Archives

Aménagement numérique - Réseaux d'initiative publique : une nouvelle dynamique en cours

Le quatrième observatoire des réseaux d'initiative publique (RIP, réalisé par la Firip en partenariat avec la Caisse des Dépôts), s'intéresse à l'apport des RIP pour les territoires et sur l'ensemble de la filière, en termes de dynamisme et de compétitivité. Malgré les inquiétudes et les ralentissements, 2015 reste globalement positive pour la filière bien qu'en deçà des attentes. Pour les territoires, les entreprises et les particuliers, les RIP s'imposent de plus en plus comme des investissements vitaux.

L'observatoire des RIP 2016, présenté le 21 avril dernier à Strasbourg, a été l'occasion d'objectiver le ressenti parfois négatif qu'a laissé sur les réseaux d'initiative publique (RIP) l'année 2015. Porté par la Fédération des industriels des RIP (Firip) en partenariat avec la Caisse des Dépôts, l'observatoire est un outil de suivi de l'impact économique des RIP au niveau des territoires, et permet, plus largement, de mesurer le dynamisme de la filière. Première couche des nouveaux réseaux, la fibre déployée dans les territoires accroît leur compétitivité, ainsi que celle de leurs entreprises, tout en les ouvrant à l'innovation et aux nouveaux usages. Plus d'activité, moins de chômage, meilleurs services publics, les RIP démontrent toujours un peu plus leur importance pour l'avenir des territoires. Malgré une année 2015 en dessous des prévisions en termes de croissance, l'ensemble des acteurs se sont montrés plus qu'optimistes en 2016, malgré un appel à la vigilance. 

Une croissance en hausse, mais en dessous des prévisions pour 2015

Parfois synonyme de ralentissements et de crispations, l'année 2015 reste globalement bonne pour les industriels et l'emploi sur les RIP. Comme le note Etienne Dugas, c'est "une filière dynamique", avec un chiffre d'affaires en hausse de 15%, mais "malgré tout on se plaint, parce que c'est inférieur aux prévisions". Fin 2015, le chiffre d'affaires de la filière RIP était de 1,45 milliard d'euros, mais il pourrait atteindre 2 milliards fin 2016. Autre indicateur, l'emploi : 6.000 emplois directs contre les 7.000 prévus par les prévisions de croissance. Un "fort ralentissement" qui n'empêche pourtant pas une augmentation de 17% des effectifs - certes inférieure aux 48% et 30% observée lors des deux exercices précédents. Au total, les effectifs ont crû de 124% entre 2012 et 2015. Par ailleurs, 51% des entreprises interrogées ont annoncé vouloir augmenter de plus de 20% leurs effectifs d'ici 3 ans. Les plus optimistes y lisent un doublement (de 6.000 à 12.000 emplois) pour fin 2017, dont 9.000 à fin 2016. A l'horizon 2020, 21.000 emplois pourraient être directement liés aux RIP. Alors que pour l'heure, selon les acteurs économiques, l'offre de formation professionnelle et qualifiante reste encore "très insuffisante". Pour y répondre, un contrat de filière devrait être signé entre l'Etat et la Firip, et pour Etienne Dugas, "le plus tôt sera le mieux […], nous sommes prêts à nous engager sur les emplois, en charge à l'Etat […] de nous aider à financer la formation".
Une filière RIP qui par ailleurs s'étoffe, puisque si 51% des entreprises sont présentes sur les réseaux publics depuis au moins six ans, 22% le sont depuis moins de trois ans.

Confiance des investisseurs, vigilance sur l'exécution

Au-delà des prévisions, le lancement de nombreux projets dans les territoires ainsi que le franchissement attendu de la barre symbolique du million de prises construites sur les RIP annoncent un "bon cru 2016" pour Etienne Dugas. Même son de cloche pour Antoine Darodes, qui estime que "le baromètre est toujours au beau fixe". Sans pour autant tomber dans l'excès de confiance, puisque selon le directeur de l'Agence du numérique, "il va falloir que l'on soit vigilant, car le chemin est encore long". Plusieurs défis, comme l'exécution des travaux, et son corollaire en terme de formation des individus, ainsi que l'industrialisation des déploiements notamment en aérien feront l'objet d'une attention particulière. Autre point positif mis en lumière par l'observatoire, "l'appétence" des investisseurs pour les RIP qui ne semblent plus y voir un risque mais une opportunité ; notamment parce que le basculement vers la fibre semble inéluctable à moyen terme. Par ailleurs, le relatif consensus politique autour des RIP, ainsi que le bon accueil du public pour la fibre rassurent désormais les acteurs financiers, qui disposent de plus d'une meilleure visibilité à long terme.

