Secrétaires généraux de mairie : le mode d'emploi de la réforme se précise

La loi revalorisant les secrétaires de mairie et ses décrets de mise en oeuvre doivent être éclairés par une circulaire en cours de préparation. Champ d'application, mise en œuvre des nouveaux dispositifs de promotion, de l'"accélérateur de carrière" et de l'obligation de nommer un secrétaire général de mairie… Les objectifs et de nombreuses mesures de la réforme font l'objet d'une explicitation dans ce document encore provisoire que Localtis a pu consulter. Tour d'horizon.

Champ d'application, mise en œuvre des nouveaux dispositifs de promotion, de l'"accélérateur de carrière" et de l'obligation de recrutement en catégorie B à partir de 2028… Une circulaire doit prochainement venir répondre aux interrogations des agents et des employeurs territoriaux sur la réforme visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie. Les attentes de ces derniers à l'égard du document préparé par la direction générale des collectivités locales (DGCL) sont grandes, car la loi du 30 décembre 2023 et ses quatre décrets d'application du 16 juillet 2024 (voir notre article dédié à ces textes) comportent de nombreuses zones d'ombre. 

Présenté lors d'une réunion qui rassemblait le 17 septembre des représentants des employeurs et des personnels territoriaux, le projet de circulaire aux préfets – qui comporte 16 pages, dont une d'annexe – a un double objet : "préciser les modalités de mise en œuvre de cette réforme" et "rappeler le respect de certaines règles statutaires".

Champ d'application

"La réforme s’applique à l’ensemble des fonctionnaires territoriaux exerçant ou susceptibles d’exercer la fonction de secrétaire général de mairie", indique, après une brève introduction, ce document provisoire - donc susceptible d'évoluer - que Localtis s'est procuré. "Elle a vocation à bénéficier à tous les secrétaires généraux de mairie quelle que soit leur autorité d’emploi" - les communes bien sûr, mais aussi les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) avec ou sans fiscalité propre et les centres de gestion de la fonction publique territoriale, précise-t-il.

Mais les dispositions de la loi ne sont pas applicables à l'ensemble des secrétaires généraux de mairie (les secrétaires de mairie étant dénommés ainsi depuis le 1er janvier). La DGCL le confirme : les agents de catégorie C relevant du premier grade (dit C1) sont exclus des bénéficiaires. Ces derniers sont pourtant plusieurs milliers, selon les syndicats. Et le principal défaut de la réforme consiste à ne pas les prendre en compte, critiquent ces derniers, en pointant la responsabilité des employeurs. Ceux-ci ont recruté des secrétaires de mairie de catégorie C sur le premier grade en dépit de l'interdiction posée par un décret de 2006. La DGCL le réaffirme : "En principe, les agents de la catégorie C1 ne peuvent exercer une fonction de secrétaire général de mairie, réservée aux titulaires des grades d’avancement C2 et C3." La Place des Saussaies souhaite que ce principe soit connu des maires. "Vous veillerez, dit-elle aux préfets, à rappeler aux employeurs territoriaux qu’il ne leur est pas permis de recruter des secrétaires généraux de mairie en catégorie C1." Et la situation n'est pas nécessairement immuable. "Dans l’esprit de la loi, vous les inviterez, le cas échéant, à procéder aux avancements de grade des agents occupant aujourd’hui les fonctions de secrétaire général de mairie en catégorie C1 dès lors que ces derniers remplissent les conditions pour en bénéficier", indique l'administration centrale aux représentants de l'État. 

Les dispositions de la réforme "ne sont pas davantage applicables aux agents contractuels" exerçant la fonction de secrétaire général de mairie (qui représentent 20% des effectifs), à l'exception toutefois de la formation statutaire obligatoire au premier emploi. 

Obligation de nommer un secrétaire général de mairie

La loi oblige les maires des communes de moins de 3.500 habitants à nommer un agent chargé des fonctions de secrétaire général de mairie (mais dans les communes de plus de 2.000 habitants, le maire peut préférer nommer un agent sur un emploi fonctionnel de directeur général des services). Cette obligation a des conséquences pour les employeurs territoriaux : ils sont "tenus" de formaliser la nomination de l'agent chargé des fonctions de secrétaire général de mairie. Et ce, "tant pour les agents déjà en poste que pour les recrutements à venir", qu'il s'agisse de fonctionnaires ou de contractuels. L'exercice prendra la forme d'un arrêté ou d'une décision procédant à la désignation de l’agent communal chargé de la mission de secrétaire général de mairie.

"Plan de requalification" des agents de catégorie C

Pour rappel, ce dispositif exceptionnel ouvre la possibilité aux secrétaire généraux de mairie de catégorie C et titulaires d’un grade d’avancement (C2 ou C3) de bénéficier, d’ici le 31 décembre 2027, d’une promotion au choix en catégorie B, sans qu’une proportion de postes ouverts à la promotion soit préalablement déterminée, dérogeant ainsi aux principes qui régissent la promotion interne. La circulaire précise que le changement de dénomination des "secrétaires généraux de mairie" est "sans incidence" sur le calcul de la durée d’ancienneté requise pour bénéficier de la mesure (quatre années de service dans les fonctions de secrétaire général de mairie). Les services accomplis antérieurement en qualité de secrétaires de mairie sont bien pris en compte. "De même, le calcul de cette durée d’ancienneté peut prendre en compte l’exercice des fonctions de secrétaire général de mairie accompli en tant qu’agent contractuel ou comme adjoint administratif relevant de la catégorie C1", détaille le document.

