Société de confiance : l'Assemblée nationale adopte le texte en nouvelle lecture
L’Assemblée nationale a achevé promptement l’examen en nouvelle lecture du projet de loi pour un Etat au service d’une société de confiance, pressée par un gouvernement impatient de passer au "service après vote". Tandis que le texte sur le droit à l’erreur devrait revenir au Sénat dès le 25 juillet prochain, la discussion est déjà en marche pour dessiner les contours du futur Conseil de la réforme qui sera chargé d’en assurer le suivi.
Les députés ont adopté en nouvelle lecture le projet de loi pour un Etat au service d’une société de confiance. Avant la discussion en séance publique, qui s’est déroulée tard dans la nuit ce 26 juin, la commission spéciale avait déjà très largement restitué sa version de ce texte relatif au droit à l’erreur, jusqu’au titre même, tout en adoptant conformes près d’un tiers des 89 articles encore en discussion suite à l’échec de la commission mixte paritaire (lire notre article ci-dessous). L’hémicycle a donc focalisé son attention sur les quelques points d’achoppement subsistant à ce stade, à l’exemple de la très controversée expérimentation sur la régionalisation des chambres d’agriculture (article 19).
Plus surprenant le retrait des associations cultuelles du champ des représentants d’intérêts (article 38) a également suscité un débat très animé sur les bancs de l’Assemblée, alors que cette disposition était jusqu’à ce stade passée relativement inaperçue. Les tentatives - y compris dans les rangs de la majorité - pour revenir sur cette disposition ont été rejetées de justesse. On notera la suppression de l’article 25 bis A opérée par la voie d’un amendement du rapporteur, Stanislas Guérini, estimant "peu opportun" de modifier les règles relatives à la transparence financière des organismes qui souhaitent faire appel à la générosité publique - et ce trois ans après l'adoption de l’ordonnance n° 2015-904 du 23 juillet 2015 - pour revenir au dispositif antérieur.
Eolien en mer
L’article 34 a fait objet d’un des amendements les plus significatifs du gouvernement "pour tenir compte des résultats des négociations et du calendrier des projets" dans la filière de l'éolien offshore. Il s’agit en particulier de "fiabiliser le dispositif prévoyant la prise en charge des coûts échoués en cas de défaillance du candidat retenu, étant entendu que les conventions de raccordement n’ont pas encore été signées".
La composante du prix de l’électricité correspondant au coût du raccordement au réseau public de transport est supprimée de l’offre du candidat retenu et du tarif d’achat. Le texte introduit aussi la possibilité d’exonérer de redevance d’occupation la concession d’utilisation du domaine public maritime pendant la durée du contrat, étant donné, justifie l’amendement, "que l’activité économique est financée sur cette période par un tarif d’achat garanti à la charge de la collectivité et qu’il est ainsi possible de réduire le niveau du tarif en neutralisant ce transfert".
Les députés ont en outre adopté un amendement LR visant à garantir, en cas d’annulation d’un des six projets attribués avant 2015, la tenue d’un débat public préalable pour les nouveaux appels d’offres. "Cela n’a, vous en conviendrez, plus beaucoup de sens ", a fait remarquer son auteur, Emmanuel Maquet, sachant que le Président de la République a confirmé, à l’occasion d’un déplacement en Bretagne ce 20 juin, la poursuite des six projets, tout en assurant une réduction des coûts pour la collectivité de plus de 15 milliards d’euros, "avant même que nous ayons voté ce dispositif".
L’Assemblée a également modifié à la marge l’article 34 quinquies, en limitant l’application de la procédure d'extrême urgence prévue par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique aux seuls ouvrages des réseaux publics d’électricité,"aucune difficulté ne semblant justifier l’extension aux réseaux de gaz".
Rescrit administratif
Le gouvernement a par ailleurs apporté des précisions s’agissant des nouvelles formes de rescrit prévues à l’article 10, au nombre desquels figurent notamment les taxes d’urbanisme et la redevance d’archéologie préventive. Afin de préserver ce dispositif "contre des risques de demandes de masse ou d’instrumentalisation par des phénomènes de demandes itératives multiples pour des projets non finalisés", le texte propose de limiter à un seul, le nombre de rescrits possibles par projet. Il prévoit en outre de n’englober que les opérations "de plus de 50 000 m² de surface taxable".
Une application rapide du texte
L’examen du projet de loi par le Sénat est programmé le 25 juillet prochain, de façon à permettre sa promulgation "au tout début du mois d’août". Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a également réaffirmé vouloir une application "très rapide" du texte, confirmant "avoir pris les dispositions pour que les premiers décrets puissent être publiés dès la rentrée". Cet engagement vaut également pour le chantier des dix ordonnances que comporte le texte, "en particulier celle qui a trait à la relation de confiance" (article 7), pour laquelle le texte prévoit une promulgation dans un délai de neuf mois. Un comité de pilotage sur le droit à l’erreur pourrait se réunir "tous les mois à partir de septembre". Même suivi pour les neuf expérimentations que compte le texte : "nous choisirons au sein des régions de France parmi les expérimentations que le Parlement a bien voulu autoriser et nous en vérifierons la mise en œuvre sur place et sur pièces (…) Nous irons voir si les horaires décalés sont bien assurés, comme nous l’avons promis, et s’ils fonctionnent ; nous irons voir ce qu’il en est des expérimentations conduites aujourd’hui, parfois inspirées d’hier – comme notre travail sur les URSSAF et la médiation –, mais qui peuvent être étendues demain à d’autres sujets", a précisé le ministre.
Quant au futur "Conseil de la réforme" dont la forme reste à définir, il sera quant à lui chargé du "service après-vote". Le ministre se dit ouvert. "Le choix de l’Assemblée nationale sera le mien" : "S’agira-t-il d’une mission institutionnelle que créera la conférence des présidents de l’Assemblée nationale ou du Sénat ? S’agira-t-il d’un lieu que nous acceptons tous ensemble, comme par un gentlemen’s agreement, et où je m’engage à soumettre des textes et à faire vérifier divers éléments touchant l’administration ?", a-t-il ainsi questionné.