Dépasser rapidement les inquiétudes de 2015

Quant aux freins de l'année 2015, ils semblent en partie levés. Suite aux élections départementales et régionales, les deux échelons qui portent les financements des réseaux d'initiative publique, des retards ont été observés, aussi bien avant qu'après l'arrivée de nouvelles équipes et de nouvelles majorités. Résultant en un blocage des situations, comme par exemple dans l'ancienne région Nord-Pas-de-Calais où le SMO La Fibre numérique 59/62 est actuellement sans exécutif. Toujours attendue, la notification de la Commission européenne "devient presque un non-sujet" pour Antoine Darodes, " c'est quelque chose qui appartient essentiellement au passé". Une confiance qui se traduit dans le nombre de dossiers traités et des décaissements qui pourraient atteindre 150 à 180 millions d'euros d'ici fin 2016. Enfin, la fusion Numericable-SFR fin 2014 a pesé sur l'activité des professionnels des RIP. SFR, premier client des réseaux d'initiative publique, représentait plus de 60% du chiffre d'affaires des RIP. Rendant d'autant plus importante la venue du plus grand nombre d'opérateurs. 

Initiative publique, compétitivité et baisse du chômage à la clé

Le déploiement de la fibre n'est pas qu'un enjeu technologique, mais également économique. Pour Gabrielle Gauthey, le bilan des réseaux publics est "sans appel en termes d'extension de la couverture fixe et mobile". Comme l'a rappelé la directrice des investissements et du développement local de la Caisse des Dépôts, "il ne s'agit pas de faire du financement public", mais de l'"initiative publique pour permettre à l'innovation privée de se libérer, et donc d'émerger". La construction de réseaux neutres, ouverts et mutualisables, en favorisant l'émergence d'un "marché plus ouvert" se traduit par davantage de compétitivité pour les entreprises, "et donc une attractivité économique accrue". Selon l'observatoire, ce sont par exemple plus de 145 millions d'euros de gain annuel de pouvoir d'achat, dont 90 millions pour les entreprises, qui sont réalisés grâce aux RIP. Par ailleurs, RIP est synonyme de hausse d'activité et de baisse du chômage. L'observatoire révèle une corrélation entre des taux de création d'entreprises plus élevés, baisse du chômage et présence d'un RIP. Pour 2014, le taux de chômage dans les 196 zones d'emploi situées sur un RIP était ainsi de 9,71%, contre 10,43% dans les 108 zones hors-RIP.
Porteur d'activités, parfois non-délocalisables, les RIP vont également "dans le sens de l'histoire", "dans le sens de l'évolution des réseaux" pour Gabrielle Gauthey. "Jamais nous n'avons eu autant besoin d'investissements" a-t-elle rappelé, "et la France n'est pas en train de gagner des places en terme de couverture", alors même que "les débits vont être multipliés par des facteurs vertigineux". Internet des objets, équipements mobiles, cloud… nécessiteront tous du très haut débit. Pour y faire face, les industriels misent selon elle sur la virtualisation des réseaux, dont la première couche, territoriale et bien physique, est la fibre déployée par les RIP. Socle sur lequel les opérateurs et les fournisseurs de services pourront venir proposer leurs offres. Appelant à maintenir ces réseaux ouverts et à travailler en faveur de l'investissement, Gabrielle Gauthey a assuré à l'ensemble des élus et professionnels présents sa "détermination pour faire avancer, dans l'intérêt général, [...] le développement des territoires et du numérique". Ce modèle français des RIP, alliant initiative publique et investissement privé, est par ailleurs porté hors des frontières nationales, notamment en Afrique, par la Caisse des Dépôts et la Firip.