Archives

Euro 2016 - Sécurité des fans zones : les villes-hôtes mises sous pression

A deux semaines du coup d'envoi de l'Euro 2016, le ministre de l'Intérieur a assuré, mercredi, que les enseignements ont été tirés suite aux incidents du match OM-PSG. Près de 90.000 personnes seront mobilisées pour assurer la sécurité de l'événement, a-t-il dit, lors d'une présentation à la presse du dispositif mis en oeuvre. Bernard Cazeneuve a aussi justifié son choix de maintenir les "fans zones". L'Etat y contribuera à hauteur de 8 millions d'euros.

Après le match OM-PSG de samedi soir au Stade de France, au cours duquel de nombreuses failles du dispositif de sécurité ont été observées, "les enseignements ont été tirés", a tenu à rassurer le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, mercredi 25 mai, lors de la présentation du dispositif de sécurité pour l'Euro 2016. "Je rappelle qu'il y a eu sept match-tests et qu'un seul a posé problème", a-t-il dit, ajoutant que la finale de la Coupe de France n'était "pas en configuration Euro 2016".
Ce match au Stade de France (qui avait été l'une des cibles des attentats du 13 novembre 2015), a été émaillé de plusieurs incidents, notamment des débuts d'incendies et l'intrusion de fumigènes, de casques ou encore de bouteilles en verre… A l'issue d'une réunion avec les organisateurs, "il a été décidé de corriger sans tarder les dysfonctionnements" en vue de l'Euro 2016 qui se déroulera du 10 juin au 10 juillet : "garantir la fluidité" des supporters à l'entrée, "fiabiliser les contrôles d'accès" et "sécuriser les sorties de match".
Outre le changement de contexte, la grande différence de l'Euro 2016 avec la Coupe du monde de 1998 en termes opérationnels tient à l'instauration d'un "deuxième périmètre de sécurité autour des stades", a précisé le président de l'Euro 2016 SAS, Jacques Lambert.

90.000 personnes mobilisées

A deux semaines du coup d'envoi, le ministre de l'Intérieur a assuré que la mobilisation de l'Etat, mais aussi des dix villes-hôtes* et des organisateurs était "totale". Ce dispositif de sécurité, qui va mobiliser au total quelque 90.000 personnes, repose sur une véritable "coproduction entre ces trois acteurs", a-t-il souligné. Du côté de l'Etat, plus de 77.000 fonctionnaires sont sur les rangs : 30.000 gendarmes, 25.000 policiers, 5.000 de la police aux frontières, 2.000 CRS, 10.000 de la préfecture de police, 5.200 de la sécurité civile, dont 2.500 sapeurs-pompiers et 300 démineurs. A cela, s'ajoutent 13.000 agents de sécurité privée, 1.000 bénévoles des associations de secourismes. Sans compter les agents de police municipale que les villes-hôtes mettront à contribution…
Concrètement, l'Etat est en charge de la sécurité aux abords des stades. A l'intérieur des enceintes, la sécurité est de la responsabilité des organisateurs. La sécurité à l'intérieur des 24 camps de base des équipes et des hôtels de transferts revient aux équipes nationales et à l'organisateur. Une quinzaine d'agents contrôleront les accès des hôtels d'équipe le jour et une dizaine la nuit, a précisé Jacques Lambert. A noter que la sécurité des joueurs lors des transports est du ressort l'Etat. Enfin, les villes-hôtes sont responsables de l'organisation des fans zones, notamment des contrôles d'accès, avec l'aide d'agents privés (le sujet avait fait l'objet d'une instruction interministérielle du 5 mars 2016). Les fans zones sont des lieux officiels de retransmission des matchs sur écrans géants où la mairie peut organiser des animations annexes. Elles devraient rassembler entre 20.000 et 100.000 personnes pendant le tournoi.

8 millions d'euros de soutien pour les villes-hôtes

Critiqué sur sa décision de maintenir ces zones, le ministre de l'Intérieur a justifié son choix. "Sauf menace circonstanciée, ces fans zones seront maintenues, selon un protocole de sécurité adapté", a-t-il insisté. "J'entends les objections formulées par ceux qui considèrent que ces fans zones auraient dû être abandonnées, mais dans ce cas, comment escompteraient-ils que la sécurité de supporters dispersés en tous points d'une ville (…) puisse être assurée ?", a argué Bernard Cazeneuve.
Alors que le contexte des attentats, accentué encore par le climat social très tendu en France, pourrait dissuader des supporters de venir, le maire de Saint-Etienne, Gaël Perdriau, représentant le Club des villes de l'Euro 2016, a voulu faire retomber la tension : "Nous, les maires de dix villes hôtes, attendons cet événement avec beaucoup d'impatience, c'est un événement qui permettra de mettre en valeur nos territoires, notre pays." "Les fans zones sont des lieux fermés où des palpations de sécurité auront lieu sur l'ensemble des portes d'entrées", avec des détecteurs de métaux, a-t-il garanti. Il a également remercié le ministre pour le soutien financier de l'Etat qui assurera 80% du coût des caméras nécessaires et 100% du surcoût lié aux mesures complémentaires de sécurisation de ces fans zones. La participation de l'Etat s'élèvera à 8 millions d'euros au profit des villes-hôtes dont 1,9 million au titre de la vidéoprotection. Au total, la sécurisation des fans zones coûtera 24 millions d'euros, a précisé le ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Patrick Kanner. Mais "l'Euro 2016, ce ne sont pas seulement des coûts, c'est 1,3 milliard d'euros de retombées sur l'activité économique", a-t-il dit.

Des arrêtés anti-alcool

Les forces de l'ordre assureront la sécurité à l'extérieur des fans zones mais pourront également intervenir à l'intérieur, soit sur demande de la mairie soit de leur propre initiative. Le ministère de l'Intérieur précise que la vente de boissons alcoolisées sera possible dans les fans zones, mais le maire, le président de la métropole ou, à Paris, le préfet de police, prendront les arrêtés adéquats pour interdire l'accès du site "aux spectateurs qui seraient déjà en possession d'alcool".
En dehors des fans zones, réservées aux villes-hôtes, se pose aussi la question de la sécurisation des zones de supporters plus classiques dans les autres villes, avec l'installation d'un écran géant dans un lieu public. Bernard Cazeneuve a indiqué avoir exigé que ces retransmissions "ne se déroulent pas dans des espaces publics ouverts, mais dans des lieux clos dont l'accès pourra être contrôlé". Il pourra s'agir de stades, de salles omnisports, de salles de spectacles, de parcs d'exposition… "Les retransmissions dans des espaces non sécurisés ne seront pas autorisées", a-t-il insisté.
2,5 millions de spectateurs sont attendus dans les stades pendant la durée du tournoi et 8 millions de supporters dans les plus grandes villes de France, dont 2 millions d'étrangers.
Mardi, le ministre de l'Intérieur avait déjà eu l'occasion de présenter le dispositif de sécurité qui sera mis en place pendant le Tour de France qui partira au pied du mont Saint-Michel le 2 juillet. A noter que sur le plan législatif, l'état d'urgence a été une nouvelle fois prolongé à compter du 26 mai, pour une durée de deux mois, afin d'assurer la sécurité de ces deux événements. Ensuite, c'est la loi Urvoas dite de procédure pénale qui prendra le relais en intégrant dans le droit commun des mesures s'inspirant de l'état d'urgence : le Parlement a définitivement adopté le texte ce mercredi 25 mai.

Michel Tendil

* Lille, Lens, Paris, Saint-Denis, Lyon, Saint-Etienne, Bordeaux, Toulouse, Marseille et Nice.