Lorsque le secrétaire général de mairie exerce ses fonctions à temps non complet auprès de plusieurs communes - ce qui est le cas de plus de 60% des agents concernés -, il reviendra à "la collectivité ou l’établissement auquel le fonctionnaire consacre la plus grande partie de son activité" de formuler la proposition d’inscription sur la liste d’aptitude. Mais la durée de service réalisée par le secrétaire général de mairie peut être la même dans plusieurs collectivités ou établissements : dans ce cas, "l'autorité territoriale qui l'a recruté en premier" initiera la proposition d'inscription sur la liste d'aptitude. En cas de désaccord entre les autorités territoriales, "la proposition d’inscription devra recueillir l'accord des deux tiers au moins des autorités concernées, représentant plus de la moitié de la durée hebdomadaire de service effectuée par l'agent ou de la moitié au moins des autorités concernées représentant plus des deux tiers de cette durée".

Afin de donner au plan de requalification "toute sa portée", la DGCL exhorte les préfets à "en diffuser les modalités auprès de tous les maires concernés, en les invitant à s’en saisir le plus largement possible".

"Formation-promotion"

Ce dispositif pérenne de promotion s'adresse lui aux agents territoriaux de catégorie C relevant de grades d’avancement (C2 ou C3) qui n’occupent pas la fonction de secrétaire général de mairie, mais qui souhaitent l’exercer. A condition de justifier d’au moins huit ans de service public effectif, ils pourront être promus en catégorie B, après avoir suivi une formation qualifiante sanctionnée par un examen professionnel. Les années de service accomplies comme agent contractuel pourront être comptabilisées pour le calcul de l'éligibilité au dispositif.

Après la réussite à l'examen professionnel, le fonctionnaire ne pourra être recruté par une commune que sur un emploi de secrétaire général de mairie. Une fois nommé, il devra exercer cette fonction pour une durée minimale de trois ans à compter de sa titularisation (laquelle intervient à l'issue d'une période de stage de six mois).

La DGCL précise à ce sujet que cette durée minimale d’exercice des fonctions ne sera "pas proratisée au temps de travail effectif". Ainsi, "un fonctionnaire promu au grade de rédacteur territorial qui exercerait l’emploi de secrétaire général de mairie à temps non complet ne [verra] pas la durée d’exercice des fonctions proratisée à due concurrence". En outre, si une autre collectivité venait à recruter le fonctionnaire ayant bénéficié de la "formation-promotion" avant le délai de trois ans après sa titularisation, la collectivité de départ pourra demander à la collectivité recrutant l’agent de lui verser une indemnité (en application du droit existant).

"L'accélérateur de carrière"

Le législateur a accordé aux secrétaires de mairie "un avantage spécifique d’ancienneté" qui leur permet à diverses étapes de leur carrière de bénéficier plus rapidement d'un avancement d'échelon. Il comporte "un double mécanisme de bonification d’ancienneté, l’un obligatoire et automatique, l’autre facultatif, fondé sur la valeur professionnelle de l’agent". Les syndicats sont vent debout contre ce dernier, l'accusant notamment d'être "à la tête du client" (voir notre article).

Concernant le dispositif dans son ensemble, la circulaire précise que le calcul de la durée d’ancienneté (huit ans de service pour le mécanisme automatique) "prend en compte, le cas échéant, l’exercice des fonctions de secrétaire général de mairie accompli en tant qu’agent contractuel ou comme adjoint administratif relevant de la catégorie C1". Cet avantage "peut donc également bénéficier aux fonctionnaires qui ont pu, par le passé, exercer les fonctions de secrétaire général de mairie en cette double qualité", poursuit-elle.

Le dispositif qui est à la main des employeurs est, lui, "conditionné à la manière de servir". Il prévoit que "les fonctionnaires exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie peuvent bénéficier, par période d'au moins trois années de service dans ces fonctions, d’une bonification d'ancienneté d'une durée comprise entre un et trois mois". Si l’agent exerce son activité (à temps non complet) auprès de plusieurs employeurs, "la décision d’attribution de l’avantage spécifique d’ancienneté supposera un accord entre eux", suivant les règles de droit commun issues du décret du 20 mars 1991 portant dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps non complet.

Les bonifications au titre de l'un et de l'autre dispositif peuvent être cumulées et "prendre effet de manière rétroactive, dès le 1er août 2024", indique encore la circulaire.

Part de promotion interne réservée

Le chantier réglementaire conduit dans le cadre de la réforme n'est pas achevé, apprend-on également. Un projet de décret est en cours de préparation pour traduire le souhait du législateur de "faire en sorte que les listes d’aptitude à la promotion interne comprennent nécessairement une part de fonctionnaires exerçant les fonctions de secrétaire général de mairie". Ce projet de décret, qui "doit encore faire l’objet de concertation préalable", a pour objet de fixer cette part de promotion interne réservée aux secrétaires généraux de mairie. La DGCL affirme qu'"il interviendra d’ici la fin de l’année 2024 afin d’être applicable aux promotions de l’année 2025".

Pour finir, la DGCL demande aux préfets d'"inviter" les maires "à s’emparer sans délai de toutes les dispositions de la loi de nature à favoriser la carrière des secrétaires généraux de mairie et l’attractivité de cette profession".