Pouvoirs locaux - Statut de Paris : un projet de loi élargi à bien d'autres sujets et territoires...
Statut de Paris
Le titre Ier vise à réformer le statut de Paris, dans la droite ligne des déclarations de Manuel Valls de juin dernier et du souhait exprimé par le Conseil de Paris dès le début de l'année, tout le monde étant à peu près d'accord pour affirmer que "certains aspects du statut de Paris apparaissent aujourd'hui comme inadaptés aux réalités contemporaines". Principale spécificité parisienne : le fait de rassembler, sur un seul et même territoire, deux collectivités : une commune et un département "intervenant sous la direction d'une même assemblée délibérante et agissant au moyen des mêmes services administratifs" mais avec "deux budgets", rappelle le gouvernement. Complexe et peu lisible. Autres enjeux : la représentativité des conseillers de Paris en fonction des arrondissements, les pouvoirs de police exercés par le préfet de police alors qu'ils sont partout ailleurs confiés aux maires…
Le chapitre 1er vient donc créer une collectivité à statut particulier issue de la fusion de la commune et du département, qui sera dénommée "Ville de Paris", sera pour l'essentiel soumise aux règles de fonctionnement des conseils municipaux, percevra "les recettes dévolues aux communes et aux départements" (qu'il s'agisse de dotations, de péréquation ou de la fiscalité) et sera régie par le cadre budgétaire et comptable M57 aujourd'hui applicable aux métropoles. Un régime indemnitaire spécifique est créé pour les élus. Pour les agents, la réforme ne devrait pas changer grand-chose en termes de statut et d'emploi. La nouvelle collectivité à statut particulier verra le jour au 1er janvier 2019.
Le chapitre 2 regroupe quant à lui les mesures liées aux arrondissements parisiens. A savoir, d'une part, un renforcement des missions confiées aux maires et aux conseils d'arrondissements (en matière de contrats, d'autorisations, d'équipements de proximité…) et, d'autre part, la création d'un secteur qui conduira à la fusion des quatre premiers arrondissements jugés trop petits et trop peu peuplés par rapport aux autres (et donc aujourd'hui surreprésentés au Conseil de Paris).
Le chapitre 3 porte sur le renforcement des prérogatives du maire de Paris dans le champ de la circulation et du stationnement et sur le transfert de certains pouvoirs de police (dans les domaines de la sécurité des bâtiments, du funéraire, etc.). Désormais (à partir du 1er avril 2017), ce sera officiellement la Ville de Paris qui assurera la gestion des demandes de cartes nationales d'identité et de passeports.
Enfin, le chapitre 4 regroupe des dispositions devant renforcer les "capacités d'intervention de l'Etat à Paris et dans son agglomération", notamment sur les emprises des aéroports de Roissy et du Bourget.
Quatre nouvelles métropoles
Le chapitre 4 du titre II "complète les dispositions relatives aux métropoles en permettant à quatre nouveaux EPCI à fiscalité propre de se transformer en métropole", sans que l'exposé des motifs ne précise lesquels sont concernés. Il devrait en principe s'agir de Saint-Etienne (Loire), Toulon (Var), Orléans (Loiret) et Dijon (Cote-d'Or).
Le texte revient en fait sur les conditions fixées par la loi Maptam de janvier 2014 pour accéder au statut de métropole. Il modifie en effet la première des deux dérogations actuelles permettant jusqu'ici à des EPCI ne pouvant pas bénéficier automatiquement du statut de métropole de le devenir : est supprimée l'obligation pour l'ensemble de 400.000 habitants de se trouver dans le périmètre du chef-lieu de région. Il ajoute en outre une troisième dérogation pour les EPCI à fiscalité propre "centres d'une zone d'emplois, telle que définie par l'Insee, comptant plus de plus de 400.000 habitants, et dans le périmètre desquels se trouve le chef-lieu de région".
"Les nouvelles métropoles, ainsi que la métropole de Nancy créée le 1er juillet dernier, auront jusqu'au 1er janvier de la deuxième année suivant leur création pour organiser les transferts ou délégations de compétences avec les conseils departementaux".
Les mesures liées à l'aménagement, aux transports et à l'environnement
Le titre II de l'avant-projet de loi comporte diverses mesures relatives à l'aménagement, aux transports et à l'environnement.
Le chapitre 1er vise "l'amélioration et le développement des outils pour accélérer la réalisation des opérations d'aménagement", selon l'exposé des motifs. Il entend d'abord "simplifier les créations de filiales et prises de participations par les établissements publics fonciers (EPF) et d'aménagement (EPA) et par l'établissement public Grand Paris Aménagement (GPA)" (art. 33). Le dispositif actuel, jugé "relativement lourd et peu lisible", "n'est pas de nature à faciliter la coopération entre ces établissements publics et leurs partenaires privés", relève l'exposé des motifs. Il s'agit donc de faire en sorte que toutes leurs délibérations relatives aux créations de filiales, acquisitions et cessions de participations soient soumises à la seule approbation du préfet exerçant le contrôle de tutelle et non, en plus, par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie, du budget et de l'urbanisme, comme c'est aujourd'hui le cas à chaque fois pour GPA, et, pour les EPA et EPF, lorsque les montants des acquisitions ou des capitaux investis dépassent un seuil fixé par arrêté.
