Congrès des maires - A quoi vont ressembler les nouveaux Scot "grenellisés" ?
La loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 a fait du schéma de cohérence territoriale (Scot) la clef de voûte de l'aménagement durable. Mais l'outil Scot est-il en mesure de répondre à cette ambition ? Sa réalisation, intégrant les différentes politiques d'orientation et de planification, n'est-elle pas trop lourde, trop longue, trop coûteuse ? Quel rôle sera laissé aux plans locaux d'urbanisme (PLU) dans ce nouveau contexte ? Qu'ils aient déjà réalisé un Scot ou qu'ils songent à le faire, de nombreux élus s'interrogent sur les nouvelles obligations découlant du Grenelle. Un atelier organisé sur ce sujet le 25 novembre dans le cadre du Congrès des maires leur a permis de recueillir quelques explications.
Une généralisation en 2017
Sylvie Rodrigues-Garcia, de la Fédération nationale des agences d'urbanisme (Fnau), s'est livrée à un exercice pédagogique sur les apports de Grenelle 2 pour les Scot, dix ans après leur création via la loi SRU. "Pour généraliser les Scot sur tout le territoire, toutes les communes seront soumises à la règle de la constructibilité limitée à partir du 1er janvier 2017", a-t-elle expliqué. A cette date, aucune commune non couverte par un Scot approuvé ne pourra, sauf dérogation, ouvrir à l'urbanisation une zone AU délimitée après le 1er juillet 2002 ou une zone naturelle. De 350 aujourd'hui, le nombre de Scot devrait donc passer à 800 d'ici 2017.
La portée du Scot a aussi été renforcée et son contenu largement complété, a également rappelé la représentante de la Fnau. Le rapport de présentation des Scot englobe désormais une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers au cours des dix années précédant l'approbation du schéma et justifie les objectifs chiffrés de limitation de cette consommation compris dans le document d'orientation et d'objectifs. Outre la protection et la mise en valeur des espaces naturels, agricoles et forestiers, et des paysages, le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) – la loi a tenu à mettre l'adjectif au pluriel – inclut aussi les objectifs des politiques publiques d'implantation commerciale, d'équipements structurants, de développement des communications électroniques, de préservation des ressources naturelles, de lutte contre l'étalement urbain, de préservation et de remise en bon état des continuités écologiques.
Un super PLU ?
A l'actuel document d'orientations générales est substitué un document d'orientation et d'objectifs (DOO) destiné à rendre le Scot plus opérationnel. Ce DOO ratisse large. Il doit déterminer les conditions d'un développement urbain maîtrisé et les principes de restructuration des espaces urbanisés, de revitalisation des centres urbains et ruraux. Il définit les modalités de protection des espaces nécessaires au maintien de la biodiversité et à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques. Il doit contenir des objectifs chiffrés de consommation économe de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain qui peuvent être ventilés par secteur géographique ainsi que les projets d'équipements et de dessertes collectifs. Doivent aussi y figurer les objectifs en matière de maintien ou de création d'espaces verts dans les zones faisant l'objet d'une ouverture à l'urbanisation ainsi que les objectifs d'offre de nouveaux logements et ceux de la politique d'amélioration et de réhabilitation du parc de logements existant, public ou privé. Le DOO est d'autant plus important qu'il pourra imposer au PLU un certain nombre de règles. Comme le fait de définir des secteurs dans lesquels l'ouverture de nouvelles zones à l'urbanisation est subordonnée à l'obligation pour les constructions, travaux, installations et aménagements de respecter, soit des performances énergétiques et environnementales renforcées, soit des critères de qualité accrus en matière d'infrastructures et de réseaux électroniques. Autre exemple : le DOO du Scot pourra déterminer une valeur minimale en dessous de laquelle ne peut être fixée la densité maximale de construction résultant de l'application des règles des PLU. Si ces dernières sont contraires aux normes minimales de hauteur, d'emprise au sol et d'occupation des sols fixées par le DOO, elles cessent de s'appliquer passé un délai de 24 mois à compter de la publication du schéma, de sa révision ou de sa modification. Le Scot peut aussi imposer des secteurs situés à proximité des transports collectifs existants ou programmés dans lesquels les PLU doivent imposer une densité minimale de construction. A noter aussi que les Scot sont désormais soumis à une obligation de compatibilité étendue aux directives de protection et de mise en valeur des paysages et de prise en compte des schémas régionaux de cohérence écologique et des plans climat énergie territoriaux (PCET) lorsqu'ils existent.
"Le Scot va encadrer la constructibilité et il y a un risque progressif d'empiétement sur les PLU", a pointé Sylvie Rodrigues-Garcia. "Le Scot n'a pas pour mission d'être un super PLU, a mis en garde Michel Heinrich, député-maire d'Epinal et président du Scot des Vosges centrales. Il est nécessaire de laisser de l'espace aux communes dans leur PLU tout en respectant les orientations du Scot." L'élu craint qu'on en demande aujourd'hui trop au Scot. "On se pose aujourd'hui la question de la limite de l'outil et de la bonne gouvernance avec tous les acteurs concernés sur un territoire. Il y aura un énorme travail de conseil, de coopération institutionnelle à faire avant et après l'élaboration pour assurer le suivi de tous les objectifs et un gros besoin de moyens." Pour porter la voix des élus, Michel Heinrich a annoncé qu'une fédération des présidents de Scot était en cours de constitution et qu'elle tiendra sa première assemblée générale début 2011.