Simplification : le gouvernement veut "renverser la perspective" en plaçant l'usager au centre
Le gouvernement entend "redonner la main" aux usagers des services publics pour encourager la simplification. En visite à Nanterre dans une agence France Travail, un service des impôts et un centre administratif ce vendredi 4 avril, François Bayrou a annoncé que les usagers pourront évaluer les services rendus et interpeller leur administration au guichet et/ou sur une plateforme. Il compte également relancer le programme "Service public+", instaurer au sein de chaque ministère un "contrôleur des normes et des procédures", amplifier le principe de "dites-le-nous une fois".

© @FranceTravail
"Dans une logique d'amélioration continue à hauteur d'homme, pour plus d'humanité, plus de proximité, plus de simplicité, donc plus d'efficacité", le gouvernement entend "redonner la main" aux usagers des services publics pour encourager la simplification, ce "tonneau des Danaïdes" : ces derniers pourront évaluer les services rendus et interpeller leur administration au guichet et sur une plateforme dédiée, mais aussi élaborer des solutions directement avec les agents dans des ateliers.
"Il y a deux portes d'entrées essentielles : l'administration remplit les papiers et l'usager les contrôle", a expliqué François Bayrou ce vendredi 4 avril 2025 à Nanterre, en visitant une agence France Travail, un service des impôts et un centre administratif. "On doit toujours pouvoir parler à quelqu'un", a ajouté le Premier ministre, accompagné de quatre ministres Catherine Vautrin (Solidarités, Travail, Santé), Laurent Marcangeli (Fonction publique et Simplification), Astrid Panosyan-Bouvet (Travail) et Amélie de Montchalin (Comptes publics).
Le gouvernement entend donc remettre au goût du jour un programme d'évaluation nommé "Service public+", lancé par les gouvernements précédents. Le 18 mars 2025, Laurent Marcangeli avait eu l'occasion de remettre le label "Services Publics +" à l'Urssaf Centre-Val de Loire, premier service public à recevoir ce label, piloté par la direction interministérielle de la transformation publique (DITP). Un label qui est aussi proposé aux collectivités territoriales et à leurs établissements (voir notre article du 20 mars 2025).
A chaque point de contact avec le public
A chaque point de contact avec le public - sous-préfecture, brigade de gendarmerie, hôpital, ou caisse d'assurance maladie - les usagers pourront évaluer les délais, l'accueil ou encore la complexité des démarches. Ils pourront également saisir en ligne leur administration sur la plateforme plus.transformation.gouv.fr et rencontrer physiquement des agents administratifs au cours d'ateliers.
"Il y a des choses qui peuvent se gérer à Paris, mais la réalité de la relation entre les Français et les services publics se fait à un endroit donné, en contact avec un agent public donné. Et donc c'est bien à cette maille très fine de l'intimité, du contact entre nos citoyens et les services publics que doivent être apportés un certain nombre de solutions", a expliqué Thierry Lambert, le délégué interministériel à la transformation publique (DITP) lors d'un brief jeudi 3 avril.
Un baromètre de la qualité des services publics sera également réactualisé et "permettra d'avoir un effet très incitatif et d'enclencher une démarche d'amélioration continue", souligne une source gouvernementale. Ce baromètre sera dans l'esprit du baromètre de l'action publique, lancé en 2021 par l'ex ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin (notre article du 6 mai 2021).
Contrôleur des normes dans chaque ministère d'ici l'été
Côté administrations, un "contrôleur des normes et des procédures", haut fonctionnaire, sera nommé dans chaque ministère d'ici l'été pour veiller à la "cohérence et à la visibilité des nouvelles démarches", en faisant "la chasse" aux normes inutiles ou redondantes. Il se peut effet que l'administration ait "commencé à perdre le contrôle des normes", explique une source gouvernementale, avant de rappeler que "la norme découle du travail législatif, du travail parlementaire et du travail des administrations, qui ensuite prennent des textes pour décliner et appliquer ces lois. Ce sera le rôle de ce contrôleur des normes que de reprendre le contrôle qui a été perdu".
Le gouvernement va aussi rétablir un recensement des démarches et appliquer "le principe de "dites-le-nous une fois" (notre article du 27 février), afin de ne pas redemander aux usagers les informations dont disposent déjà d'autres administrations, grâce notamment aux formulaires préremplis, déjà en place pour la déclaration de revenus, ce qui doit également être le cas pour la demande de RSA, l'allocation de certaines bourses scolaires et les pensions de réversion. Ces trois dossiers vont bénéficier de la même logique de pré-remplissage par l'administration, dans les toutes prochaines semaines (voir notre article du 27 février sur la réforme "solidarité à la source").
Un chantier par nature "interministériel"
Ce chantier étant par nature "interministériel", les ministères devront "actualiser" leurs plans de simplification pour déterminer des actions prioritaires susceptibles d'inspirer des "initiatives parlementaires" au-delà du projet de loi de simplification de la vie économique en cours d'examen à l'Assemblée nationale.
Dans la même philosophie d'une simplification qui vient du terrain, le gouvernement met l'accent sur l'existence du dispositif France Simplification qui permet de signaler par le relais des préfets des verrous normatifs, des obstacles locaux et que l'on peut ainsi remonter à l'échelon central, instruire et faire sauter (notre article du 7 février 2025).
Enfin, concernant le déploiement de l'IA dans les services publics, suite aux annonces qui avaient été faites en marge du sommet de l'IA en février dernier (voir notre article du 11 février 2025), de nouvelles mesures "pour poursuivre et amplifier le déploiement de l'IA dans le service public seront annoncées lors du sommet Vivatech" qui se tiendra du 11 au 14 juin 2025.
La simplification répond à trois impératifs
Le gouvernement réaffirme enfin que cette simplification répond à trois impératifs :
- "politique" parce que "la complexité administrative est un des premiers irritants des Français" ;
- "économique" quand les normes représentent environ 4% du PIB, selon un récent rapport du Sénat. Et sachant que le Conseil national d'évaluation des normes évalue leur coût total à 1,6 milliard d'euros pour les collectivités locales ;
- "budgétaire" pour faire des "économies intelligentes", dans le contexte d'un budget contraint par un lourd déficit et par un effort militaire destiné à contrer la menace russe.
Jeudi 3 avril 2025 au Sénat, François Bayrou s'était dit résolu à rendre aux préfets leur "pouvoir de dérogation" pour lutter contre la surproduction de normes et simplifier l'action des collectivités locales. François Rebsamen, ministre de l'Aménagement du territoire, lancera quant à lui à la fin du mois d'avril le "Roquelaure de la simplification", une concertation notamment avec les élus locaux sur des mesures "concrètes" de réduction de la complexité administrative pour les collectivités (notre article du 3 avril 2025). Il recevra le 28 avril les représentants des élus locaux à son ministère, l'hôtel de Roquelaure.