L'article 34 du texte entend insérer une nouvelle section dans le code de l'urbanisme pour stipuler que les statuts d'un EPF ou d'aménagement de l'Etat peuvent prévoir le recours, pour l'exercice de tout ou partie de ses compétences, aux moyens d'un autre de ces établissements. L'objectif est "de faire évoluer ou d'adapter les modes de fonctionnement des établissements, en favorisant les coopérations, dans un objectif de mutualisation et de rationalisation des moyens", indique l'exposé des motifs. Ses conditions d'application à des établissements publics existants seront déterminées par un décret en Conseil d'Etat.
Autre disposition notable de l'avant-projet de loi : la création d'une nouvelle catégorie de société publique locale d'aménagement (SPLA), qui serait "d'intérêt national" (SPLA-IN). Actuellement, les collectivités et leurs groupements peuvent créer des SPLA dont ils détiennent entièrement le capital et qui ne peuvent intervenir que pour leur compte et sur leur territoire. L'Etat et ses établissements publics ne peuvent participer au capital de ces sociétés, "ce qui empêche toute coopération pérenne entre l'Etat et les collectivités en matière d'aménagement", pointe l'exposé des motifs. La nouvelle entité prévue par le projet de loi faciliterait cette coopération pour la réalisation d'opérations d'aménagement, affirme-t-il. La SPLA-IN favoriserait donc un partenariat 'public-public'". Avec un capital qui "pourra être détenu conjointement par les collectivités territoriales et leurs groupements et par l'Etat et ses établissements publics" – l'une des collectivités actionnaires devant détenir une minorité de blocage d'au moins 35% du capital ou des droits de vote -, ces sociétés d'un nouveau type "auront vocation à réaliser des opérations d'aménagement présentant un intérêt local majeur" justifiant l'intervention de l'Etat et des collectivités concernées.
Par ailleurs, pour assurer la représentation de la Métropole du Grand Paris au conseil d'administration de GPA, le texte prévoit une représentation d'EPCI à fiscalité propre à ce conseil et que celui-ci puisse continuer à délibérer dans sa configuration actuelle jusqu'à sa première réunion dans une configuration intégrant une représentation d'un ou plusieurs EPCI (art. 36).
Le chapitre 2 concerne spécifiquement l'aménagement et la gestion du quartier d'affaires de La Défense. Manuel Valls avait annoncé fin mai son intention de transférer l'établissement public d'aménagement de La Défense Seine Arche (Epadesa), l'organe chargé de vendre les droits à construire, de l'Etat vers les collectivités locales. Cet établissement public va également être fusionné avec l'établissement chargé de la gestion de La Défense, Defacto. Cette structure, dirigée par le président Les Républicains du Conseil général des Hauts-de-Seine Patrick Devedjian, était déjà dans le giron des collectivités locales. Pour acter légalement ce transfert, le gouvernement compte agir par ordonnances: une habilitation à légiférer ainsi figure dans l'article 37 du projet de loi afin de créer le futur établissement public local. La répartition des sièges, ainsi qu'une éventuelle transaction liée à l'estimation de la valeur financière de l'Epadesa, restent à déterminer précisément.
L'avant-projet de loi comporte dans son chapitre III plusieurs dispositions relatives aux transports. L'une (art. 38) consiste à ajouter une disposition transitoire à l'ordonnance n°2014-619 du 12 juin 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement. Elle vise à exclure du champ d'application de l'ordonnance "les projets d'infrastructures linéaires de transport ayant fait l'objet d'une enquête publique, préalable à la déclaration d'utilité publique, ouverte avant le 31 décembre 2016." Selon l'exposé des motifs, cette expérimentation s'avère en effet peu adaptée à ces projets "dont la procédure préalable à la déclaration d'utilité publique ou à la déclaration d'utilité publique modificative est particulièrement engagée".
Un autre article (39) prévoit d'étendre les missions de la société du Grand Paris (SGP) à des activités d'exploitation de réseaux de chaleur pour lui permettre de valoriser l'énergie générée par l'exploitation des infrastructures qu'elle va créer. Les articles 40 et 41 concernent le projet de liaison ferroviaire Charles de Gaulle Express, entre Paris et l'aéroport. Le premier ratifie l'ordonnance n°2016-157 du 18 février 2016 relative à sa réalisation tandis que le second ajoute un alinéa à l'article L. 2111-3-1 du code des transports pour définir les modalités de désignation de l'exploitant de CDC Express par voie d'appel d'offres "selon les mêmes modalités que pour le Grand Paris Express".