réalisation des travaux, le représentant de l'Etat dans le département pourrait se substituer au maire.

Coopération intercommunale

Métropoles -  Le 9 novembre, les sénateurs avaient rejeté des amendements destinés à rétablir un article du texte assouplissant les critères de création des métropoles afin de faire émerger quatre nouvelles entités - en l'occurrence Orléans, Toulon, Dijon et Saint-Etienne. Les députés ont adopté en commission deux amendements afin de faciliter cette émergence. Ces dispositions devraient également permettre d'accorder le statut de métropole aux communautés d'agglomération de Tours et de Clermont-Ferrand, qui rassemblent une population supérieure à 250.000 habitants et sont situées dans une grande zone d'emploi de plus de 500.000 habitants, ainsi qu'à la communauté d'agglomération de Metz, portant le nombre de nouvelles métropoles à sept. 

"Conférence territoriale de l'action publique (CTAP) - Les députés ont adopté en séance un amendement visant à "conforter le fondement légal de l'arrêté préfectoral" qui intègre les présidents des établissements publics territoriaux de la Métropole du Grand Paris dans la composition de la CTAP de la région Ile-de-France.

Police de la circulation - En séance, les députés ont adopté un amendement transférant aux présidents de métropole les prérogatives des maires en matière de police de la circulation et du stationnement en dehors des agglomérations.

Communes nouvelles -  Les députés ont adopté en séance un amendement gouvernemental qui précise la rédaction du dispositif de rattachement des communes nouvelles à des EPCI à fiscalité propre à la suite des amendements adoptés en commission. Il "propose de mettre en cohérence le délai dans lequel, en l'absence de saisine de la commission départementale de la coopération intercommunale, le préfet peut prononcer le rattachement de la commune nouvelle, en le portant à deux mois, par cohérence avec le délai de saisine de la CDCI par des communes et des EPCI à fiscalité propre tiers contestant le souhait de rattachement de la commune nouvelle, qui a lui-même été porté à deux mois par un amendement adopté en commission", explique l'exposé sommaire.