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Habitat - SOS Racisme pointe les discriminations ethno-raciales dans le logement social

Patrick Karam, délégué interministériel pour l'Egalité des chances des Français d'outre-mer, et Samuel Thomas, vice-président de SOS Racisme, ont présenté, le 4 novembre, un rapport intitulé "Le fichage ethno-racial : un outil de discrimination". Il s'inscrit dans le cadre de la "convention relative au fichage territorial ou ethnique pouvant conduire à des pratiques discriminatoires de recrutement dans les entreprises", signée le 13 novembre 2008 entre les deux organismes. Le rapport porte sur deux grands secteurs : le logement - et plus particulièrement le logement social - et l'emploi (entreprises et secteur de l'intérim). Il fournit peu d'éléments nouveaux, mais constitue une compilation et une analyse transversale des affaires soulevées et traitées par SOS Racisme, qu'elles aient ou non débouché sur des sanctions judiciaires.
Sur le logement, le rapport pointe du doigt les méthodes de certaines agences immobilières, "qui croisent les codes du fichage ethnique avec ceux de la discrimination". Mais il s'attarde surtout sur la constitution de fichiers ethno-raciaux par certains offices HLM. SOS Racisme passe ainsi au crible cinq dossiers que l'association juge emblématiques de ces pratiques. L'office HLM de Vitry-Sur-Seine comptabilisait ainsi le nombre d'"allochtones" par cage d'escalier, tout en définissant des "quotas" à ne pas dépasser. Reconnus par l'organisme lui-même - qui a mis un terme à ces pratiques - et par la Cnil, ces faits ont finalement abouti à un non-lieu, la justice ayant considéré que la preuve du fichage ethnique nominatif n'était pas rapportée "dans la mesure où le tableau incriminé ne comportait pas de données nominatives". L'association a relevé des faits similaires de fichage dans le cas de l'organisme collecteur du 1% logement France Habitation Astria. L'OPHLM du Kremlin-Bicêtre avait pour sa part mis en place une codification officielle chiffrée pour distinguer la nationalité et l'origine - DOM compris - des locataires et des demandeurs de logement. L'existence de ce fichier a été confirmée par un contrôle de la Cnil, mais le juge a considéré qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre dès lors que l'organisme avait renoncé à cette pratique. SOS Racisme a néanmoins demandé que l'organisme HLM soit renvoyé devant le tribunal de grande instance (TGI) pour fichage racial et ethnique des locataires et a incité ces derniers à se porter partie civile. Le cas de l'Opac de Saint-Etienne est différent, dans la mesure où les faits ont été révélés en 2005 par la Mission interministérielle d'inspection du logement social (Miilos). Le système reposait sur l'utilisation de codes couleur, l'origine ethno-raciale étant déterminée sur la base de la consonance du nom. Contrairement aux cas précédents, l'Opac à été condamné par le TGI de Saint-Etienne, le 3 février 2009, à une peine d'amende avec sursis, ainsi qu'à des dommages-intérêts à hauteur de 10.300 euros. Comme le souligne le rapport, "il s'agit là de la première condamnation définitive [l'Opac n'ayant pas fait appel, NDLR] prononcée en France depuis 1978 en répression de l'infraction de fichage racial, et de fichage ethnique des locataires". Enfin, la dernière affaire analysée dans le rapport concerne la société HLM Logirep, mise en examen en juin 2009 pour fichage ethnique des locataires et discrimination raciale.


Jean-Noël Escudié / PCA