Simi : répondre aux besoins de logement en mobilisant les zones commerciales

Mardi 10 décembre au palais des Congrès, le Salon de l’immobilier d’entreprise (Simi) a mis en valeur le potentiel des zones commerciales, dont le patrimoine déjà artificialisé permettrait d’accueillir de nouveaux logements tout en respectant les injonctions du ZAN. Explications.

Le sujet anime traditionnellement les couloirs du palais des Congrès, qui accueille chaque année le Salon de l’immobilier d’entreprise (Simi). Pour l’édition 2024, la problématique du besoin en logement a une fois de plus fait l’objet de nombreux débats. Dans un contexte relativement morose, marqué par une crise profonde et structurelle, les zones commerciales apparaissent pour beaucoup comme un eldorado dont il suffirait de transformer les mètres carrés pour loger les ménages, les jeunes, les seniors, les travailleurs - en bref, les premiers à voir leur pouvoir d’achat en berne. Un patrimoine s’élevant à 500 millions de mètres carrés artificialisés et utilisés (comprenant parkings, voiries…), issus de l’étalement urbain, qui peuvent constituer des gisements mobilisables. 

À cette fin, l’opérateur immobilier Nhood et les équipes de Ceetrus se sont associés à la Banque des Territoires dans une foncière totalisant cinq actifs à régénérer. Ces derniers représentent 640.000 m2 et un potentiel de création de 3.000 logements. Début 2024, la foncière a en outre annoncé être en mesure d’engager un montant de 1 milliard d’euros sur la transformation d’une dizaine de sites en France. "À Bordeaux, nous avons fait muter un magasin Auchan en une mixité urbaine mêlant le supermarché, du coworking à l’étage et 135 logements à proximité immédiate", a expliqué Antoine Grolin, président de Ceetrus et Nhood. Dans une zone commerciale du côté de Grande-Synthe (Nord), la foncière est propriétaire de 47 ha qui accueilleront bientôt 1.200 logements en plus des commerces et d’espaces renaturés. Du côté de la métropole de Lille, sur une ancienne friche des 3 Suisses, ce sont 700 logements, un Ehpad, des résidences étudiantes et un hôtel qui ont vu le jour. 

Des mesures dérogatoires pour mieux expérimenter 

La transformation des zones commerciales suscite l’engouement des acteurs, a affirmé Christophe Bouillon, maire de Barentin (Seine-Maritime) et président de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, ainsi que de l'Association des petites villes de France (APVF). Il faut dire que la solution bénéficie d’un alignement politique depuis septembre 2023 et la décision du gouvernement alors en place de lancer un plan de transformation des zones commerciales par la voix des ministres Patrice Vergriete (Logement), Olivia Grégoire (Entreprises), et Christophe Béchu (Transition écologique et Cohésion des territoires) - voir notre article. "Initialement prévue à 26 millions d’euros, l’enveloppe budgétaire dédiée a été portée à 34 millions !", a rappelé Christophe Bouillon. 

Pour massifier et faciliter le recours à ce type d’opération qui bénéficie souvent à l’habitat, il conviendrait de lever plusieurs freins. Le premier d’entre eux est réglementaire : "En France, les permis de construire s’obtiennent en six ans ! Les réglementations sont rigides, or, la régénération a besoin d’agilité. Il manque du logement partout en France ! Pour y remédier, des lois expérimentales pourraient être mises en place. Il ne s’agit pas de passe-droit mais, au même titre que durant les Jeux olympiques de Paris 2024, des mesures dérogatoires pourraient voir le jour", plaide Christophe Bouillon. Une proposition à laquelle ont souscrit les autres intervenants présents lors du débat. 

Outre le fardeau administratif, David Lestoux, urbaniste et sociologue, préconise de s’inspirer des succès d’Action cœur de ville (ACV) : "Ce programme a initié une nouvelle manière de penser la ville. Sur nos zones commerciales, il faut continuer de travailler au-delà des silos en mettant la ville et l’agglomération autour de la table. La transformation nécessite un travail à plusieurs mains avec des partenariats public/privé solides." En sachant que la phase 2 du programme ACV met précisément l'accent sur la requalification des entrées de villes et transformation des zones commerciales (voir nos articles ci-dessous) et qu'une phase 3 a été évoquée ces 9 et 10 décembre dans le cadre des Rencontres Cœur de villes... Rencontres au cours desquelles a précisément été questionnée l'acceptabilité de la création de logements sur ces zones (voir notre article de ce jour).