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Rodéos urbains, atteintes aux policiers... ce qu'il reste de la loi Sécurité intérieure

Bien qu’amputée de l’expérimentation des drones par les policiers municipaux, la loi Sécurité intérieure parue au Journal officiel comporte nombre de mesures intéressant la police municipale et les pouvoirs du maire.

La loi "responsabilité pénale et sécurité intérieure" est parue au Journal officiel le 25 janvier privée de sa principale disposition concernant les polices municipales : à savoir l’expérimentation pendant cinq ans des drones et caméras aéroportées. Ainsi en a décidé le Conseil constitutionnel (voir notre article du 21 janvier 2022).

Le texte adopté par le Parlement le 16 décembre visait à répondre à l’émotion suscitée par l'absence de procès dans l'affaire Sarah Halimi. L’occasion de faire revenir par la fenêtre, en les entourant de garde-fous, toute une série de mesures déjà retirées dans la précédente loi Sécurité globale. Alors qu’en reste-t-il ? La loi comporte tout d'abord plusieurs dispositions visant à alourdir les peines pour les atteintes aux forces de sécurité y compris les policiers municipaux. Ainsi les atteintes commises contre les gendarmes, policiers, militaires de l’opération Sentinelle, policiers municipaux et gardes champêtres, sapeurs-pompiers, douaniers et gardiens de prison ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) de plus de huit jours sont passibles de sept ans d'emprisonnement et de 100.000 euros d'amende. Pour les ITT de moins de huit jours la peine est de cinq ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende.

La loi punit des mêmes peines les atteintes commises contre les proches de ces agents (conjoint, ascendants ou descendants en ligne directe ou "toute autre personne vivant habituellement à leur domicile") ou les personnes qui dans l'exercice ou du fait de leurs fonctions sont placées sous l’autorité de ces mêmes agents.

Rodéos motorisés

La loi cherche aussi à renforcer la répression contre les "rodéos motorisés" en venant compléter la loi du 3 août 2018. Elle double la peine prévue pour refus d’obtempérer. Ainsi, "le fait, pour tout conducteur, d'omettre d'obtempérer à une sommation de s'arrêter émanant d'un fonctionnaire ou d'un agent chargé de constater les infractions et muni des insignes extérieurs et apparents de sa qualité est puni de deux ans d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende". La peine peut être assortie d’une suspension du permis de conduire pendant trois ans maximum, de travaux d’intérêt général ou encore de "la confiscation du véhicule dont le condamné s'est servi pour commettre l'infraction", sauf si le véritable propriétaire est en capacité de prouver sa bonne foi, de "la confiscation d'un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné", de l’obligation de suivre un stage auprès de la sécurité routière, de l’immobilisation du véhicule. La "bonne foi" du propriétaire "est appréciée notamment au regard d'éléments géographiques et matériels objectifs". Une précision due à la députée Natalia Pouzyreff, co-auteure d’un rapport sur les rodéos. Constatant le faible nombre de confiscations au regard des condamnations (une sur quatre environ), la députée a ainsi voulu faciliter la caractérisation de la mauvaise foi des propriétaires qui mettraient leur véhicule à disposition. Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100.000 euros si les faits exposent à un risque de mort ou de graves blessures.
À noter également : lorsqu’un véhicule motorisé non homologué est loué, le contrat de location devra intégrer "son numéro d’identification" ainsi que "le numéro d’immatriculation du véhicule servant à le transporter". Le délai permettant de constater l’abandon d’un véhicule (en fourrière) est abaissé de 15 à 7 jours, avant d’être "livré à la destruction".

Caméras-piétons, drones, caméras embarquées

La loi comporte de nombreuses dispositions sur l’usage des technologies. Les images issues des caméras-piétons de policiers nationaux, de gendarmes ou de policiers municipaux devront désormais être effacées au bout d’un mois au lieu de six (article 14). Après l’échec de la loi Sécurité globale, la loi parvient cette fois à donner un cadre à l’usage des drones (article 15), en tenant compte de la dernière décision du Conseil constitutionnel (hors police municipale donc). Les drones peuvent être utilisés pour la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens "dans des lieux particulièrement exposés", la sécurité des rassemblements de personnes, la prévention d’actes de terrorisme, la régulation des flux de transport, la surveillance des frontières, le secours aux personnes. Le texte comporte aussi des mesures sur les caméras embarquées (article 17) permettant notamment aux sapeurs-pompiers (mais aussi aux policiers, gendarmes, douaniers, militaires investis dans la sécurité civile) d’enregistrer leurs interventions dans les lieux publics "lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances ou au comportement des personnes". Drones comme caméras embarquées ne peuvent comporter de dispositif de reconnaissance faciale.

A noter enfin une extension des amendes forfaitaires pour les vols à l’étalage et des mesures sur la justice des mineurs non accompagnés (si le juge des enfants ou le juge des libertés et de la détention estime que la personne qui lui est présentée est majeure, il peut renvoyer le dossier au procureur, tout en la plaçant en détention provisoire).

Référence : loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, JO du 25 janvier 2022.

 

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