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Finances publiques - RGPP : les raisons de la colère des maires

"L'Etat ne joue plus son rôle." 84% des 181 maires interrogés par l'Association des petites villes de France (APVF) sur les impacts et les conséquences de la Révision générale des politiques publiques considèrent que la RGPP a eu un effet négatif sur l'efficacité des services déconcentrés de l'Etat. Seuls 4% d'entre eux l'évaluent comme ayant eu un impact positif sur leurs services publics locaux.
Selon l'APVF, le rôle de l'Etat devrait consister "à apporter une impulsion pour l'avenir des territoires visant à dépasser les inégalités". Des inégalités qui depuis l'application de la RGPP ne semblent que progresser, qu'il s'agisse de santé, de la sécurité ou de justice. Et l'Association de se faire porte-parole de ces maires (52% des élus interrogés) qui ont connu dans leur commune une baisse des effectifs au sein de ces services publics et qui relaient un sentiment d'abandon des politiques de droit commun. Les conséquences de l'application de la RGPP se font cruellement ressentir dans les petites villes : les nombreuses fermetures de petits hôpitaux (11%), maternités (6%), prisons et casernes (12%), commissariat (12%), gendarmeries (21%), juridiction (38%), préfectures et sous-préfectures (2.107 postes supprimés en 3 ans), ont contraint 22% des communes à embaucher pour pallier ces manques et compenser les baisses d'effectifs dans les services publics. "Ces embauches sont clairement un transfert de charge insidieux de l'Etat vers les communes", dénonce l'APVF. Et celle-ci de souligner que des territoires entiers cumulent l'ensemble des méfaits apportés par la RGPP (Marmande, Joigny, Guéret, Lure, tous asphyxiés par les réformes successives).

"La RGPP engendre un cercle vicieux"

Prises à la gorge et mises devant le fait accompli, les petites villes doivent faire preuve de créativité pour mettre en place de nouveaux services (embauche de policiers municipaux, d'agent d'urbanisme, création de centre de santé, système de télé-relais...). Des ruses de Sioux pour masquer le manque, pour pallier l'abandon de l'Etat sur ces territoires. Mais les coûts sont élevés, les impôts doivent être augmentés pour financer ces initiatives parallèles de droit commun indispensables. Pourtant, 67% des maires interrogés considèrent qu'aucun accompagnement n'a été proposé par l'Etat pour diminuer l'impact de ces fermetures. "La RGPP engendre un cercle vicieux", affirme l'APVF.
L'étude a été réalisée en mars-avril 2011 auprès des petites villes - alors même, rappelle l'APVF, que la mission sénatoriale sur les conséquences de la RGPP pour les collectivités continuait de mener ses auditions (voir nos articles ci-contre). Si le bilan dressé par les élus est donc plutôt catastrophique, l'APVF tient à rappeler qu'elle a pourtant "constamment montré son souci de modernisation des services publics et l'impératif d'une réforme de l'Etat". A l'origine des critiques des maires, selon l'APVF : le manque de concertation. Une affirmation corroborée par pas moins de 87% des maires interrogés (qui évoquent une concertation inexistante, insuffisante ou passable). Cette absence de concertation, note l'association, était d'ailleurs "assumée par les pilotes de la réforme" : "Si nous avions adopté des méthodes classiques de préparation de la décision (…), nous en serions à 5% du chemin parcouru. Les mesures ont été prises dans un cercle assez restreint mais le président de la République et le gouvernement ont la double légitimité du suffrage universel", a eu l'occasion de déclarer Claude Guéant, cité par l'APVF.
Et maintenant ? Pour 74% des maires interrogés, il faut avant tout réclamer une pause dans le processus de la seconde phase annoncée de la RGPP. Et l'APVF de réaffirmer "la nécessité impérative d'un vrai dialogue et d'une véritable concertation entre l'Etat et les élus locaux pour aborder toutes ces questions". Des questions... et des dommages collatéraux pour des petites villes qui souhaitent que l'on reparle d'un "bouclier de services publics" pour "redonner une réalité au principe d'égal accès au service public".